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Sidoine Apollinaire Un témoin du crépuscule.

Publié le 17/10/2012

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Sidoine Apollinaire Un témoin du crépuscule. Vers 430-487 Gallo-Romain né à Lyon, fils et petit-fils de préfets des Gaules, poète et historien, personnage politique et évêque, il est un des écrivains qui nous renseignent le mieux sur la Gaule du milieu du Ve siècle, sur les rapports entre Gallo-Romains, Wisigoths et Francs. Appartenant à une riche fapille de la noblesse sénatoriale, il joue d'abord un rôle politique à Rome. Marié à la fille de l'empereur Avitus, puis préfet de Rome en 468 au temps de l'empereur Anthémius, il part ensuite pour l'Auvergne afin d'affermir l'autorité romaine dans cette région, pôle de résistance à la pénétration barbare. C'est alors, vers 470, qu'il est élu évêque de Clermont per saltum, c'est-à-dire sans être encore prêtre, mais il est aussitôt ordonné et sacré. Sa vie familiale laïque cesse. Cependant, la pression wisigothique s'accentue et quand l'empereur Julius Népos (473-475), aux abois, donne aux Wisigoths le droit de s'installer en Auvergne comme ils le sont déjà de la Loire aux Pyrénées et dans la péninsule Ibérique, Sidoine est de ceux qui protestent. En vain! Ils arrivent à Clermont. L'évêque, ayant refusé de fuir, est arrêté et emprisonné près de Carcassonne. Mais deux ans plus tard, c'est-à-dire un an après la déposition de Romulus Augustule, le dernier empereur de Rome (476), il se rallie au roi des Wisigoths, Euric, demande son pardon et l'obtient. Ni théologien ni particulièrement dévot, mais esprit généreux, excellent administrateur, ayant une claire intelligence po- litique et un incontestable talent littéraire, il est une des plus belles figures du monde impérial romain en train de s'effondrer. C'est lui qui a donné des Francs la plus exacte description dont on dispose: «Leurs cheveux roux sont ramenés du sommet de la tête vers le front, laissant la nuque à découvert; leurs yeux sont verdâtres et humides; leur visage est rasé avec une maigre moustache. Des vêtements collants serrent les membres de ces guerriers de haute stature et laissent à nu leurs jarrets. C'est un jeu pour eux de lancer au loin leur francisque, sûrs du coup qu'ils portent, de faire tourner leur bouclier et de sauter d'un bond — sur l'ennemi, devançant le javelot. Dès l'enfance, la guerre est leur passion.« En d'autres pages, il déplore la décadence du latin, écrivant à un ami: «Toute la pourpre du noble langage perd son éclat à cause de l'incurie du vulgaire. La multitude des paresseux est tellement croissante que si nous ne travaillons pas à préserver la pureté de la langue latine de la rouille des barbarismes populaires, nous ne tarderons pas à déplorer sa disparition...« Mort à Clermont vers 487, il a laissé des poèmes et neuf livres de lettres en vers. La fermeture de Port-Royal La destruction du foyer du jansénisme 29 octobre 1709 Après la «paix de l'Eglise« en 1669, la doctrine de Jansénius est, sinon tolérée, du moins «oubliée« pour un certain temps. La vieille querelle gallicane, qui oppose la monarchie française à la papauté, occupe alors le devant de la politique religieuse de Louis XIV. Les jansénistes vont connaître une dizaine d'années de répit. Les ouvrages de Pascal, des Arnauld, de Nicole, de Lancelot, ont des lecteurs jusqu'à la cour. La traduction française de la Bible par Lemaistre de Sacy, directeur spirituel des religieuses du monastère de Port-Royal des Champs, connaît un grand succès. Les «solitaires« sont revenus s'installer aux Granges, près du couvent, et ont rouvert leurs Petites Ecoles. Port-Royal redevient le foyer actif du jansénisme, centre intellectuel et mondain, fréquenté par des sympathisants de la haute société, allié du libéralisme parlementaire. Louis XIV s'en inquiète et s'en irrite. Sous la pression de ses confesseurs j&- suites et de Mme de Maintenon, il prend, en 1679, de nouvelles mesures contre Port-Royal, comme l'interdiction au couvent de recevoir des novices. Le Grand Arnauld, menacé, doit s'exiler en Belgique. Son successeur est un oratorien, Pasquier Quesnel. L'ouvrage qu'il soutient en Sorbonne, en 1701, Un Cas de conscience, ranime la discussion autour des «Cinq Propositions« attribuées à Jansénius et considérées comme hérétiques. La communauté de Port-Royal refuse toujours de signer le «formulaire« qui condamne les «Cinq Propositions«. Ce refus tenace autorise le retour des persécutions. En 1706, les religieuses sont privées du droit de recevoir les sacrements. Puis l'abolition de Port-Royal des Champs est décrétée par un arrêt du 9 février 1707, précédant la bulle papale du 11 mars 1708 qui supprime définitivement l'abbaye des Champs. Le 11 juillet 1709, le cardinal de Noailles, archevêque de Paris, signe l'ordre d'extinction du couvent. Le 29 octobre, le lieutenant de police d'Argenson vient signifier aux 22 religieuses qui restent de lui livrer leurs archives, avant d'être dispersées dans des communautés hors du diocèse de Paris. Il leur donne un quart d'heure pour faire leurs préparatifs et leurs adieux. En 1710, par un nouvel arrêt royal, tous les bâtiments de Port-Royal des Champs seront rasés. En 1713 ne restent que les murs de clôture. Les corps des défunts jansénistes sont alors exhumés et ensevelis dans d'autres cimetières. L'HISTOIRE VIVANTE Visiter Port-Royal des Champs, près de Chevreuse. Voir la gouache de Madeleine de Boullongne: Chapitre tenu par les religieuses de Port-Royal des Champs, au musée de Versailles. Le sacre pontifical de Pépin le Bref Consécration de la dynastie carolingienne 754 Depuis la fin du VII' siècle, les maires du palais d'Austrasie, issus de Pépin l'Ancien, s'étaient peu à peu emparés du pouvoir aux dépens des souverains mérovingiens, les rois fainéants. Cette mainmise avait été favorisée par l'essor économique et culturel de l'Austrasie, qui contrastait avec la décadence du reste du royaume. Après sa victoire sur les Arabes à Poitiers en 732, Charles Martel, héritier de la lignée, jouit d'un prestige exceptionnel qui lui permettrait de soumettre l'aristocratie et de s'imposer à l'Eglise. Pourtant, il ne prit pas la couronne. C'est son fils, Pépin le Bref, qui fonde la nouvelle dynastie. En novembre 751, Pépin le Bref fit enfermer dans un monastère le dernier Mérovingien, puis il se fit reconnaître à Soissons comme roi des Francs. Mais à la traditionnelle élection par les grands du royaume, il fit ajouter une autre cérémonie présidée par saint Boniface, l'apôtre de la Germanie: une onction d'huile sainte qui faisait désormais du roi un personnage sacré. Ce sacre, connu des rois wisigoths et peut-être anglo-saxons, n'avait jamais été pratiqué par les Mérovingiens (Clovis avait seulement reçu le baptême); certainement inspiré des exemples bibliques, il faisait du roi, qui était déjà l'élu des Francs, l'élu de Dieu, détenteur d'un véritable sacerdoce. Avant de devenir roi, Pépin le Bref avait obtenu l'accord du pape. Etienne II, menacé par les Lombards en Italie, cherchait en effet un allié; après avoir approuvé l'usurpation de Pépin, il vint en France au cours de l'hiver 753-754. Pépin le Bref l'accueillit avec la plus grande déférence et s'engagea à intervenir en Italie à la fois pour écarter le danger lombard et pour faire reconnaître propriété du Saint-Siège les territoires dont celui-ci prétendait disposer en vertu d'une fausse donation attribuée à l'empereur Constantin. Moyennant quoi, au printemps ou au cours de l'été 754, dans l'abbatiale de Saint-Denis, le pape procéda de nouveau au sacre du prince franc, et aussi à celui de ses deux fils, Charles — le futur Charlemagne et Carloman; désormais, Pépin n'était plus seul l'élu de Dieu, mais c'est la famille carolingienne qui apparaissait comme choisie par Dieu pour guider le peuple franc. Le souverain en tira un prestige accru et une autorité encore plus grande sur l'Eglise franque. De plus était ainsi inaugurée une alliance étroite entre la monarchie carolingienne et la papauté, dont la conclusion logique fut, moins d'un demi-siècle plus tard, le couronnement impérial de l'an 800. La pragmatique sanction de Bourges Aux sources du gallicanisme Après la prise de Paris et la réconciliation franco-bourguignonne, Charles VII entreprend de réorganiser son royaume. Peu à peu, il met en place une administration plus efficace. Pour améliorer les finances de l'Etat, il institue un impôt permanent. Enfin, il crée une véritable armée régulière. Ces différentes mesures renforcent le pouvoir royal face aux menaces d'oppositions princières. De plus, il travaille à mettre l'Eglise de France sous la tutelle de l'Etat. A partir de 1432 réapparaissent ainsi, au sein de l'Eglise de France, des tendances gallicanes. Déjà, sous le règne de Charles VI, les deux «soustractions d'obédience« de 1398 et de 1407 avaient permis au clergé français de prendre quelques distances vis-à-vis de la papauté. En 1438, Charles VII réunit donc à Bourges l'assemblée du clergé de France. Il lui fait approuver les décrets promulgués par le concile de Bâle, qui venait d'élire l'antipape Félix V de Savoie. Ces décrets constituent la pragmatique sanction de Bourges. Celle-ci limite les appels en cour de Rome et interdit la publication des bulles pontificales sans l'autorisation royale. Elle supprime les annates, c'est-à-dire le paiement au pape des bénéfices pendant les vacances de sièges. Le problème de la régale, droit que possède le roi de France de toucher les revenus des évêchés vacants et d'y faire les nominations ecclésiastiques, est réglé en faveur du roi. L'objectif de la pragmatique sanction de Bourges est de rendre les sièges épiscopaux français électifs, sans l'avis 1438 de Rome, qui se bornera à investir les élus; le roi compte ainsi faire élire ses propres candidats par les chapitres de chanoines. Le parlement et l'université de Paris se feront par la suite les meilleurs défenseurs de la pragmatique sanction, laquelle sera d'autant plus favorable à la royauté que Charles VII ne l'appliquera que dans la mesure où elle correspond à son intérêt. Il n'hésitera pas à demander pour ses candidats des bulles de provisions à Rome, lorsque les chanoines de telle ou telle cathédrale restent insensibles à ses recommandations. Cependant, la pragmatique sanction de Bourges, qui établit une véritable Eglise gallicane, déclenche de violentes protestations de Rome. Louis XI se sentira obligé de l'amodier sérieusement. Dans les faits, le roi reste le maître absolu de tous les bénéfices, le dispensateur des grâces. Tantôt il s'entend à cet effet avec le Saint-Siège, tantôt il s'adresse directement aux chapitres et dicte les élections. La pragmatique sanction de Bourges est une étape importante vers la monarchie absolue. L'hérésie cathare Une fissure dans la France catholique -XIIIe siècle Le «catharisme« est mal connu, car ses principes n'étaient dévoilés qu'aux seuls initiés. Dérivé du vieux manichéisme oriental, il toucha le monde byzantin (bogomiles) avant de gagner l'Italie du Nord et le sud de la France. Il reposait sur un dualisme élémentaire: l'univers est en proie à la lutte de deux principes également forts et premiers, le bien et le mal. Le mal est un élément essentiel, et non accidentel, de la réalité; il y a coïncidence entre le mal et la matière. Les hommes, quoi qu'ils fassent, sont donc damnés dès leur naissance et ne peuvent espérer qu'en l'infinie bonté de Dieu, qui se manifeste par un seul sacrement tout-puissant, le consolamentum. Comme les hommes ne peuvent résister dans leur vie quotidienne à la force du principe mauvais, le catharisme distinguait deux sortes de croyants: les simples fidèles, qui reçoivent le consolamentum lorsqu'ils sont à l'article de la mort, et les parfaits (une petite minorité), qui sont les vrais cathares (les «purs«) et qui reçoivent le consolamentum à l'âge adulte. Dès lors, ces derniers doivent mener une vie ascétique d'uné grande pureté morale, qui fait d'eux de vrais hommes libres en dépit du piège de leur corps. Ils peuvent mener cet ascétisme jusqu'au suicide rituel, généralement par inanition (endura). Les rapports du catharisme avec l'orthodoxie chrétienne sont mal connus. La plupart des cathares accordaient une grande importance au Christ, tout en niant sa nature humaine qui aurait limité sa perfection. Ils utilisaient également l'Evangile comme livre saint. Mais, en fait, tout séparait les cathares du christianisme, sur le plan du dogme comme sur celui du culte. Le catharisme, plus qu'une hérésie, était une religion différente qui revêtait certains aspects du christianisme pour mieux se répandre et constituait un grave danger, tant pour l'autorité laïque que religieuse. Le catharisme dut être introduit dans le Midi par des seigneurs revenus de la deuxième croisade. Dans la seconde moitié du XII' siècle, il se développa rapidement en Languedoc et gagna toutes les classes de la société. Albi en fut l'un des centres, d'où le nom d'«albigéisme«. Les tentatives de conversion ayant échoué et la lutte religieuse prenant peu à peu un aspect politique, le pape lança, dès 1209, la croisade dite «des albigeois«. L'Inquisition, après un demi-siècle d'une lutte impitoyable, réussit à extirper l'hérésie. Le concile d'Orléans Premier concile national de l'Eglise franque Juillet 511 Par les armes ou par la ruse, Clovis avait réussi à s'emparer de la majeure partie de la Gaule. Il avait fait l'unité des Francs, vaincu les Alamans et les Wisigoths; s'il avait échoué contre les Burgondes, il s'en était ensuite fait des alliés. Ces succès lui avaient valu de recevoir de l'empereur de Constantinople le titre de consul. Enfin et surtout, Clovis avait assuré son pouvoir en acceptant le baptême catholique, les autres rois barbares étant ariens, donc hérétiques. Si, après sa conversion, les évêques ne lui avaient pas ménagé leur appui, notamment contre les Wisigoths, le roi, de son côté, ne pouvait pas ne pas chercher à assurer son autorité sur eux, à une époque où l'Eglise apparaissait comme le meilleur relais du pouvoir monarchique. Tel fut le but principal du concile que Clovis convoqua à Orléans, le I I juillet 511. Le concile réunit 32 évêques venus surtout de l'Aquitaine (sud de la Loire) et des provinces de Tours, Sens et Rouen; en revanche, des régions colonisées par les Francs, seuls étaient présents les évêques de Noyon, Amiens, Senlis et Soissons. Saint Remi, évêque de Reims, était curieusement absent. Un tel épiscopat, issu essentiellement de la classe sénatoriale méridionale, devait être assujetti à la monarchie. On a conservé plusieurs manuscrits du texte des 31 décisions, ou canons, du concile, ce qui prouve son retentissement. Ils traitent de la discipline ecclésiastique; ils insistent en particulier sur la vie chaste que doit mener le clergé. Ils accordent aux évêques des droits et des pouvoirs étendus: ceux-ci sont considérés comme les seuls propriétaires du patrimoine ecclésiastique; ils reçoivent la moitié des offrandes des fidèles dans les églises des cités épiscopales et le tiers dans les églises rurales. De même, le concile réaffirme la soumission des monastères au pouvoir épiscopal. Le prestige de l'Eglise est également accru par l'extension du droit d'asile, si important en ces temps troublés. Enfin, le concile se préoccupe de la liturgie et interdit les pratiques superstitieuses. Mais — et c'est là que le concile fit oeuvre politique — il fut aussi décidé que, pour devenir clerc, un homme libre devait avoir l'autorisation du roi ou du comte et, surtout, qu'aucun laïc ne saurait désormais être élu évêque sans l'accord du roi: la monarchie pouvait de la sorte contrôler la composition du corps épiscopal et donc le soumettre à ses vues. Ainsi se fit l'alliance du trône et de l'autel. Adalbéron, archevêque de Reims Il donne le trône aux Capétiens ? -988 Adalbéron, neveu de l'évêque de Metz du même nom, issu d'une grande famille lorraine, intelligent et pieux, homme d'action autant qu'ambitieux, est promu archevêque de Reims à la fin de 969. Aussitôt, il réforme son chapitre, en restaure le temporel et entreprend des travaux à la cathédrale; peu après, il réforme des abbayes de sa province, réunit un synode et se rend à Rome. Mais la situation politique requiert bientôt son attention. Reims occupe en effet une position clef entre l'Empire, qui se fortifie grâce au dynamisme de la nouvelle dynastie des Ottons, et la « Francie «, où les derniers rois carolingiens résistent mal à la pression des Robertiens; ces deux partis vont solliciter l'appui impérial. En 979, Adalbéron favorise une alliance entre le roi carolingien Lothaire et Otton II ; mais ce dernier meurt peu après. Lothaire reste donc seul face aux intrigues du Robertien Hugues Capet. Ayant pris le parti d'Otton III, successeur d'Otton II, Adalbéron doit faire pièce à Lothaire qui cherche à profiter du jeune âge du nouvel empereur pour s'emparer de la Lorraine et de l'Alsace. L'archevêque se rapproche donc des Robertiens, aux prétentions illégitimes, et, par conséquent, trahit Lothaire dont il est le vassal. Le roi le fait alors traduire devant une grande assemblée réunie à Compiègne; Adalbéron n'a même pas à prendre la peine de se justifier, car l'intervention d'Hugues Capet à la tête d'une petite armée disperse la Cour et met fin au procès. A la mort de Lothaire, Adalbéron rentre facilement en grâce auprès du nouveau roi, le jeune Louis V; en effet, se sentant menacé, ce dernier s'est rapproché de l'Empire. Peu après, rassuré, il change d'attitude, prend l'archevêque en haine et vient l'assiéger dans Reims. De nouveau accusé de trahison, Adalbéron est encore cité à Compiègne, mais Louis V meurt le 22 mai 987, à 20 ans à peine, ne laissant pour héritier que son oncle Charles de Lorraine. Adalbéron profite alors de la présence des grands à Compiègne pour faire écarter Charles du trône et soutenir la candidature d'Hugues Capet. La cour impériale favorise cette manoeuvre. En effet, Hugues paraît beaucoup moins dangereux que les Carolingiens aux yeux des conseillers d'Otton III, parmi lesquels Gerbert, ancien maître de l'école épiscopale de Reims, compagnon fidèle d'Adalbéron et futur pape. Une nouvelle assemblée à Senlis, puis à Noyon proclame roi Hugues Capet qu'Adalbéron sacre lui-même à Reims, le 3 juillet 987. Pour payer les services d'Adalbéron, le nouveau roi doit renoncer à la Lorraine et conclure une paix définitive avec l'Empire. Non sans réticences, l'archevêque rend un dernier service à Hugues Capet en acceptant d'associer au trône Robert, le fils de ce dernier. Puis il meurt le 23 ianvier 988. Le pape Martin IV Un pape trop dépendant Vers 1210-1285 Le 22 août 1280 meurt le pape Nicolas III. Ce pontife s'est efforcé de limiter en Italie l'influence du parti français dirigé par Charles d'Anjou, auquel la papauté a confié naguère le royaume de Sicile après la défaite des Hohenstaufen. Charles d'Anjou voudrait imposer au conclave son candidat, le Français Simon de Brie, qui est finalement élu le 22 février 1281, sous le nom de Martin IV. Ce dernier fait carrière dans l'administration de son pays et, devenu cardinal en 1261, y est souvent revenu comme légat. A ce titre, il a notamment favorisé le traité qui a placé Charles d'Anjou, frère de Saint Louis, sur le trône de Sicile en 1266. Il a aussi modifié les statuts de l'université de Paris. En dépit d'une piété incontestable, Martin IV est surtout l'instrument des ambitions de Charles d'Anjou. Grâce au pape, le roi de Sicile obtient la charge de sénateur de Rome, c'est-à-dire la haute main sur la Ville éternelle et les Etats de l'Eglise. Mais plusieurs régions, en particulier la Romagne, ne reconnaissent pas son autorité ; Rome, elle-même, n'est pas sûre puisque le pape évite d'y résider, lui préférant Viterbe, puis Orvieto et, enfin, Pérouse. Toujours soumis aux intérêts angevins, Martin IV rompt avec Constantinople à laquelle un pacte d'Union l'avait lié après le concile de Lyon de 1274. En effet, Charles d'Anjou rêve d'une nouvelle croisade contre l'Empire d'Orient et cherche un prétexte. La décision pontificale a la triste conséquence de séparer de nouveau les Eglises latine et grecque. Mais elle est surtout sans intérêt pour Charles d'Anjou dont les projets sont anéantis, le 30 mars 1282, par le drame des Vêpres siciliennes, qui entraîne le massacre de tous les Français résidant en Sicile. Pendant que l'insurrection gagne la péninsule et même les Etats de l'Eglise, Pierre, roi d'Aragon, qui a épousé une descendante des Hohenstaufen, débarque dans l'île. Les excommunications fulminées par Martin IV, aux motifs politiques trop évidents, sont sans effet sur la révolte. Pourtant, le pape est obéi par Charles quand il lui interdit de s'opposer en combat singulier à Pierre d'Aragon pour mettre fin à la querelle. D'ailleurs, Martin IV déclare Pierre déchu de son royaume d'Aragon et négocie son remplacement par un des fils du roi de France Philippe le Hardi. C'est ainsi que naît la «croisade d'Aragon « qui échoue lamentablement au cours de l'été 1285 et ruine la réputation d'équité acquise sous Saint Louis par la monarchie française. Martin IV n'en a d'ailleurs pas vu la conclusion malheureuse, car il est mort le 28 mars 1285. Le Grand-Orient La révolution par les nobles Le mouvement maçonnique, né en Angleterre, apparaît en France peu après 1730. Condamné par le pape Clément XII, il n'est jamais inquiété par le pouvoir civil pour une raison majeure: les plus hauts dignitaires de la hiérarchie maçonnique sont de grands seigneurs. Au duc d'Antin, premier grand maître de l'ordre en 1738, succède le comte de Clermont et, à sa mort, en 1771, un autre prince du sang, le jeune duc de Chartres, futur duc d'Orléans. Le substitut de ce dernier, le duc Charles de Montmorency-Luxembourg, sera le responsable du schisme de la maçonnerie française et le fondateur, en 1773, du Grand-Orient de France. Depuis 1767, intrigues, imbrications et foisonnement d'obédiences créent le désordre dans la Grande Loge de France; il faut reprendre les choses en main. Luxembourg s'y emploie dès 1772. Ouvert aux idées nouvelles, «philosophe«, grand lecteur de Rousseau, il préconise de profondes réformes dans l'Etat, une véritable révolution en faveur d'une monarchie constitutionnelle. Administrateur du petit Etat maçonnique, il élabore des statuts nouveaux: avec habileté et autorité, il transforme la Grande Loge de France en Grande Loge «nationale« (qualificatif peu courant jusqu'alors); préfigurant l'Assemblée nationale de 1789, les «maîtres« des «ateliers« provinciaux s'unissent aux «maîtres« parisiens, comme le feront le tiers état et les privilégiés. Le ler septembre 1773, les francs-maçons ont leur nuit du 4-Août: ils acceptent de se soumettre au principe démocratique 1773 de l'élection, comme l'ont fait avant eux le duc de Chartres et le duc de Luxembourg. Des travaux de la Constituante maçonnique sort un ordre restructuré, le Grand-Orient, véritable modèle de démocratie hiérarchisée et contrôlée. Le duc de Chartres est solennellement installé, le 22 octobre 1773, entouré d'officiers habillés couleur de feu, avec leurs insignes et leurs outils. Laissant derrière lui s'anémier la Grande Loge à laquelle restent attachés quelques anciens «vénérables«, le Grand-Orient, dès 1774, connaît un succès grandissant: c'est un club à la mode où «tout Versailles accourt«, où — grande innovation! -- les femmes sont admises dans des «loges d'adoption«, où la noblesse rencontre l'esprit, savants, écrivains, artistes, et se mêle à la grande et à la petite bourgeoisie. La