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Les sciences humaines suffisent-elles à connaître l'homme ?

Publié le 08/02/2005

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Puisqu'il s'agit de considérer l'homme, non pas dans son identité individuelle, personnelle - rendre compte non de Callias, mais de l'humanité, l'universel, présent en lui dirait Aristote, de considérer ce que l'homme comporte de nécessité (il n'y a en effet de science au sens strict que du nécessaire) -, plusieurs normes ou exigences fondamentales caractérisent ainsi cette volonté de connaître l'homme, c'est-à-dire d'amener l'homme à une connaissance positive, objective. Examinons ces exigences.  

b)      L'observation Les S-H ont pour principe de renoncer d'abord à toute hypothèse préalable concernant leur objet et pour cela, privilégient l'observation de faits inter-subjectivement observables. Exemple : le psychologue prend pour point de départ de son étude des symptômes, soit un ensemble de signes traduisant divers états psychologique et/ou physiologiques. Enjeu : réitérer le geste fondateur de la modernité à l'égard de la nature (les phénomènes physiques n'ont pu entrer dans la science qu'au prix d'un renoncement aux causes finales, c'est-à-dire que s'est opérée une démythification des phénomènes physiques) : l'homme n'est pas être pourvu d'une âme d'origine divine et immatérielle (impérissable aussi), mais chacune de ses pensées est explicable soit pour les sciences cognitives, en vertu de processus fonctionnels émergent de certaines connexions neuronales, soit, pour la psychanalyse, en termes de mécanismes pulsionnels inconscients.  

c)       L'expérimentation Ainsi, le plus souvent et quand cela est possible, les S-H s'efforcent d'ajouter à l'observation, le recours à l'expérimentation. Exemple : l'étude des fonctions cognitives se fait en laboratoire, de même en neurosciences : l'imagerie cérébrale est un élément indispensable pour la validation de certains présupposés. Une fois de plus, l'homme est traité comme une chose (la chose ici = le cerveau, organe physique observables et potentiellement expérimentable objectivement).  

d)      La quantification La quantification, conformément au modèle des sciences de la nature devient ainsi une exigence fondamentale et la mesure est à la base de l'objectivité des S-H Exemple : recours très fréquent aux mathématiques, en particulier aux statistiques en Sociologies (sondages, études démographiques ...) L'enjeu : atteindre la formulation de « lois « qui prendraient, comme la loi physique, la forme d'une fonction mathématique où l'homme en tant qu'individu ne serait qu'une variable. En un mot, effacement de la singularité.

Les sciences humaines postulent qu’il est impossible de connaître l’homme indépendamment de ses déterminations naturelles, biologiques, physiques, et indépendamment de ses relations avec son milieu ou son environnement (naturel, social). Cependant, n’y a-t-il pas une part de l’humain qui leur échappe ici ? Car en effet, réduire l’humain à des déterminations empiriques (qu’il suffirait de connaître pour connaître l’homme), n’est-ce pas éluder tout ce qui, en l’homme, se distingue de la nature physique ou sensible (la raison, la morale, l’esthétique, la liberté) ? Les S-H suffisent-elles à connaître l’homme au sens où toute connaissance digne de ce nom doit se borner à ce qui est observable, quantifiable, expérimentable, ou bien l’homme déborde-t-il toujours les cadres posés par elle de sorte qu’elles seront toujours imparfaites, c’est-à-dire partielles, inachevées, lacunaires, et donc insuffisantes à connaître l’homme ?

« Transition : Les S-H font donc œuvre d'objectivité au sens où elles considèrent finalement l'homme comme une chose.

Durkheimdisait d'ailleurs « les faits sociaux sont des choses » et le behaviorisme, selon les mots Skinner, un de sesfondateurs, se voulait établir des lois du comportement « par delà la liberté de l'homme ».Mais , suffit-il d'emprunter des procédés à des sciences déjà constituées pour définir une connaissance authentique ? Difficulté : importation du modèle physique. Enjeu : à quel type de connaissance de l'homme avons-nous affaire ? La « scientificité » des S-H ne manque-t-elle pas d'un projet spécifique qui lui assurerait ainsi une certaine autonomie au regard des autres sciences ? Problème : l'objectivité est bien possible quand il s'agit de phénomènes naturels (qui sont ob-jectum , jetés devant), mais dans le cas des S-H, l'homme = objet et sujet de la recherche.

