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La sagesse est-elle l'absence de passions ?

Publié le 28/07/2005

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«De quelle nature est la disposition esthétique, pour ainsi dire le tempérament de la vertu, courageux donc joyeux ou abattu par la crainte et découragé? Eh bien, une réponse est à peine nécessaire. Cette dernière disposition de l'âme propre à un esclave ne se rencontre jamais sans une haine cachée de la Loi et le coeur joyeux (...) est un signe de l'authenticité d'une intention vertueuse.» Les passions que sont l'amour ou la joie ne nous rendent certes pas sages, mais nous disposent de telle sorte que nous puissions plus facilement devenir sages. [3. La passion peut nous rendre vertueux.]Plus fondamentalement et plus immédiatement, certaines passions peuvent nous rendre vertueux. Revenons à Descartes : «L'amour, quelque déréglée qu'elle soit, a toujours le bien pour objet (...).

« [III.

Le sage est l'auteur de ses passions.] [1.

La passion de la générosité.] La passion n'est plus à considérer comme l'autre de la sagesse, mais la sagesse elle-même doit tenir compte de lapassion comme constitutive de la nature de l'homme.

Dès lors, la sagesse intériorise la passion, la fait sienne etl'exalte.

C'est là tout le sens de la théorie cartésienne de la générosité, passion sui generis qui est la conditionmême de la sagesse : «La vraie générosité, écrit Des cartes à l'article 153 des Passions de l'âme, qui fait qu'unhomme s'estime au plus haut point qu'il se peut légitimement estimer, consiste seulement partie en ce qu'il n'y a rienqui véritablement lui appartienne que cette libre disposition de ses volontés, ni pourquoi il doive être loué ou blâmésinon pour ce qu'il en use bien ou mal, et partie en ce qu'il sent en soi-même une ferme et constante résolution d'enbien user.» La générosité est ainsi cette passion de notre liberté, telle qu'elle est pour nous l'objet d'une admiration,d'un étonnement dans cesse renouvelé.

La générosité repose sur le sentiment que nous avons de la puissance denotre liberté.

Elle n'est pas le résultat d'un simple jugement porté sur notre nature, mais le retentissement internede notre liberté.

Être libre, ce n'est pas seulement savoir que nous pouvons déterminer notre volontécapricieusement, mais être positivement résolus à bien user de cette liberté.

Notre âme est rendue encline par lesentiment de notre liberté à éprouver de la générosité. [2.

Générosité et sagesse.] «L'une des principales parties de la sagesse est, écrit Descartes à l'articleprécédent du même ouvrage, de savoir en quelle façon et pour quelle causechacun se doit estimer ou mépriser.» C'est justement la générosité qui nouspermet de nous estimer comme nous le méritons.

Elle est par là l'élémentprincipal de la sagesse, qui conditionne tous les autres aspects de cettedernière.

Etre sage, ce n'est plus refuser toute passion, c'est être généreux,c'est-à-dire aussi penser la sagesse comme essentiellement pratique, tournéevers l'action et le bon usage de notre volonté, et non plus comme purementthéorique.

Descartes donne ainsi à nouveau au terme de sagesse son sensancien de discipline de vie.

Celui qui vit sagement est celui qui est capable devivre dans ses passions, sans chercher à les abolir, comme nous l'expliqueencore Descartes au dernier article de son traité : «La sagesse estprincipalement utile en ce point, qu'elle enseigne à s'en rendre maître [despassions] et à les ménager avec tant d'adresse, que les maux qu'elle causesont fort supportables, et même qu'on tire de la joie de tous.» Or, si nouspouvons nous rendre maîtres de nos passions, ce n'est pas en vertu d'unemaîtrise innée de l'âme sur le corps, c'est l'effet même de la générosité.Comme l'explique l'article 156, par la générosité, nous ne désirons que ce quidépend de nous, nous ne voulons de mal à personne, étant disposés nous-mêmes à estimer tous les hommes, etc. [3.

Générosité et réflexion.] La générosité, qui permet de mettre à sa place chacune des autres passions, d'user comme il convient de chacuned'entre elles, a ainsi une place particulière dans l'économie des passions de l'âme.

Ce n'est pas une passion quis'impose à moi sans que j'y sois pour rien; au contraire, c'est une passion dont je suis l'unique cause (parce que jesuis libre et que j'ai le sentiment de cette liberté), c'est même une passion qui m'apprend que toutes les passionsdépendent toujours aussi de moi.

La générosité est ainsi cette passion qui, en me révélant ma véritable natured'être destiné à la liberté, me rend sage et m'apprend que cette sagesse est elle-même incarnée dans l'usage que jefais de mon corps.

A l'image d'une séparation entre l'âme et le corps, la générosité oppose une sagesse conçuecomme une réflexion sur la passion, un retour sur elle-même de ma propre liberté, laquelle prend sa forme pleinedans l'exercice de mes passions. [Conclusion] Si la sagesse a pu nous sembler dans un premier temps incompatible avec la passion, c'est parce que passion etsagesse restaient extérieures l'une à l'autre.

Or la passion n'est pas l'absolue soumission du sujet à quelque chosed'étranger, pas davantage que la sagesse n'est le retranchement du sujet sur lui-même.

La passion est ce qui faittoujours appel à ma liberté, je suis encore libre quand je suis passionné.

Aussi la sagesse ne s'oppose-t-elle plus à lapassion, si cette dernière, sous la forme de la générosité ou de la magnanimité, indique le sens ultime de toutesagesse qui n'apparaît que dans l'exercice de la passion, dans la pratique.

"Et parce que l'une des principales parties de la sagesse est de savoir en quelle façon et pour quelle cause chacunse doit estimer ou mépriser, je tacherai ici d'en dire mon opinion.

Je ne remarque en nous qu'une seule chose quinous puisse donner juste raison de nous estimer, à savoir l'usage de notre libre arbitre, et l'empire que nous avonssur nos volontés.

Car il n'y a que les seules actions qui dépendent de ce libre arbitre pour lesquelles nous puissionsavec raison être loués ou blâmés, et il nous rend en quelque façon semblables à Dieu en nous faisant maîtres de. »

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