liturgie maçonnique traduit l'aspiration à une fraternité universelle; la Révolution va lui emprunter beaucoup de ses messages et de ses slogans. Le grand maître Philippe d'Orléans, devenu vingt ans plus tard Philippe Egalité, votera la mort de son cousin Louis XVI. L'HISTOIRE VIVANTE Voir la «Cérémonie de réception des maures d'une assemblée de francs-maçons au XVIIP siècle«, au cabinet des Estampes de la Bibliothèque nationale (Paris). Notre-Dame-de-la-Garde La «bonne Mère« Depuis la fondation de Marseille, il existe un poste de vigie sur la colline de 160 m qui domine la mer. En 1218, le pape Honorius III mentionne, parmi les dépendances de l'abbaye Saint-Victor, une chapelle de Sainte-Marie-de-la-Garde sur cette même hauteur. Entièrement rebâtie au XVe siècle, consacrée en 1544, la chapelle est enclose dans l'enceinte du fort que François Ier a fait construire en 1524 pour défendre la ville contre son assaillant, le connétable Charles III de Bourbon. Depuis le XVI' siècle, la colline de la Garde reçoit de nombreux visiteurs, souvent illustres, rois, empereurs, mais surtout des pèlerins, particulièrement en périodes de calamités. Pendant la grande peste de Marseille (1720-1721), l'évêque, Mgr Belsunce, va quotidiennement dire sa messe à Sainte-Marie-de-laGarde. La Révolution transforme le fort en prison. En 1852, on décide de construire une église sur cet emplacement, tout en conservant la partie la plus ancienne des bâtiments existants. Grâce à une souscription patronnée par Pie IX et grâce au produit d'une loterie populaire, les travaux commencent en 1853. Les plans ont été confiés au Nîmois Henri Espérandieu, collaborateur de Léon Vaudoyer, l'architecte de la cathédrale de Marseille et du palais de Longchamp. A la mort d'Espérandieu, en 1874, son compatriote Révoil lui succède. Le style du sanctuaire est le romano- ou néo-arabo-byzantin, cher aux architectes du XIX' siècle. Son plan est basilical: une crypte, ici entièrement conquise 1853 sur le roc; une église haute à coupole, avec une nef à trois travées; un clocher au porche ouvert de trois côtés comme dans les églises romanes de la vallée du Rhône; à l'intérieur, le blanc du marbre italien, le rouge de celui de Brignoles, le brun du granit corse, le rose du porphyre de l'Estérel, le vert de la brèche des Alpes composent une symphonie de couleurs. Dans le clocher haut de 45 m, on a logé le bourdon: 8234 kg, 2,50 m de hauteur, 2,40 m de diamètre, la septième cloche de France par la grosseur. Au sommet, on a érigé, en 1870, la statue dorée de la Vierge à l'Enfant. Ce groupe d'Eugène Lequesne, élève de Pradier, a une hauteur de 10 m et pèse 4500 kg. Le visage de la Vierge mesure, à lui seul, 1,25 m; celui de l'enfant, 0,80 m. A l'intérieur de la statue, un escalier à vis permet de monter dans la tête de la Vierge et de voir la mer par l'ouverture de ses yeux. Depuis 1892, un ascenseur conduit à l'escalier du sanctuaire. Consacrée en 1864, avant la fin des travaux, au cours de grandes fêtes, l'église reçoit du pape Léon XIII, en 1879, le titre rare de basilique mineure. Notre-Dame-de-la-Garde fait désormais partie intégrante du paysage marseillais: la vigie et la «bonne Mère« ne font qu'un. Saint Bernard Une âme d'élite Figure dominante du christianisme médiéval, saint Bernard naît en Bourgogne en 1090. En 1112, avec une vingtaine de compagnons, il entre à Cîteaux qui, jusque-là, n'avait qu'un faible rayonnement. Trois ans plus tard, il fonde Clairvaux, près de Bar-sur-Aube, dont il demeure l'abbé jusqu'à sa mort. Sous l'impulsion de saint Bernard, l'ordre cistercien connaît un essor extraordinaire: au milieu du XII' siècle, il contrôle 300 abbayes, dont 70 sont des dépendances de Clairvaux. Saint Bernard veut libérer l'âme par une foi dépouillée et confiante; il s'oppose au style intellectuel et raisonneur qui se fait jour dans les écoles. Bien que cultivé, il se défie des prétentions de la raison et exige qu'elle reste soumise à la foi; ainsi s'explique sa violente controverse avec Abélard. Pour saint Bernard, il n'y a que deux chemins parallèles pour mener à Dieu. En premier lieu, la pénitence: l'abbé de Clairvaux est un ascète et traite son corps avec rigueur; il exige de ses moines une pauvreté totale et la pratique régulière du travail manuel. En second lieu, la confiance en l'amour divin et en l'intercession de la Vierge, à laquelle toutes les églises cisterciennes sont dédiées; il professe une dévotion plus humaine, moins formelle que celle qui fut pratiquée avant lui. Saint Bernard parcourt l'Europe; il est le directeur de conscience, entre 1130 et 1150, de la chrétienté tout entière. Il n'entend pas modifier la structure de la 1090-1153 société et défend l'institution féodale: dans les abbayes cisterciennes, la condition des frères recrutés dans le milieu aristocratique est bien distincte de celle des moines «convers«, issus de la paysannerie et chargés des besognes matérielles. Saint Bernard estime qu'il suffit de corriger les vices humains pour rétablir l'ordre voulu par Dieu et que le péché est venu perturber. Il prend donc parti dans toutes les grandes affaires de son temps: orateur de grand talent, il combat un schisme qui affaiblit la papauté; il se déclare partisan convaincu de la primauté de l'autorité pontificale sur l'ensemble de l'Eglise, et, à Rome, son influence s'affermit quand un moine cistercien devient le pape Eugène III (1145-1153). Il intervient aussi chaque fois que les lois de l'Eglise ou la morale chrétienne lui paraissent en danger. Ainsi, il exerce un véritable arbitrage sur l'Europe, ne craignant pas de parler sévèrement aux rois. En 1146 enfin, il prêche avec fougue la seconde croisade dont, plus tard, on lui reprochera l'échec. Il meurt en 1153, après une vie partagée constamment entre l'action et la contemplation. Sainte Blandine IIe siècle Martyre chrétienne, Blandine fit partie des quarante-huit chrétiens suppliciés à Lyon en 177, sous le règne de Marc-Aurèle. Dernière survivante, elle eut à endurer des souffrances particulièrement cruelles. Sainte Blandine est fêtée le 2 juin. Les martyrs de Lyon Fondée au I" siècle avant J.-C., la colonie romaine de Lyon prit une importance économique croissante. Dans la seconde moitié du IP siècle, après les cultes d'Isis et de Mithra, le christianisme s'y implanta, apporté d'Asie Mineure par l'évêque saint Pothin, disciple de saint Polycarpe. La communauté chrétienne fut persécutée en 177, sous le règne de Marc-Aurèle. Quarante-huit chrétiens furent martyrisés, dont saint Pothin. Blandine était une jeune esclave, appartenant à une chrétienne elle aussi martyrisée. Malgré sa faible constitution, elle supporta dès son arrestation une journée de supplices qui auraient dû la tuer, aux dires de ses bourreaux. Quelque temps après, elle fut conduite dans 1 ' amphithéâtre, avec Maturus, Sanctus et Attale, pour être livrée aux bêtes. Attachée à un poteau en forme de croix, elle vit ses compagnons subir les supplices du fouet, de la chaise de fer rougie au feu, les encourageant et priant. Aucune bête ne l'ayant touchée, elle fut reconduite en prison. Chaque jour, on la ramenait dans l'amphithéâtre assister aux souffrances d'autres suppliciés, mais elle resta inébranlable. Le supplice de Blandine Demeurée la dernière, avec Pontius, un garçon de quinze ans qui fut mis à mort sous ses yeux, elle fut soumise à son tour aux supplices du fouet, des bêtes et du gril. Enfin, mise dans un filet, elle fut livrée à un taureau. On l'acheva, probablement d'un coup de glaive. Restés sans sépulture, les corps des chrétiens furent finalement brûlés et leurs cendres jetées dans le Rhône. Plus tard, la communauté chrétienne se reconstitua grâce à saint Irénée, venu d'Asie mineure. Le martyre des chrétiens de Lyon fut raconté en détail dans une lettre envoyée par l'Eglise de Lyon et de Vienne aux Eglises d'Asie et de Phrygie. Conservée par l'historien Eusèbe, la lettre fut transcrite dans son Histoire ecclésiastique. Témoignage "Joyeuse et allègre de s'en aller, elle avait l'air d'une invitée à un repas de noces et non pas jetée aux fauves.... Plusieurs fois projetée en l'air par l'animal, elle n'avait plus le sentiment de ce qui se passait, tant elle était prise par son espérance, son attente des promesses, son entretien avec le Christ. On l'immola elle aussi. Et les païens eux-mêmes avouaient que jamais, chez eux, une femme n'avait enduré des souffrances aussi nombreuses et aussi cruelles." Eusèbe, Histoire ecclésiastique L'abbaye de Jumièges fondée vers 654 Fondée par saint Philibert, l'abbaye de Jumièges fut abandonnée en 851 à la suite des incursions des Normands. Relevée au Xe siècle, elle devint la plus riche de Normandie. Des bâtiments dévastés pendant la Révolution subsistent d' importantes ruines, témoignage majeur de l'art roman en Normandie. Histoire de l'abbaye A l'époque mérovingienne, l'effort d'évangélisation dans les campagnes reçut une impulsion décisive grâce à l'action de l'Irlandais saint Colomban et de ses disciples. A partir de Luxeuil, des fondations religieuses se multiplièrent dans la Gaule du Nord. Soumis à l'autorité absolue de leur abbé, les abbayes obéissaient à la règle ascétique de saint Colomban, supplantée ensuite par la règle bénédictine. L'abbaye de Jumièges fut fondée en 654 par saint Philibert sur la rive droite de la Seine, en aval de Rouen. Pillée à plusieurs reprises par les Normands à partir de 841, l'abbaye fut finalement abandonnée en 851. Relevée en 928 par le duc de Normandie Guillaume Longue-Epée, elle devint aux XIe et XIIe siècles la plus riche de Normandie. Ses écoles étaient célèbres, comme la générosité de ses moines envers les miséreux, ce qui lui valut le surnom de "l'Aumônier". Elle fut notamment l'un des plus grands lieux de production de livres enluminés, influencés par le courant artistique issu de la réforme clunisienne. Charles VII séjourna à plusieurs reprises à Jumièges avec Agnès Sorel, qui habita longtemps un manoir proche et qui fut enterrée dans l'abbaye. Ravagé par les protestants en 1562, le monastère fut restauré en 1573 et entra en 1621 dans la congrégation de Saint-Maur. En déclin dès le début du XVIIP siècle, il fut supprimé en 1790, et les bâtiments furent dévastés pendant la période révolutionnaire. Les bâtiments L'église abbatiale Notre-Dame, datant de 1040-1067, reste un monument majeur de l'art roman en Normandie, avec sa façade à deux tours. Il subsiste aussi quelques murs de l'église carolingienne de Saint-Pierre, la salle des hôtes du XIP siècle, remaniée au XVe siècle pour servir de salle des gardes aux appartements de Charles VII, la salle capitulaire gothique et la maison abbatiale du XVIP siècle. On peut voir dans l'église un tombeau qui serait, selon la légende, celui des "énervés de Jumièges" (deux fils de Clovis II, révoltés et suppliciés; après avoir eu les nerfs des jambes brûlés, ils auraient été abandonnés sur un bateau et recueillis par saint Philibert) ou, selon une autre tradition, celui de deux ducs de Bavière, Tassilon et Théodore, prisonniers de Charlemagne. Repères chronologiques vers 625: fondation de l'abbaye de Saint-Denis, par Dagobert1er— 640 : Eloi, évêque de Noyon — 651: fondation de l'abbaye de Fleury-sur-Loire (future Saint-Benoît-sur-Loire) — 910: fondation de l'abbaye de Cluny. Saint Bruno XIe siècle Savant et mystique, saint Bruno eut de nombreux élèves à Reims, mais renonça à l' épiscopat pour se retirer dans la vie contemplative. Il fonda l'abbaye de la Chartreuse, origine de l'ordre des chartreux. Appelé à Rome par le pape Urbain II, il fonda un second monastère à La Torre, en Calabre. Le savant Né à Cologne vers 1030, Bruno étudia dans sa ville natale, puis à Reims et sans doute à Paris. Ordonné prêtre à Cologne vers 1050, il retourna ensuite à Reims, où il succéda