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LE SENTIMENT IMMÉDIAT DE LA RÉALITÉ

Publié le 16/03/2011

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A) Position réaliste 1° Le sens commun pense qu'il n'y a pas de problème et que la croyance à la réalité du monde extérieur est immédiate, qu'elle va de soi. Des philosophes ont ratifié cette façon de voir : ce sont les psychologues de l'École écossaise :

a - Être, c'est être donné, immédiatement, absolument, en ce que rien, dans l'ensemble des opérations grâce auxquelles nous connaissons l'objet, ne crée, n'affecte, ou ne médiatise d'une façon quelconque cet objet réel connu. C'est parce que l'être est donné qu'il possède une réalité substantielle, et confère aux idées la vérité lorsqu'elles l'expriment adéquatement. b - Indépendance à l'égard de la connaissance: donc, la relation connaissance-objet ne change absolument rien à l'un des termes, l'objet est de toute importance pour l'autre terme : « puisqu'une connaissance sans objet réel et indépendant est posée par hypothèse comme intellectuellement vide « (cf. la relation du cheval et du poteau auquel il est attaché; encore le cheval peut-il ébranler le poteau à force de tirer sur la corde, tandis que l'objet réel est par essence inébranlable).

« exister, et qu'on ne peut comprendre pleinement qu'en la cherchant du regard en son lieu.

Ainsi la chose est lecorrélatif de mon corps, et plus généralement de mon existence, dont mon corps n'est que la structure stabilisée,elle n'est pas d'abord une signification pour l'entendement, mais une structure accessible à l'inspection du corps.

Laperception naturelle n'est pas une science, elle ne pose pas les choses sur lesquelles elle porte, elle ne les éloignepas pour les observer, elle vit avec elles, elle est la foi originaire qui nous lie à un monde comme à notre patrie. b - Et cependant la chose nous ignore, elle repose en soi...

elle est, non pas un interlocuteur mais un Autreréellement silencieux, un Soi qui nous échappe autant que l'intimité d'une conscience étrangère.

La chose ne seréduit pas aux expériences dans laquelle nous la rencontrons.

Le réel est le milieu où chaque moment est nonseulement inséparable des autres, mais synonyme des autres, le milieu où les aspects se signifient les uns les autres: plénitude insurpassable ; impossible de décrire complètement la couleur du tapis sans dire que c'est un tapis delaine, et sans impliquer dans cette couleur une certaine valeur tactile, un certain poids, une certaine résistance auson.

La chose est ce genre d'être dans lequel la définition complète d'un attribut exige celle du sujet tout entier, etoù par conséquent le sens ne se distingue pas de l'apparence totale.

Cézanne encore disait : « Le dessin et lacouleur ne sont plus distincts; au fur et à mesure que l'on peint, on dessine, plus la couleur s'harmonise, plus ledessin se précise...

Quand la couleur est à sa richesse, la forme est à sa plénitude.

» Ce qui oppose l'imaginaire auréel, c'est que l'imaginaire (le tableau par exemple), n'a pas la solidité du réel, le sens précède en lui l'existence ets'est enveloppé du minimum de matière.

Dans le réel, sens et existence ne font qu'un; le tableau lacéré, nous avonsdes morceaux de toile.

La pierre brisée, nous avons des fragments de pierre : le réel se prête à une explorationinfinie, il est inépuisable.

Nos ustensiles ne sont que posés sur le monde, les choses sont enracinées dans un fondde nature inhumaine.

Ainsi, la chose est moins un pôle d'attraction qu'un pôle de répulsion : nous nous ignorons enelle, et c'est justement ce qui en fait une chose. c - Comment comprendre à la fois que la chose soit le corrélatif de mon corps connaissant, et qu'elle le nie? ce quiest donné, ce n'est pas la chose, seule, mais l'expérience de la chose, une transcendance dans un sillage desubjectivité, une nature qui transparaît à travers une histoire.

Si l'on voulait avec le réalisme faire de la perceptionune coïncidence avec la chose, on ne comprendrait même plus comment le sujet peut assimiler la chose, commentaprès avoir coïncidé avec elle il peut la porter dans son histoire, puisque par hypothèse il ne possède plus rien d'elle.Pour que nous percevions les choses, il faut que nous les vivions.