Autrement dit, la connaissance quel'homme a de lui-même semble irrémédiablement entachée de subjectivité de sorte qu'il y a peut-être uneimpossibilité de principe à ce que les S-H puissent atteindre, à la manière des sciences naturelles, une objectivitéabsolue.Ce problème a été explicitement pris en charge par W.

Dilthey.

2- Les sciences humaines sont suffisantes à connaître l'homme en tant que « compris » L'enjeu pour Dilthey = mise au point d'une méthodologie alternative aux méthodes des sciences naturelles mais quiaurait la même validité logique que la méthode des sciences exactes.Autrement dit, il s'agit, contre le positivisme, d'affirmer la possibilité pour les S-H d'être rigoureuses (= n'être pasenfermées dans la métaphysique) et cependant différentes des sciences physico-mathématiques.

Pour cela, deuxconcepts : Explication et Compréhension a) L'explication ne peut porter sur l'homme Pour penser l'homme selon une méthode scientifique, il faudrait, comme c'est le cas en physique, disposer d'unecertaine distance.

Cette distance rend possible une analyse de l'objet, c'est-à-dire une restitution du processuscausal qui lui a donné naissance, processus dont l'expression sous forme d'une loi constitue l'achèvement del'analyse.

Or cette distanciation, dès qu'elle porte sur l'homme pose au moins deux problèmes : 1- l'homme y estalors sujet et objet 2- à supposer qu'un tel écart soit tenable, le praticien des S-H peut-il être idéologiquementneutre (Cf.

le cas du matérialisme historique) ? En un mot, se pose le problème de savoir comment l'homme peut-il sans contradiction penser l'homme car, ne peut-on considérer que la psychologie, est un phénomène psychologique propre à l'occident (ses cadres nepermettent d'expliquer la mentalité de l'homme primitif de l'anthropologie), ou encore que la sociologie est un faitsociologique typique du monde moderne ? b) L'homme compris Parce que les S-H renvoient nécessairement à la pensée que l'homme a de lui-même, elles ne peuvent être selon Dilthey que des « sciences de l'esprit ».

Ces sciences, par conséquent, « se distinguent tout d'abord des sciencesde la nature en ce que celles-ci ont pour objet des faits qui se présentent à la conscience comme des phénomènesdonnés isolément de l'extérieur, tandis qu'ils se présentent à nous-mêmes de l'intérieur comme une réalité et unensemble vivant originairement […] l'ensemble de la vie psychique constitue partout une donnée primitive etfondamentale.

» Dilthey conclut ainsi que « nous expliquons la nature, nous comprenons la vie psychique » , c'est-à- dire que « l'ensemble vécu est ici la chose primitive, la distinction des parties qui le compose ne vient qu'en secondlieu ».

L'essentiel : l'homme ne peut penser que l'homme que par réflexion (tout praticien des S-H est uni à lasociété qu'il veut examiner, n'est pas désengagé de la vie qu'il veut décrire) et du coup, il ne dispose pas de ladistance nécessaire à une objectivation, et c'est pourquoi, à l'explication causale, toute science de l'esprit ramèneraun phénomène à ses raisons , ses intentions , et sera science du sens . Transition : Sous l'influence de Dilthey, les S-H ont ainsi pris conscience de la nécessité d'avoir une méthodologie propre(différentes de celles des sciences de la nature), c'est-à-dire d'être autonome.

Ce faisant, elles ont du ainsirenoncer à leur ambition positiviste première.

Désormais, les S-H ont gagné en modestie : elles ont accepté den'être pas la théorie de l'homme mais le dévoilement de certaines dimensions de son comportement.

La scientificité des S-H est donc surtout descriptive . 3- Les sciences humaines sont suffisantes à décrire avec rigueur certaines dimensions du comportement humain Les sciences de la nature expliquent par des théories universelles, des faits déjà connus.

Au contraire, on peut dire que les S-H attirent notre attention sur des faits singuliers, mais qui n'apparaissent pas (ne sont pas desphénomènes explicables causalement).

Elles montrent, mais ne démontrent pas. Du coup, à la question de savoir si elles suffisent à connaître l'homme, il convient de dire que non pour autant que l'on tient pour modèle de la connaissance achevée et accomplie, les sciences de la nature ou science physiquelogico-mathématique.

Cela, pour autant, ne diminue pas leur intérêt : si connaître l'homme revient à élargir notrevision de l'homme, l'apport des S-H est très satisfaisant.. »

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