à son maître Hermann comme écolâtre de la cathédrale, vers 1056. Chanoine de la métropole, il enseigna brillamment la théologie pendant une vingtaine d'années, attirant de nombreux élèves séduits par ses dons intellectuels (dont Odon de Lagery, le futur pape Urbain II). Son Commentaire sur les Psaumes et son Commentaire sur les Epîtres de Saint Paul sont restés célèbres. Nommé archi-diacre, il combattit farouchement le simoniaque Manassès de Gournay, devenu archevêque de Reims en 1067. Nommé chancelier de l'Eglise de Reims en 1075, Bruno ne modifia pas son attitude, et Manassès lui retira bientôt ses dignités, ordonna la saisie d'une partie de ses biens et le chassa de la cité. C'est probablement durant cet exil que Bruno eut la révélation de l'idéal contemplatif. Quand Manassès fut déposé en 1080, il refusa sa succession à l'archiépiscopat et choisit la vie d'ermite. L'ermite Avec deux amis, Pierre et Lambert, il se rendit en 1083 en Bourgogne, où saint Robert de Molesmes lui remit l'ermitage de Sèche-Fontaine. Ne se sentant pas encore assez éloigné du monde, il gagna la Savoie avec six compagnons; à Grenoble, il rencontra l'évêque Hughes, son ancien disciple, et s'installa sur son diocèse dans le massif de la Chartreuse, où il fonda un petit monastère, à l'origine de l'ordre des chartreux. En 1090, Urbain II, son ancien élève, appela Bruno à Rome. Sachant que le pape manquait de serviteurs fidèles et désintéressés, il obéit, mais à contre-coeur, et l'aida dans le gouvernement del'Eglise. Il refusa l'archevêché de Reggio, fut nommé légat à la cour de Roger de Calabre et obtint au bout de quatre ans de se retirer des affaires, à condition de demeurer en Italie. Il fonda alors un autre monastère en Calabre, Santa Maria della Torre, sur le diocèse de Squillace. Entré dans le calendrier romain en 1622, il est fêté le 6 octobre. Repères chronologiques 1054: rupture définitive des Eglises d'Orient et d'Occident — 1071: vaste élan de ferveur pour la construction d'édifices religieux à travers l'Europe; le gothique se substitue au roman; construction des grandes cathédrales — 1086: construction de la troisième abbaye de Cluny — 1098: fondation de Cîteaux. La Valette 1708 -1767 Jésuite envoyé dans les missions de la Martinique, La Valette se lança dans les affaires et fit faillite, entraînant dans la banqueroute des commerçants marseillais qui portèrent plainte contre la Compagnie de Jésus et obtinrent sa condamnation. L'affaire La Valette Les succès de la Compagnie de Jésus suscitèrent au XVIIe siècle la concurrence, la jalousie et les intrigues. Les attaques violentes de Pascal dans les Provinciales eurent une large audience et provoquèrent une énorme suspicion à l'égard des jésuites. Ceux-ci pensaient que la religion, ayant été donnée aux hommes pour les sauver, devait être rendue hospitalière. L'intransigeance de Pascal et de la hiérarchie ecclésiastique aboutit à leur donner une réputation de morale laxiste. Dans ce contexte, l'affaire La Valette apparut comme la confirmation éclatante du relâchement des moeurs et de l'hypocrisie de l'ordre. Antoine La Valette était entré dans la Compagnie de Jésus en 1725 et fut envoyé dans les missions de la Martinique en 1741. Nommé en 1754 supérieur des missions françaises en Amérique du Sud, il se lança dans le commerce, sans autorisation de ses supérieurs ni des autorités ecclésiastiques. Associé à un marchand de la Dominique, il fonda une compagnie et ses affaires auraient sans doute continué à prospérer sans la guerre de Sept Ans. Ses vaisseaux étant tombés aux mains des Anglais, il déclara la compagnie en faillite, laissant un passif de 1,8 million de livres (dont la plus grande partie due à deux négociants de Marseille, Gouffre et Lioncy). La condamnation des jésuites Les commerçants lésés assignèrent auprès des consuls de Marseille (tribunal de commerce) non seulement La Valette, mais les jésuites de la Martinique et même de la province de Paris considérés comme solidaires. Condamnés en mai 1760, les jésuites, mal conseillés, firent appel devant le parlement de Paris (dont ils savaient pourtant que les magistrats leur étaient depuis longtemps hostiles). En mai 1761, le parlement condamna les jésuites à rembourser les dettes de La Valette et à payer aux créanciers 50 000 livres de dommages et intérêts. En outre, il exigea d'examiner les contributions de l'ordre, qui furent condamnées en 1762 comme contraires aux lois du royaume. Les jésuites furent expulsés de tous les territoires dépendant de la Couronne et un décret de Louis XV du 26 novembre 1764 prononça la dissolution de la Compagnie. Repères chronologiques 1759: les jésuites expulsés du Portugal 1764: dissolution de l'ordre en France 1767: expulsion d'Espagne — 1773: suppression de la Compagnie entière par le pape Clément XIV —1814: rétablissement de l'ordre par Pie VII. L'ultramontanisme Renforcer l'autorité du pape Dès 1815 «La Révolution est plus terrible que du tion des peuples. Mais le pape, menacé temps de Robespierre... Non seulement par les patriotes italiens, a besoin de elle est debout, mais elle marche, elle l'appui des monarques européens, même court, elle rue«, clame de Maistre au si ceux-ci limitent son pouvoir. Lamen- lendemain de la Restauration. nais, condamné par Rome, abandonne Les penseurs ultramontains demeurent l'Eglise. Paradoxalement, les ultramonen effet hantés par le spectre de la Révo- tains sont devenus suspects au Saintlution. Selon ces catholiques intransi- Siège. geants, la monarchie constitutionnelle Mais un nouveau courant ultramontain porte en elle les germes de cataclysmes se`développe à mesure que les patriotes futurs. La seule voie de salut est de se mettent en péril le trône pontifical. Il se placer sous une autorité venue d'En- nourrit aussi de l'angoisse que les cathohaut: celle du successeur de saint Pierre. ligues ressentent devant le monde Ils appellent de leurs voeux un ordre moderne. Le journaliste Louis Veuillot européen théocratique, dont le pape est l'un des plu's \brillants représentants serait le souverain et les rois les simples de ce mouvement qui détourne peu à ministres. Ils fulminent contre les galli- peu les catholiques dn, second Empire et cans qui desservent les intérêts de l'Egli- pèse fort lourd dans le ckstin du régime. se en plaçant, par l'alliance du trône et La proclamation du dogme de l'infaillide l'autel, le pouvoir spirituel dans la dé- bilité pontificale comble les voeux des pendance d'un pouvoir politique faible. ultramontains. L'annexion des Etats L'avènement du dévot Charles X les pontificaux par l'Italie accroît encore le rassure un instant, mais les ordonnances prestige spirituel du pape. Jamais l'auto-d'inspiration gallicane prises par Mar- rité de Rome n'a été aussi forte à l'intétignac contre l'enseignement des con- rieur de l'Eglise. Mais c'est plus tard, grégations non autorisées leur prou- sous le pontificat de Pie X, que l'ultra-vent, une fois de plus, que la monarchie montanisme trouvera en France son opprime la religion avec la complicité de accomplissement définitif. En effet, la l'épiscopat. politique anticléricale de la Me Repu- Puisque la monarchie court à sa perte et blique va pousser le clergé français à trahit la religion, il n'y a plus qu'à soutenir le Saint-Siège. En 1905, la loi l'abandonner à son sort, décide Lamen- de séparation de l'Eglise et de l'Etat, en nais, qui réclame bientôt la séparation enlevant à l'Eglise de France tout stade l'Eglise et de l'Etat et la liberté de tut officiel, donne le coup de grâce au l'enseignement. Il mise sur le libéralisme gallicanisme. dont la victoire lui paraît inéluctable, en affirmant que la volonté du peuple n'est que l'expression de la souveraineté divine. Lamennais et ses amis mettent le journal L'Avenir au service de la libéra- Le protestantisme français Une marée montante 1547-1562 L'extension du protestantisme en France a été rapide et impressionnante, tant en surface qu'en profondeur. Telle est la constatation que peut faire l'historien qui considère la période qui suit la mort de François ler (1547) jusqu'en 1562 environ. Il existe des groupes réformés dans toutes les provinces de France et dans toutes les classes sociales: on peut dire, alors, qu'un cinquième des habitants, peut-être davantage, est détaché de l'Eglise romaine. Une carte de la France protestante opposerait en gros l'est et le nord du pays aux régions de l'Ouest et du Midi. Dans le Nord, en Picardie, peu de chose, mais dans la région de Paris, avant les exclusions officielles, des groupes importants, Meaux restant un centre de dissidence religieuse. Dans le Nord-Ouest, des progrès importants en Normandie et dans le duché d'Alençon. L'Eglise de Rouen regroupe près de 2000 personnes; à Caen, l'université est érasmienne et très libre de pensée. Dans le Maine, au Mans, il en est de même. La Bretagne est entamée par ses ports, comme Saint-Malo, du fait des échanges avec l'Angleterre et les Flandres, ainsi que Dieppe et Nantes. Vitré est un centre important. En 1559, une communauté se fonde à Rennes. Dans les régions de la Loire, la Touraine et l'Orléanais avec leurs universités, le Berry avec Bourges, sont des centres actifs. Dans l'Est, on note un moindre succès, sauf en Champagne. La Lorraine indépendante forme un bastion catholique mais, dans le Sud-Est, Lyon, ville de commerce, de banque et d'imprimerie, est au premier plan, de même que Valence. Le Massif central et l'Auvergne sont moins atteints, mis à part le Sud avec le Vivarais, et surtout le Languedoc avec Montpellier. Le Midi est ainsi gagné, de même que l'Ouest avec La Rochelle. Au total, dira Coligny à la reine mère, 2150 Eglises ou communautés, comprenant une stratification sociale très étendue. A la base, les petites gens (petits bourgeois, petits commerçants, artisans, «gens mécaniques«, laboureurs) auxquels s'est joint un petit nombre de personnes instruites (écrivains, théologiens, imprimeurs). Après 1559 se profile un double mouvement sociologique: l'entrée des notables dans l'Eglise, une partie des officiers royaux, des gens de robe, du monde des offices d'une part, et, d'autre part, l'entrée des gentilshommes qui vont trouver des chefs dans les familles qui touchent de près à la personne royale. Ils domineront l'Eglise jusqu'à la Saint-Barthélemy. Après cette date, on assistera à un nouveau phénomène: l'apparition en pleine lumière de la démocratie calviniste, guidée par ses ministres, qui prendra pied dans les villes et dans les bourgs plus encore que dans les campagnes. Le clergé sous l'Ancien Régime Une puissance dans l'Etat Jusqu'à la Révolution, le clergé est le premier des deux ordres privilégiés. En raison du respect attaché au caractère sacré de ses fonctions, son autorité est grande. Solidement structuré, hiérarchisé, discipliné, il est le corps social le mieux organisé. Partagé entre clergé «régulier«, comprenant les religieux et religieuses des abbayes et monastères, et clergé «séculier«, prélats et prêtres de paroisse, il représente moins de 200 000 personnes, mais il forme une société à part, avec son aristocratie riche, le haut clergé, composé des dignitaires ecclésiastiques, et une roture pauvre, la masse des curés et des vicaires, le bas clergé. La fortune du clergé est considérable: possédant jusqu'au cinquième du sol national, il est le plus gros propriétaire du royaume. Il est exempté d'impôts. Ses revenus, qui s'accroissent sans cesse, sont supérieurs à ceux de la noblesse. On les a évalués à 150 millions par an, au XVIIIe siècle. Son administration minutieuse lui assure un solide crédit financier. Il jouit sur ses terres de droits féodaux, entre autres celui de prélever la dîme sur les produits agricoles. Sa seule contribution aux dépenses publiques est le «don gratuit« au roi, dont il fixe le