Cependant, si l'on adopte /'idéalisme de lasynthèse, notre relation vécue avec les choses est encore déformée. Si le sujet fait la synthèse du perçu, il faut qu'il domine et pense une matière de la perception, qu'il organise et relielui-même tous les aspects de la chose, c'est-à-dire que la perception perd son inhérence à un sujet individuel, et àun point de vue, la chose sa transcendance et son opacité.

Vivre une chose, ce n'est ni coïncider avec elle, ni lapercer de part en part.

Le sujet percevant, sans quitter sa place et son point de vue, dans l'opacité du sentir, setend vers des choses dont il n'a pas la clé, et dont cependant il porte en lui-même le projet. Quand je perçois un caillou, je n'ai pas expressément conscience de ne le connaître que par les yeux, de ne leconnaître que par certains aspects perceptifs, et cependant cette analyse, si je la fais, ne me surprend pas.

Jesavais sourdement que la perception globale traversait et utilisait mon regard, le caillou m'apparaissait en pleinelumière devant les ténèbres bourrées d'organes de mon corps.

Je devinais des fissures possibles dans le bloc de lachose, pour peu que j'eusse la fantaisie de fermer un œil ou de penser à la perspective.

C'est en quoi il est vrai dedire que la chose se constitue dans un flux d'apparences subjectives.

Et pourtant je ne la constituais pasactuellement, je ne posais pas activement et par une inspection de l'esprit les relations de tous les profils sensorielsentre eux, et avec mes appareils sensoriels.

C'est ce que nous avions exprimé en disant que je perçois avec moncorps.

Mon regard sait ce que signifie telle tache de lumière dans tel contexte, il comprend la logique du monde.

Il ya une logique du monde que mon corps tout entier épouse.

Mon corps possède un montage universel qui lui donne laclé de toutes les correspondances entre les sens.

Une chose n'est donc pas effectivement donnée dans laperception.

Elle est reprise intérieurement par nous, reconstituée et vécue par nous en tant qu'elle est liée à unmonde dont nous portons en nous les structures fondamentales.

Vécue par nous, elle n'en est pas moinstranscendante à notre vie, parce que le corps humain, avec ses habitus qui dessinent autour de lui un entouragehumain, est traversé par un mouvement vers le monde lui-même.

Le comportement animal vise un milieu (Unwelt)animal, et des centres de résistance, Wilderstand.

Quand on veut le soumettre à des stimuli naturels dépourvus detoute signification concrète, on provoque des névroses.

Le comportement humain s'ouvre à un monde, Welt, et à unobjet, Gegenstand, par-delà les ustensiles qu'il se construit, il peut même traiter le corps propre comme un objet.

Lavie humaine se définit par le pouvoir qu'elle a de se nier dans la pensée objective, et ce pouvoir, elle le tient de sonattachement primordial au monde lui-même. Qu'est-ce donc que cette compréhension originaire du monde? Ce monde a son unité sans que je la produise par unacte d'entendement : c'est l'unité d'un style.

Je n'ai pas une vue perspective, puis une autre, puis une autre, et uneliaison d'entendement entre elles, chaque perspective passe dans l'autre.

Quand je regarde l'horizon il ne me fait paspenser à tel autre paysage que je verrais si j'y étais, celui-ci à un troisième, etc...

Je ne me représente rien, maistous les paysages sont déjà là, dans l'enchaînement concordant et l'infinité ouverte de leurs perspectives.

Quand jeregarde le vert brillant d'un vase de légumes, il ne me fait pas penser à la céramique, elle est là, il me la présente,avec sa croûte mince et lisse et son intérieur poreux, dans la manière particulière dont le vert se module. Dans l'horizon intérieur ou extérieur de la chose ou du paysage, il y a co-présence, ou co-existence des profils, quise noue à travers l'espace et le temps.

Le monde est l'horizon de tous les horizons, le style de tous les styles.

Ildonne à toutes nos expériences une unité non-voulue dont le corrélatif est en moi l'unité générale et prépondérante. »

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