Satires de Juvénal
Publié le 06/04/2013
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Satires La biographie de Juvénal est incertaine. On sait qu'il se forma à l'éloquence dans les salles de déclamation et l'on suppose qu'il se mit à écrire vers la quarantaine, après la mort de Domitien (96). La première satire est postérieure à l'an 100. On ne connaît pas d'autres oeuvres de Juvénal.
«
.--- ------ - EXTRAITS -------~
«So us l'impul sio n
i mp
érie use de leur sexe,
[les femmesi
c o mm ettent des
crime s d'un e autre scélér atesse
et la déb auche est le
m
oindr e de le urs
éga reme nts.
,.
La col ère est bonne co ns eillère
Quand un énervé d'eunuque prend femme ;
quand Mévia, épieu en main, sein décou
vert, transperce un sanglier toscan ; quand
les patriciens se voient tous défiés
par les
richesses
d'un seul , sous le
rasoir
duquel crissait ma
barbe drue de jeune homme ;
quand un échappé de la
po
pulace du Nil, un esclave de
Canope, Crispinus, rejetant
de ses épaules un manteau
de pourpre tyrienne évente
une bague
d'été à ses doigts
en sueur, incapable de
sup
porter le poids d'une gemme
plus lourde , il est difficile
de
ne pas écrire de satires !
Impudentes agapes
Regarde le bel effet de cette
langouste
énorme dans le
plat qu'on apporte au maî
tre.
Comme elle nargue les
convives, de sa queue
entou
rée d' asperges , quand elle
apparaît portée
solennelle
ment dans les mains d'un grand coquin
d'esclave ! Toi, on te sert sur une soucoupe
une langoustine encastrée dans une moitié
d' œuf, chère digne d'une offrande fanéraire.
Virron arrose son poisson d'huile de
Vena
frum.
Toi, le chou blafard qu'on t'apporte ,
pauvre homme, pue l'huile de lampe ; c' est
que
l'huile qu'on met dans vos saucières
est celle qu'amènent les descendants de
Micipsa dans leurs barques en roseaux à la
proue aiguë.
Les nuits de Messaline
Écoute ce que Claude a supporté.
Dès que
sa femme le voyait endormi, osant préférer
un
grabat à son lit du Palatin, l' Augusta
courtisane prenait deux capes de nuit et
s'échappait avec une seule suivante .
Ses
cheveux noirs cachés sous une perruque
blonde , elle entre dans la tiédeur du lupa
nar aux tapisseries usées ; une
cellule vide
lui
est réservée, et là , sous l'inscription
mensongère de « Lycisca », les seins main
tenus par un réseau d'or , elle prostitue sa
nudité et découvre ses flancs
quit' ont porté ,
ô généreux Britannicus.
Elle accueille avec
des cajoleries quiconque se présente et
réclame son salaire .
Quand le tenancier
congédie les filles, elle se retire à regret :
tout ce qu'elle
peut faire , c'est de clore la
dernière sa cellule .
Encore ardente du prurit
de ses
sens tout vibrants , elle s'en va,
fatiguée de l'homme , mais rassasiée non
pas.
Hideuse avec ses
joues plombées qui
souille la suie de la lampe, elle apporte au
lit impérial les relents du lupanar.
« Men s s ana in corpore
sano
»
Voulez-vous un conseil ? Eh
bien, laissez aux dieux le soin
d'apprécier ce qui nous
con
vient, ce qui doit servir nos in
térêts.
Au lieu de ce qui plaît
seulement , les dieux nous
donneront ce qui nous est
vraiment utile.L'homme leur
est encore plus cher
qu'il ne
l'est à soi-même.
Emportés
par l'élan de nos cœurs , par
l'aveuglement de nos ardents
désirs , nous souhaitons une
épouse , des enfants .
Eux, ils
savent ce que seront ces "'-·· - •
enfants, ce que sera cette
épouse .Sipourtantvoustenez
à demander quelque chose, à
offrir dans les temples les entrailles et les
saucisses sacrées
d'un blanc cochon de lait,
que vous prières sollicitent un esprit sain
dans un corps sain.
Traduit du latin par Pierre de Labriolle
et François Villeneuve,
Les Belles-Lettres, 1964
« Atticus a-t-il une ta b le de choix, il passe pour
magnifique .•• »
NOTES DE L'ÉDITEUR
« Malgré des exagérations et lallure
oratoire de ces sortes de philippiques en
vers, les diatribes de Juvénal sont belles par
la virulence même de leurs attaques, par
l 'énergie parfois brutale de leur réalisme,
par
l'éloquence de leur élévation morale.
Mais
il est curieux qu'elles aient été
provoquées par cette époque de Trajan où
vivait
Pline le Jeune dont ce dernier nous donne
une idée autrement douce que
l'indignation de Juvénal.
Juvénal a été imité
par
Boileau.
» T.
Suran, Auteur grecs et
latins,
Librairie Hatier, 194 7.
d'heureux
accouplements de mots, ces
Satires ! Combien servent encore, mêlés à
notre pensée,
à nos habitudes verbales, de
ces traits partis de là, et
qu'on retrouve à la
lecture avec un étonnement charmé, comme
une ancienne connaissance, rajeunie
soudain et remise
à flot par le contexte, dont
on avait oublié
l'origine, faute d'un instant
d'attention
en seconde ou en rhétorique ! »
Émile Henriot, Les Fils de la louve,
Dominique Wapler éditeur, 1949.
1 Roger-Viollet 2, 3 , 4 gravures de Pie rre Noël, Flammarion .
1943 / B.N.
« Ce ramassé, cette contraction, cette
densité, cette force balistique du mot,
éclatant au but après encore deux mille ans,
de toute sa vigueur initiale ; tantôt injure,
tantôt touche de couleur et image, ou
maxime.
Quel arsenal de centons,
JUVÉNAL02.
»
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