montant à son gré et qu'il fait percevoir par des agents ecclésiastiques. En 1749, Machault, ministre des Finances de Louis XV, veut instituer un impôt uniforme, le «vingtième«, sur les revenus de tous, privilégiés ou non; mais le clergé parvient à en faire suspendre la levée. Le roi nomme les évêques et les abbés. De son côté, le clergé garde ses tribunaux particuliers, les officialités. Il tient tous les cinq ans des assemblées indépendantes où il traite ses affaires courantes, nomme les agents généraux et les percepteurs de taxes. Il y discute le montant du subside au roi et y rédige les voeux et doléances qu'il adresse au souverain. L'Eglise gallicane, puissant soutien du trône, traite sur un pied de quasi-égalité avec le roi. Avec le temps, le fossé s'agrandit entre les deux classes du clergé; les évêques, choisis exclusivement dans la noblesse et jouissant de gros revenus (jusqu'à 200 000 à 400 000 livres par an), abandonnent de plus en plus leur diocèse pour mener une brillante vie de cour à Versailles. S'il existe de bonnes et riches cures qui permettent un train de bourgeois aisé à leur bénéficiaire, la plus grande partie du clergé subalterne doit se contenter de la «portion congrue« (à peu près 300 livres dans les campagnes), que les agents décimateurs rognent sur la dîme, dont la plus grosse part va au haut clergé. La rancoeur des congruistes les rapproche de leurs ouailles aussi pauvres qu'eux. En 1789, beaucoup de prêtres de campagne feront cause commune avec la révolte paysanne. La Constitution civile du clergé Une boîte de Pandore Après avoir nationalisé les biens du clergé, aboli les voeux monastiques et fermé un grand nombre de couvents, l'Assemblée constituante décida de réorganiser l'Eglise de France, sans toutefois toucher aux questions spirituelles. Cette Constitution civile du clergé, d'inspiration gallicane, élaborée par un comité, donna lieu à de longues et âpres discussions entre les députés. Malgré les objections de divers membres de la droite, elle fut votée le 12 juillet 1790. Elle transformait d'abord les circonscriptions territoriales ecclésiastiques, ramenant le nombre des évêchés de 134 à 83. Mais elle ne se bornait pas à des changements administratifs. Il était décidé que les évêques seraient désignés par les électeurs du département, les curés par ceux du district, l'investiture canonique étant donnée à l'évêque par le métropolitain, au curé par l'évêque. Interdiction expresse était faite aux prélats de demander une confirmation au pape: celui-ci recevait uniquement l'avis de D'élection. Evêques et prêtres seraient rémunérés par l'Etat, devenant ainsi de simples fonctionnaires. Face à ce projet de loi, le roi, bouleversé dans sa conscience, passa par toutes les affres de l'indécision. Finalement, il accorda sa sanction le 24 août 1790, mais en en gardant beaucoup de regrets, sinon de remords. Quelques mois plus tard, le pape Pie VI condamnait en bloc toute la Constitution civile du clergé (mars 1791). A cette date, le schisme était consommé et les passions religieuses s'ajoutaient aux passions politiques. 12 juillet 1790 La Constituante avait exigé de tous les prêtres un serment d'obéissance à la Constitution. Beaucoup le refusèrent (ou se rétractèrent après avoir connu la décision de Rome): on les appela réfractaires ou insermentés, les autres étant nommés constitutionnels ou jureurs. Au début de 1791, à peu près la moitié du bas clergé avait consenti au serment. Tous les évêques, sauf sept (dont Talleyrand), avaient refusé. Il fallut les remplacer. Talleyrand fut, au début, le seul à accepter d'investir les nouveaux évêques élus. Le 24 février 1791, il consacra les évêques de Quimper et de Soissons; puis Gobel, évêque de Paris, consacra à son tour 36 évêques. Le 29 novembre 1791, l'Assemblée législative décréta que les réfractaires seraient tenus pour suspects: les persécutions commençaient contre les catholiques fidèles à Rome. Elles allaient s'aggraver sous la Convention, sans épargner l'Eglise constitutionnelle elle-même lors de l'entreprise de déchristianisation des années 17931794. Après Thermidor, la Convention accorda la liberté du culte (21 février 1795), mais le schisme continuait. Le problème ne fut résolu qu'en 1801, par la signature du Concordat. Sainte Colette La restauratrice des clarisses Depuis le Grand Schisme (1378), l'Eglise traverse une crise qui affecte aussi les ordres religieux: de nombreux clercs sont ignorants, simoniaques, concubinaires ou, tout simplement, peu zélés; les ordres féminins connaissent une dégradation analogue. Quelques personnes pieuses entreprennent alors de réformer les principaux ordres religieux. Parmi celles-ci, sainte Colette de Corbie, qui, après une quête assez tumultueuse, se consacre à la restauration de l'ordre des Clarisses, fondé en 1212 par sainte Claire. Colette Boelle naît à Corbie, en Picardie, le 13 janvier 1381. Son père est charpentier. Orpheline à l'âge de 8 ans, elle est accueillie par les clarisses de Pont-Sainte-Maxence. Après maints déboires, elle se fait recluse dans sa ville natale (1402-1406). Pour ce faire, elle aménage une «logette« entre deux contreforts du chevet de la collégiale SaintEtienne. Ce réduit communique avec l'église par une grille au travers de laquelle la recluse suit les offices. Durant ces années de réclusion, Colette Boelle est favorisée de plusieurs visions: saint François d'Assise, qui créa l'ordre des Pauvres dames, lui apparaît et lui confie la mission de réformer l'ordre des Clarisses. Elle abandonne sa vie de recluse et entre chez ces dernières. En 1406, Benoît XIII, pape illégitime d'Avignon, la nomme abbesse et la charge de rénover les trois ordres fran- 1381-1447 ciscains. Après plusieurs échecs à Péronne, à Rumilly en Savoie, Colette fonde le monastère de Besançon où la règle de sainte Claire est strictement observée. Sa réforme est ensuite adoptée par de nombreux couvents. En 1415, elle fonde le couvent des clarisses de Poligny, dans le Jura; elle en dirige ensuite d'autres, dont celui du Puy. Elle meurt le 6 mars 1447, chez les clarisses de Gand. Sa dépouille est transportée au couvent de Poligny où ses reliques sont conservées dans la chapelle située derrière la collégiale Saint-Hippolyte. En effet, la grande réformatrice a été canonisée en 1807, et sa fête a lieu le 6 mars. En 1959, une chapelle dédiée à sainte Colette a été inaugurée sur l'ancien emplacement de sa maison; 36 rue Faidherbe, à Corbie. Les visiteurs peuvent y contempler une statue de la réformatrice agenouillée, datant du XVIe siècle. Sainte Colette, qui consacra sa vie à la restauration de son ordre et au développement de l'esprit de l'observance, est une des grandes figures féminines du , XVe siècle, digne de figurer aux côtés de Jeanne d'Arc et de Christine de Pisan. Le Val-de-Grâce Le refuge d'Anne d'Autriche Un monastère de femmes existait depuis le XII` sièci près de Bièvres (Essonne), au Val-Protond. Devenu le Val-de-Grâce au XVe siècle, sous le patronage d'Anne de Bretagne, le couvent doit à la faveur d'Anne d'Autriche d'être transféré, en 1621, au faubourg Saint-Jacques de Paris, dans l'ancien hôtel du Petit-Bourbon que la reine a acheté 36000 livres. Dans les constructions nouvelles, la souveraine se rései ve un appartement où elle réside de plus ee plus fréquemment durant les vingt années où. Louis XIII s'écartant d'elle, sa situation à la cour se dégrade. Au Val-de-Grâce, la reine peut entretenir, hors de tout contrôle, une correspondance avec son amie, Mme de Chevreuse, comploteuse impénitente, et avec son frère, le roi d'Espagne Philippe IV. Ses missives sont transmises par son portemanteau La Porte à un résident anglais, Augier, qui les fait parvenir, à Bruxelles, au marquis de Mirabel, ancien ambassadeur d'Espagne à Paris. Ce qu'on a appelé l'«affaire du Val-de-Grâce«, ou la «trahison de la reine«, éclate en 1637: la France est en guerre avec l'Espagne depuis 1635; toute nouvelle venant de Paris peut être utilisée par l'ennemi. Anne d'Autriche, qui, depuis la conspiration de Chalais, est soupçonnée en permanence, est poursuivie par les espions de Richelieu. La Porte, chargé de l'une de ses missives secrètes, est arrêté. Embastillé, il résiste aux patients interrogatoires du cardinal. De son côté, le roi ordonne une perquisition chez les bénédictines du Val-de-Grâce 1621 où la eine va un peu trop souvent et qui semble bien être le centre de l'espionnage espagnol. Le chancelier Séguier, assisté de l'archevêque de Paris, interroge vainement la supérieure, Mère SaintEtienne. On se contente de la reléguer dans un couvent de La Charité-sur-Loire et de faire élire à sa place la soeur Pontchâteau, une nièce de Richelieu. La reine, exilée à Chantilly par ordre du roi, doit subir les interrogatoires de Chavigny; Séguier menace de la fouiller. Après sa confession repentante au cardinal, celui-ci s'emploie à obtenir pour elle le pardon de Louis XIII. Un an plus tard (1638) naît le futur Louis XIV. Par gratitude, Anne d'Autriche commande à François Mansart les plans d'une magnifique chapelle pour son cher Val-de-Grâce. La première pierre en est posée en 1645 par Louis XIV, âgé de 7 ans. Les travaux, poursuivis par Lemercier, Le Muet et Le Duc, sont achevés en 1665. L'église (qui ne sera consacrée qu'en 1710) est de proportions et de style grandioses. A l'imitation de Saint-Pierre de Rome, elle est surmontée d'un dôme. A l'intérieur de la coupole, Mignard a peint une immense fresque, La Gloire du Val-de-Grâce, que Molière a célébrée en vers. L'église de Brou «Une enclave flamande en terre de France« 1504 Située un peu en dehors de la ville de Bourg dans l'Ain, l'église de Brou est élevée entre 1504 et 1530 sur l'ordre de la duchesse de Savoie, Marguerite, fille de l'empereur Maximilien et de Marie de Bourgogne, pour répondre à un voeu fait par sa belle-mère Marguerite de Bourbon. L'architecte choisi est Jean Perreal qui en donne les dessins, mais qui, tombé en disgrâce, est remplacé par le Flamand Van Bodeghem; ce dernier édifie l'église, construite dans un style gothique flamboyant, très orné, et où se reconnaissent les premières influences de la Renaissance italienne. Elle comporte un vaste vaisseau à trois nefs de 69 m de longueur sous oeuvre, de 34 m de largeur et de 21 m de hauteur sous voûte, nefs fort larges mais de proportions harmonieuses. Le portail est Renaissance, recouvert d'une somptueuse ornementation, avec les statues de saint Nicolas de Tolentino et de saint André et, devant le portail, le cadran solaire horizontal restauré par Lalande. A l'intérieur, on remarque le jubé, de 12 m de large et de 8 m de haut, décoré, à la balustrade, de sept grandes statues de marbre blanc et fouillé à jour comme une dentelle. De chaque côté s'alignent 74 stalles de chêne, dues à un maître menuisier de Bourg, Pierre Terrasson, sculptées jusqu'au-dessous des sièges. Laissant passer la lumière, les vitraux du choeur et de la chapelle rappellent les principales phases de la vie de la Vierge; ils reprennent le thème des sept douleurs, thème de dévotion du XVe siècle; la Vierge, entourée de sept médaillons, est percée d'une seule épée. Les vitraux, exécutés sur des cartons flamands, reprennent également le thème du triomphe de Jésus-Christ. L'église abrite les tombeaux de Philibert le Beau, de sa femme Marguerite d'Autriche et de sa mère Marguerite de Bourbon. Michel Colombe, artisan du tombeau de François II, duc de Bretagne, a été sollicité, mais les pourparlers n'ont pas abouti. C'est donc Jean de Bruxelles, dit aussi Jan Van Room, qui a donné les dessins. Les deux premiers tombeaux sont à deux étages et, sous le gisant, on aperçoit la reproduction du cadavre; on dit ces sépulcres «modernes«, pour les opposer au tombeau de Marguerite de Bourbon, conçu selon la vieille tradition, qui montre simplement une statue couchée sur un sarcophage. Parmi les statuettes, notons la statue de sainte Catherine, exécutée par un atelier flamand travaillant sous la direction de Conrad Meit, de Worms. Au total, une oeuvre admirable de puissance et de délicatesse, qui, transformée en magasin à fourrage, fut épargnée par la Révolution. L'Eglise dans la féodalité Une institution fondamentale IXe-XIIIe siècle Eglise et féodalité se mêlent étroitement tout au long du Moyen Age pour de multiples raisons: les cadres supérieurs du clergé, évêques et abbés, sont le plus souvent d'origine aristocratique et vivent à la façon des nobles. De plus, les propriétés foncières, dont l'Eglise tire l'essentiel de ses ressources, sont organisées comme des seigneuries laïques. Enfin, du fait de donations pieuses, l'Eglise touche souvent des droits seigneuriaux ou banaux tels que les péages, les tailles ou les revenus de la monnaie. Les souverains favorisent cette situation qui leur permet, sauf en période de faiblesse monarchique, de mieux contrôler l'Eglise, institution particulièrement influente. Dans la société médiévale, noblesse et haut clergé forment donc les deux classes dominantes. Au Xe et au XIe siècle, l'Eglise connaît une crise qui l'assujettit presque entièrement à l'aristocratie. Celle-ci considère les dignités et les biens ecclésiastiques comme son propre patrimoine: ainsi, les comtes confient souvent l'épiscopat à l'un de leurs frères. En droit féodal, les religieux ne se différencient des laïques que par leur droit à ne pas comparaître personnellement devant la justice profane; ils se font représenter par un procureur: l'avoué est celui d'un monastère; le vidame, celui d'une église séculière. Mais, grâce à la réforme grégorienne, l'Eglise recouvre en partie son indépendance. Entre 1150 et 1250, elle réussit à s'imposer non seulement à l'aristocratie, mais encore aux souverains. La mentalité et les structures politicosociales de l'époque n'en déteignent pas moins sur elle: avoueries et vidamies sont à leur tour féodalisées, c'est-à-dire gratifiées de fiefs, et leurs titulaires prennent place dans la hiérarchie nobiliaire; dans certaines régions, les évêques exigent de leurs subordonnés une sorte d'hommage. Ces influences apparaissent encore (le nos jours dans certains gestes — celui des mains jointes dans la prière est emprunté au cérémonial de l'hommage -- et dans le vocabulaire, comme par exemple les termes «Notre-Seigneur« ou «Notre-Dame«. De même, le salut est présenté comme le résultat d'une sorte de tournoi entre le bien et le mal. Mais l'Eglise agit aussi sur la féodalité en réprimant la brutalité excessive de ce régime social à vocation guerrière. Par la «paix de Dieu« et la «trêve de Dieu«, elle diminue l'insécurité. Elle favorise de temps à autre des contre-pouvoirs, comme certains aspects du mouvement communal aux XI' et XIIe siècles. Elle soutient toujours l'autorité royale qui lui paraît la meilleure garantie d'harmonie sociale. Elle cherche surtout à modifier la mentalité de l'aristocratie féodale par l'institution de la chevalerie. L'adoubement, purement laïque à l'origine, devient, au XII' siècle, une sorte de sacrement qui marque l'entrée dans la noblesse: une fois armé, le chevalier doit respecter un code d'honneur et «protéger la veuve et l'orphelin«. Henri Lacordaire Une conversion fructueuse En dépit d'une éducation catholique, Henri Lacordaire affiche de bonne heure des conceptions voltairiennes. Tandis qu'il poursuit des études de droit à Dijon, il se signale par de virulentes attaques contre la religion. En 1823, il est avocat stagiaire à Paris. C'est, rapporte-t-on, à la lecture du Génie du christianisme que cette âme tourmentée recouvre la foi. En 1824, il entre au séminaire; il est ordonné prêtre trois ans plus tard. Nommé aumônier de diverses institutions parisiennes, il se sent plutôt une vocation de missionnaire et se dispose à partir pour le Nouveau Monde. Une rencontre avec l'abbé Lamennais, qu'il admire, et la révolution de 1830 bouleversent ces projets. Lacordaire devient l'un des plus brillants collaborateurs du journal L'Avenir que Lamennais fonde en octobre 1830. Cette feuille veut réconcilier l'Eglise avec la démocratie et le monde moderne. Elle mène campagne en faveur de la liberté religieuse, de la liberté de l'enseignement, de la séparation de l'Eglise et de l'Etat, du principe des nationalités. La véhémence de ses propos conduit Lacordaire en Cour d'assises; il plaide lui-même et est acquitté. Peu après, le prêtre a de nouveau maille à partir avec la justice pour avoir ouvert une école libre à Paris avec Montalembert et Coux. Ces procès suscitent une émotion considérable. Cependant, les thèses de L'Avenir inquiètent la hiérarchie catholique et l'épiscopat suspend le journal. Lamennais, Lacordaire et Montalembert se rendent devant le pape pour se 1802-1861 justifier. Lacordaire se soumet à la condamnation du souverain pontife et rompt avec Lamennais dont il combattra désormais les conceptions. Lacordaire se consacre maintenant à la prédication. Sa liberté de ton et ses accents romantiques captivent un auditoire qui ne cesse de s'élargir, mais alarment ses supérieurs. En 1836, le prêtre va chercher l'appui du pape et il forme le projet de rétablir en France l'ordre des Frères prêcheurs ou Dominicains. En 1839, Lacordaire prend l'habit des dominicains, sous le nom de frère Dominique. Il poursuit ses conférences et restaure plusieurs couvents dominicains français. La révolution de 1848 l'enthousiasme quelque temps. Il fonde le journal L'Ere nouvelle. Elu député des Bouches-du-Rhône, il siège à la gauche de la Chambre, mais quitte rapidement la scène politique. Après le coup d'Etat de Louis-Napoléon, il s'écarte de la vie publique et s'emploie à reconstruire la province dominicaine, tout en dirigeant le collège de l'ordre à Sorèze, dans le Tarn, où il s'éteint en 1861. Lacordaire a aussi sa place dans l'histoire littéraire grâce à ses dons de prédicateur; c'est un peu le Bossuet du romantisme. Les libertins Les débuts de la libre pensée En 1545, Calvin englobe sous le vocable de «libertins« tous les indépendants en matière religieuse et morale. Il les traite de matérialistes, d'athées et d'hérétiques. Les libertins sont les «douteurs« du XVIe siècle, tel Montaigne, ou les «incrédules« du XVIIe siècle contre lesquels tonnent le protestant d'Aubigné et les catholiques Bossuet et Bourdaloue. Le Don Juan de Molière, libertin exemplaire, se signale par son irréligion: «Je le soupçonne encor d'être un peu libertin, Je ne remarque pas qu'il hante les églises.« Dans la génération de 1620, le «libertinage« est l'attitude insolente des jeunes aristocrates qui bâillent aux sermons, se moquent du carême et préfèrent la cour facile de Gaston d'Orléans à celle de son morne frère, Louis XIII. Ils se retrouvent au Marais, dans le salon de Ninon de Lenclos, avec les «esprits forts« du moment, les nouveaux philosophes et poètes. Ils ont pour animateur Théophile de Viau. Ce dernier prône la liberté poétique, l'indépendance des idées, le droit au bonheur; d'autres poètes et romanciers l'accompagnent ou le suivront: Saint-Amant, Jacques des Barreaux, Guez de Balzac, Cyrano de Bergerac, le voyageur Bernier, le philosophe Gassendi, Vauquelin des Yveteaux, Mme Deshoulières et, plus tard encore, l'abbé de Chaulieu, SaintEvremond, Fontenelle. Le libertinage est une mentalité plus qu'une doctrine. Mais au début du XVII` siècle, ce courant, en tant que XVIIe-XVIIIe siècle mouvement intellectuel, est assez fort et provocant pour que le pouvoir de Richelieu cherche à l'enrayer: contre ces «Messieurs du Marais«, le cardinal fonde, en 1635, un salon concurrent, l'Académie française. Pour neutraliser les tenants de la pensée libre, il leur offre des honneurs. Mais les vrais libertins sont des anticonformistes; leur morale condamne richesse et ambition, préconise la culture de l'individu en vue de son équilibre et de son harmonie. Ils se veulent affranchis au nom de la raison. Leurs successeurs sont les philosophes des lumières du XVIIIe siècle, Rousseau, Voltaire, Diderot, les encyclopédistes, les «libres penseurs« du XIXe siècle, les agnostiques du XX` siècle: tous ces gens qui font profession de libéralisme. Ajoutons que, sous la Régence, l'irréligion s'associe à la licence des moeurs; libertinage devient synonyme d'épicurisme, de frivolité et de fantaisie sans limites; il a pour archétype le «petit-maître«, le «roué«, dont des auteurs, comme Crébillon fils, l'abbé Prévost, Choderlos de Laclos, ont tracé le portrait, recevant eux-mêmes l'épithète de romanciers libertins. En définissant l'homme à bonnes fortunes, polisson, débauché, cynique, amoral, le terme prend le sens péjoratif qu'il a aujourd'hui. Charles de Guise, cardinal de Lorraine Un prélat ardent et belliqueux 1524-1574 Né à Joinville le 17 février 1524, second fils de Claude, premier duc de Guise, Charles appartient à une famille qui jouera un rôle dominant dans les guerres de religion. Après des études rapides et brillantes, il est promu archevêque de Reims dès l'âge de 15 ans. Il procède au sacre d'Henri II dont il flatte l'amour pour Diane de Poitiers. Héritant de son oncle Jean de Lorraine, il devient abbé de Saint-Denis, de Cluny, de Marmoutier, de Fécamp. Ses domaines lui rapportent environ 300000 livres; il participe ainsi à la puissance de la maison de Lorraine que l'avènement de François II porte au premier rang. Il domine les affaires quand le nouveau roi est sacré à Reims le 18 septembre 1559. Au Conseil, si son frère François, le conquérant de Calais, a le verbe tranchant, le cardinal a le verbe encore plus haut: tous deux, sans l'affirmer ouvertement, prétendent descendre de Charlemagne. Chef de l'Eglise de France, Charles participe à la réorganisation issue de la paix de Cateau-Cambrésis qu'il a négociée. On lui doit notamment l'annulation des aliénations royales, le licenciement des troupes, la présentation de trois sujets instruits pour la nomination aux places de judicature. Il se montre aussi protecteur des lettres et des arts: il fonde l'université de Reims, contribue à fonder celle de Pont-à-Mousson et établit des séminaires dans son diocèse. Il se montre ennemi acharné des nouvelles doctrines qui s'introduisent dans le royaume. S'il provoque le colloque de Poissy (1561), c'est pour y amener la rupture plus que pour y tenter la conciliation. Il s'oppose à toutes les mesures de tolérance civile vers lesquelles s'oriente la reine mère, soutenue par Michel de L'Hospital. Il tente d'introduire l'Inquisition en France, participe, dans son diocèse, à l'oeuvre militante de la Contre-Réforme. Ses relations avec Rome sont contrastées: d'une part, il est l'ardent défenseur des libertés gallicanes; d'autre part, il se rallie à Pie IV malgré les instructions de la reine mère. Il a été gagné par la diplomatie de Morone et comblé de faveurs pontificales; en l'absence des ambassadeurs français partis pour Venise, il donne son accord aux décrets du concile de Trente que, le 26 janvier 1564, le pape ratifie par la bulle Benedictus Deus et Pater. C'est en sortant d'une procession, qu'il a suivie pieds nus, que le cardinal de Lorraine meurt, le 26 décembre 1574. L'HISTOIRE VIVANTE Voir Charles, cardinal de Lorraine, huile sur toile, anonyme rémois d'après Georges Boba, au musée des Beaux-Arts de Reims. Le Concordat Par gain de paix... «Comment avoir de l'ordre dans un Etat sans religion?« s'exclama un jour le Premier consul devant Rcederer. Et il répétait à ses proches: «Il faut une religion pour le peuple.« Au début du Consulat, le schisme occasionné par la Constitution civile du clergé pesait toujours lourdement sur l'Eglise de France. Il fallait mettre fin à cette douloureuse anarchie. Au lendemain de Marengo, Bonaparte avait fait dire à Pie VII son désir de voir rétablir la paix religieuse. Sur sa demande, le pape envoya de Rome des théologiens pour discuter des bases d'un accord, mais les négociations furent longues et difficiles. Certains points étaient particulièrement délicats: le catholicisme redeviendrait-il une «religion d'Etat«? que ferait-on des anciens évêques jureurs, et des non jureurs (ceux-ci généralement groupés autour de Louis XVIII)? rendrait-on à l'Eglise ses biens vendus comme biens nationaux? La rédaction du Concordat ne demanda pas moins de vingt et une versions successives. Voyant les discussions s'éterniser, le pape fit partir pour Paris le cardinal Consalvi, qui prit ses décisions. Les articles furent signés le 26 messidor an IX (15 juillet 1801). Le gouvernement consulaire reconnaissait le catholicisme comme la religion de «la grande majorité des Français«. Pie VII demanderait la démission de tout l'ancien corps épiscopal de France. Les nouveaux évêques, nommés par le Premier consul, recevraient du pape l'investiture canonique, ils prêteraient serment de fidélité au gouvernement et nommeraient aux cures des prêtres «agréés par 1801-1802 le gouvernement«. Les prêtres mariés pendant la Révolution pourraient recevoir une absolution du Saint-Siège. Le gouvernement assumerait la charge du traitement du clergé, mais la vente des biens ecclésiastiques était déclarée irrévocable. Malgré l'irritation marquée par les anciens Jacobins hostiles au catholicisme, le Concordat devint loi d'Etat le jour de Pâques, 18 avril 1802. Sans consulter le pape, Bonaparte y avait adjoint des «Articles organiques« rétablissant en France une sorte de gallicanisme. Ces articles spécifiaient qu'aucune bulle pontificale, qu'aucun bref n'arriverait de Rome sans l'autorisation du gouvernement. Les évêques français étaient étroitement placés sous la dépendance de l'Etat. Le catéchisme, la liturgie, la publication du prône devraient recevoir l'approbation des autorités civiles. L'enseignement de la «Déclaration des Quatre Articles« de 1682 était imposé dans les séminaires. Le clergé devenait, en fait, un corps de fonctionnaires dépendant étroitement du mi.listre des Cultes. Pie VII protesta, mais en vain, contre les Articles organiques. Malgré tout, le Concordat, en mettant fm au schisme, apporta de grands bienfaits aux catholiques de France. Les ordres religieux XIe - XVe siècles militaires Les ordres religieux militaires furent une des créations les plus originales du Moyen Age. A une époque où se conjuguaient l' idéal chevaleresque et le mouvement de croisade, les Hospitaliers de Saint-Jean et les Templiers firent parfaitement concilier la discipline du cloître et celle des armes. Une création du XIe siècle Au XI' siècle apparut un nouveau mode de vie religieuse. Ce sont les ordres religieux militaires qui allièrent les trois éléments essentiels de la mentalité du temps : prestige de la chevalerie, goût de la profession monastique, attrait de la Terre Sainte. Deux d'entre eux se sont implantés en France : les Hospitaliers de Saint-Jean de Jérusalem et les Templiers. En 1050, des chevaliers ont fondé à Jérusalem l'hôpital Saint-Jean pour héberger les pèlerins pauvres et malades. Un siècle plus tard, les Hospitaliers s'étaient transformés en un ordre essentiellement militaire. L'ordre des Templiers, militaire dès l'origine, a été créé en 1119 par Hugues de Payens pour assurer la protection des pèlerins en Terre Sainte. Saint Bernard prit cet ordre sous sa protection et rédigea sa règle. Baudouin, roi de Jérusalem, donna aux Templiers une résidence dans son palais, construit à l'emplacement du temple de Salomon, d'où leur nom. Des ordres structurés et puissants Hospitaliers et Templiers constituaient des ordres très centralisés ayant à leur tête un grand maître au pouvoir absolu. Dans ces deux ordres, on distinguait les cheva- liers, armés et combattant, les frères servants, chargés des tâches hospitalières et domestiques, et les frères ecclésiastiques qui remplissaient les fonctions apostoliques. Au XII siècle, le Temple et les Hospitaliers se développèrent rapidement et, favorisés par de grandes donations, acquérirent de grandes richesses. Divisés en provinces, puis en prieurés et commanderies, ils couvrirent l'Europe et le Levant de leurs maisons. Ils jouèrent un rôle militaire important en Terre Sainte où ils constituaient un corps d'élite, "les gendarmes de la Chrétienté". Après la chute des États Francs de Terre Sainte (prise de Saint-Jean d'Acre en 1291), les Hospitaliers se replièrent à Rhodes et le Temple devint le banquier de l'Occident. Cette fortune, excitant la convoitise de Philippe le Bel, causa sa perte. L'évêque de Saint-Jean d'Acre raconte l'origine des Templiers "Des chevaliers... s'astreignirent par une profession de foi et des voeux solennels, à défendre les pèlerins contre les brigands et les hommes de sang, à protéger les routes publiques, à combattre pour le Souverain Roi, en vivant comme des chanoines réguliers dans l'obéissance, dans la chasteté et sans propriété." Saint René 1607 - 1646 Missionnaire en Nouvelle-France, René Goupil fait partie, avec sept autres jésuites, des "martyrs canadiens"; avec eux, il fut en effet exécuté par des Iroquois, qui luttaient plus pour leur liberté que contre l'évangélisation. Le barbier missionnaire Il y eut d'abord un saint René, patron de René d'Anjou (1409 - 1480); il fut vraisemblablement évêque d'Angers, mais sa vie est en grande partie légendaire. C'est en son honneur que René Goupil reçut son prénom. Après avoir fait un essai au noviciat des jésuites, qu'il ne put poursuivre pour des raisons de santé, il apprit le métier de barbier; il était donc également chirurgien, capable de faire une saignée et des pansements. Désireux de participer à l'oeuvre d'évangélisation des missionnaires, il décida de partir pour la Nouvelle-France, c'est-à-dire le Canada. Le martyre René Goupil se joignit donc aux jésuites et se retrouva, vers 1640, en train de remonter le Saint-Laurent, en direction des territoires iroquois. Les Hurons avaient déjà été "contactés", notamment par Jean-deBrébeuf, qui fut un des premiers jésuites arrivés au Canada, encouragé en cela par Champlain. Le colonialisme blanc avait réussi à faire s'affronter les Hurons et les Iroquois pour des questions de commerce de fourrure. Ceux-ci avaient donc toutes les raisons de s'opposer à l'Évangile. Ils attaquèrent le convoi des missionnaires de René Goupil, les firent prisonnier, leur firent subir des tortures et les distribuèrent à des villages où ils servirent comme domestiques. C'est dans cette condition, dit-on, que René Goupil fut surpris à faire le signe de croix sur le front d'un enfant et qu'il fut tué, comme plusieurs de ses compagnons. Ce massacre ne fut toutefois pas inutile, puisqu'il émut les Hurons qui se mirent à accepter en masse la conversion. René Goupil, qui était frère de la Compagnie de Jésus, fait donc partie des "martyrs canadiens", qui furent canonisés en 1931 et comprennent par ailleurs : Antoine Daniel, Charles Garnier, Gabriel Lalemant, Jean-de-Brébeuf, Jean-de-LaLande, Isaac Jogues et Noël Chabanel. Ils sont fêtés ensemble le 19 octobre. Repères chronologiques 1534: premier voyage de Jacques Cartier, qui prend possession du Canada au nom du roi de France 1608 : Champlain fonde Québec 1615 : les premiers missionnaires, des récollets, arrivent chez les Hurons 1625 : arrivée des premiers jésuites 1639 : arrivée à Québec des soeurs hospitalières et des ursulines - 1648 1650 : guerre entre les Iroquois et les Hurons, qui sont victimes de massacres. La Sainte-Chapelle Un discret joyau 1243 La Sainte-Chapelle de Paris est l'un des chefs-d'oeuvre de l'art gothique. En 1239 et en 1241, Saint Louis acquiert de l'empereur d'Orient certaines reliques de la passion du Christ conservées à Constantinople, en particulier la couronne d'épines et un grand morceau de la croix. Pour les abriter dignement, le roi décide d'élever dans son palais une nouvelle chapelle. Les travaux sont confiés à Pierre de Montreuil, auquel on doit aussi la nef de Saint-Denis; ils sont rapidement menés puisque la chapelle, commencée en 1243, est consacrée en 1248. Elle est longue de 36 m, large de 17, et sa flèche s'élève à 75 m au-dessus du sol; sa double destination, comme chapelle palatine et comme reliquaire, en explique la structure et la décoration. Comme toutes les chapelles palatines, l'édifice comporte deux étages: le second, dit «chapelle haute«, est destiné au prince et à ses proches; la nef y culmine à 20,50 m au-dessus du sol. Le rez-de-chaussée, dit «chapelle basse«, est réservé au personnel et comporte une nef, également unique, haute de 6,60 m. Un porche à deux étages dessert les deux niveaux. Pour rendre les reliques bien visibles, l'architecte éclaire au maximum l'intérieur de la chapelle haute; il accentue donc l'évidement et la légèreté qui caractérisent déjà les édifices religieux parisiens. On arrive ainsi à une rayonnante châsse de verre où, de part et d'autre d'une nef unique, quinze longues fenêtres s'ouvrent entre les fines colonnes soutenant la retombée des voûtes. La maçonnerie se borne à encadrer des verrières qui constituent l'essentiel de la construction. L'architecture vaut surtout par son équilibre, sa finesse et sa sobriété. La sculpture, malgré sa haute qualité, se remarque peu; pourtant, les statues placées à mi-hauteur, le long des piliers dont elles sont complètement indépendantes, présentent des drapés fort élégants. Voûtes et murs sont recouverts de peintures, très largement restaurées, qui accentuent le caractère précieux de l'ensemble. Les vitraux sont particulièrement remarquables. Dans un décor géométrique, où la simplicité le dispute à une technique élaborée, se succèdent de multiples panneaux de petite taille, aux couleurs vives, souvent très proches des enluminures des manuscrits. Les dimensions restreintes de l'édifice imposent au verrier un style raffiné, bien différent du style monumental des cathédrales. La plupart des scènes reprennent les épisodes de la Bible annonçant la vie et la passion du Christ. La Sainte-Chapelle servira de modèle pour de nombreux édifices français et étrangers; elle contribuera ainsi à la diffusion et à l'évolution de l'art gothique. Profanée en 1791, elle a été restaurée grâce aux architectes Duban, Lassus et Viollet-le-Duc. La Sainte-Chapelle Un discret joyau 1243 La Sainte-Chapelle de Paris est l'un des chefs-d'oeuvre de l'art gothique. En 1239 et en 1241, Saint Louis acquiert de l'empereur d'Orient certaines reliques de la passion du Christ conservées à Constantinople, en particulier la couronne d'épines et un grand morceau de la croix. Pour les abriter dignement, le roi décide d'élever dans son palais une nouvelle chapelle. Les travaux sont confiés à Pierre de Montreuil, auquel on doit aussi la nef de Saint-Denis; ils sont rapidement menés puisque la chapelle, commencée en 1243, est consacrée en 1248. Elle est longue de 36 m, large de 17, et sa flèche s'élève à 75 m au-dessus du sol; sa double destination, comme chapelle palatine et comme reliquaire, en explique la structure et la décoration. Comme toutes les chapelles palatines, l'édifice comporte deux étages: le second, dit «chapelle haute«, est destiné au prince et à ses proches; la nef y culmine à 20,50 m au-dessus du sol. Le rez-de-chaussée, dit «chapelle basse«, est réservé au personnel et comporte une nef, également unique, haute de 6,60 m. Un porche à deux étages dessert les deux niveaux. Pour rendre les reliques bien visibles, l'architecte éclaire au maximum l'intérieur de la chapelle haute; il accentue donc l'évidement et la légèreté qui caractérisent déjà les édifices religieux parisiens. On arrive ainsi à une rayonnante châsse de verre où,...
apollinaire

« La fermeture de Port-Royal La destruction du foyer du jansénisme 29 octobre 1709 Après la «paix de l'Eglise» en 1669, la doctrine de Jansénius est, sinon tolérée, du moins «oubliée» pour un certain temps.

La vieille querelle gallicane, qui oppose la monarchie française à la papauté, occupe alors le devant de la politique religieuse de Louis XIV.

Les jansénistes vont connaître une dizaine d'années de répit.

Les ouvrages de Pas­ cal, des Arnauld, de Nicole, de Lance­ lot, ont des lecteurs jusqu'à la cour.

La traduction française de la Bible par Lemaistre de Sacy, directeur spirituel des religieuses du monastère de Port­ Royal des Champs, connaît un grand succès.

Les «solitaires» sont revenus s'installer aux Granges, près du cou­ vent, et ont rouvert leurs Petites Ecoles.

Port-Royal redevient le foyer actif du jansénisme, centre intellectuel et mon­ dain, fréquenté par des sympathisants de la haute société, allié du libéralisme parlementaire.

Louis XIV s'en inquiète et s'en irrite.

Sous la pression de ses confesseurs jé-­ suites et de Mme de Maintenon, il prend, en 1679, de nouvelles mesures contre Port-Royal, comme l'interdiction au couvent de recevoir des novices.

Le Grand Arnauld, menacé, doit s'exiler en Belgique.

Son successeur est un orato­ rien, Pasquier Quesnel.

L'ouvrage qu'il soutient en Sorbonne, en 1701, Un Cas de conscience, ranime la discussion autour des «Cinq Propositions» attri­ buées à Jansénius et considérées comme hérétiques.

La communauté de Port-Royal refuse toujours de signer le «formulaire» qui condamne les «Cinq Propositions».

Ce refus tenace autorise le retour des persé­ cutions.

En 1706, les religieuses sont privées du droit de recevoir les sacre­ ments.

Puis l'abolition de Port-Royal des Champs est décrétée par un arrêt du 9 février 1707, précédant la bulle papale du 11 mars 1708 qui supprime définiti­ vement l'abbaye des Champs.

Le 11 juillet 1709, le cardinal de Noailles, archevêque de Paris, signe l'ordre d'extinction du couvent.

Le 29 octobre, le lieutenant de police d'Argenson vient signifier aux 22 religieuses qui restent de lui livrer leurs archives, avant d'être dispersées dans des communautés hors du diocèse de Paris.

Il leur donne un quart d'heure pour faire leurs prépara­ tifs et leurs adieux.

En 1710, par un nouvel arrêt royal, tous les bâtiments de Port-Royal des Champs seront rasés.

En 1713 ne res­ tent que les murs de clôture.

Les corps des défunts jansénistes sont alors exhu­ més et ensevelis dans d'autres cimetiè­ res.

L'HISTOIRE VIVANTE Visiter Port-Royal des Champs, près de Che­ vreuse.

Voir la gouache de Madeleine de Boullongne: Chapitre tenu par les religieuses de Port­ Royal des Champs, au musée de Versailles.. »

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