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Le silence ne dit-il rien ?

Publié le 07/01/2004

Extrait du document

Psychanalyse freudienne et langage." Ca parle là où ça souffre": cet aphorisme de Jacques Lacan souligne la liaison étroite entre le langage et la psychanalyse. Lapsus, rêves, cure, tout se joue autour de la question du langage et de sa signification.La révolution psychanalytique part d'une constatation dont toute l'oeuvre de Freud s'efforce d'administrer la preuve en étendant ses recherches depuis le comportement du sujet individuel jusqu'aux manifestations culturelles de l'humanité (art, religion, guerre, morale); l'homme n'est pas le centre de lui-même. Il y a en lui un autre sujet que le sujet conscient de la psychologie traditionnelle dont les racines sont à trouver du côté de la sexualité: l'inconscient.La découverte freudienne n'est dont pas une recherche de type biologique ou physiologique, encore moins une apologie des instincts, et le psychanalyste n'est pas tant à comparer à un explorateur de fonds inconnus qu'à un linguiste tentant de déchiffrer des réseaux de signes et d'en interpréter le sens. Ce qui a été "refoulé" continue de fonctionner en dehors du sujet, et le nouveau sujet de cet "en dehors" est strictement ce qu'on nomme inconscient. Une vérité, une conduite refoulée s'expriment ailleurs, dans un autre registre, en langage chiffré et clandestin. Sous la voix claire de notre conscience, murmure ou quelque fois crie une autre voix, celle d'une histoire très ancienne, celle de notre passé individuel et plus généralement de notre culture qui nous conte des récits faits d'inceste, de meurtre et de parricide.Freud, nous donne donc à comprendre que l'homme est indissociablement un être de désir et un être de langage et que le premier a besoin du second pour se dire ou pour se cacher.

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·         Eléments de définition

 

Silence =

1-      Absence de tout bruit, et mais surtout absence de parole ; le silence est donc aussi l’absence de sens. « Le silence infernal des espaces infinis «, Pascal.

2-      Abstention délibérée et volontaire de parole. Le silence n’est plus alors l’absence de sens, il est au contraire très significatif (ex. : qui ne dit mot consent) ; il peut même être, au sein des plus grandes controverses, le moyen le plus ferme de se faire entendre (ex : « le bruit que fait votre silence «, Montherlant, Le maître de Santiago)

3-      Aboutissement ou dépassement du discours. Le silence peut être infra discursif, c’est le silence de la brute, il peut être aussi le silence du sage dans la présence et peut apparaître comme l’horizon de la philosophie pourtant toujours nécessairement discursive. Weil, La logique de la philosophie.

→ Dire = Faculté de s’exprimer à l’aide d’un système de sons articulés, ou le fait même de cette expression. Exécution individuelle de l’acte linguistique, elle est fonction du sujet parlant, tandis que la langue est un système n’existant que de façon sociale.

·         Angles d’analyse

→ Nous vivons dans un monde où la verbalisation est la règle et le  silence l’exception. Nous vivons au milieu d’un torrent de mots ; si bien que la valeur du silence nous échappe le plus souvent ; et pourtant, il est difficile de séparer le silence et la parole, le silence et l'intention de signification. Sans un espace entre les mots, les mots eux-mêmes seraient-ils compréhensibles ?

→ Nous ne savons plus au fond ce que représente la parole, ni ce que signifie le silence. Pourtant, nous sentons aussi que nous avons besoin du silence. La Parole et le silence sont étroitement liés. N’est-ce pas parce qu’à sa manière le silence signifie à travers les mots autant que les mots signifient eux-mêmes ? Ou bien, faut-il admettre que le silence est seulement une impuissance ou une impasse dont le langage nous libère. Le silence ne dit-il rien ?

→ On ne peut en réalité comprendre la question qu’en tant qu’on la rapporte au langage conçu/perçu comme l’instrument de communication grâce auquel les individus créent des liens, etc. Or, il s’agit ici de s’interroger sur la valeur du silence lui-même. Il s’agit de déterminer si le silence n’est que la marque d’une impuissance à exprimer, voire à penser, ou si au contraire il « dit « parfois bien plus que de simples bavardages. Il s’agit donc de savoir si le silence peut être moteur de pensées, d’actions inédites, réfléchies.

Problématique

Est-il légitime d’affirmer que le silence peut-être, en lui-même et pour lui-même, signifiant, c’est-à-dire créateur de signification ? Le silence n’est-il pas vide de sens et de signification, et donc par là même totalement infécond ? C’est donc non seulement la fonction du silence mais aussi sa nature qui sont ici mises à la question. En quel sens affirmer que le silence est chargé de signification ? Et que dit-il et à quel niveau le dit-il si effectivement il signifie ? N’est-il pas plutôt le déclencheur par l’intermédiaire duquel un processus de signification peut s’engendrer ?

« donc en quelque sorte ce refus d'entrer dans la sphère de la communication, et donc onvoit difficilement, en ce sens, comme un tel silence pourrait être créateur de lien, decommunication, de projet, etc.

Il ne peut pas être autre chose, dans cette perspectiveque le refus de tout processus de création (de sens, de communication, d'interaction,etc.).

En ce sens, non seulement le silence ne dit rien, mais, bien plus encore, il sedéfinit par ce refus de dire quoi que ce soit. · L'entrée dans le langage peut en cela être rapprochée d'une véritable naissance (et donc de création en quelque sorte).

Le silence est donc, à l'inverse, le non-engendrement de soi, le refus de se créer soi-même dans et par les mots. · Il ne semble pas y avoir dans le silence, ainsi conçu comme refus originel de toute entrée dans le monde, de pensée structurée, de conscience claire et distincte.

C'estd'ailleurs dans cette perspective hégélienne qu'on peut le silence, en tantqu'impossibilité à communiquer, comme de la pensée à l'état embryonnaire.

Lasignification, et la pensée en tant que telle, se créent dans les mots et non pas dans lesilence, synonyme d'immaturité de la pensée. · En outre, dans l'absence de langage que constitue ce silence (au sens où on l'entend pour l'instant), celui de la non-communication, le vécu temporel ne prend pasnon plus de forme définie, car ce vécu n'est pas véritablement réfléchi : puisqu'il n'y apas de mot pour le nommer. II- Le rôle du silence d'un un processus d'engendrement de sens · Pourtant, on ne peut, de droit, réduire le silence à un refus originel de la communication, ni à cet état pré-langagier dans lequel le nouveau-né ne s'est pasencore auto-engendré lui-même comme individu.

Car le silence ne se conçoit que danset par le langage.

On peut, pour lui redonner à juste titre sa dimension féconde etcréatrice, l'opposer au bavardage. · En effet, en tant que bavardage, le langage, à lui seul, ne remplit pas nécessairement l'intention d'une pensée.

Et il peut noyer la pensée en l'absence d'unecertaine forme de silence, qui est alors créateur de sens et de valeurs. · Dans cette perspective, on s'aperçoit qu'une pensée paresseuse peut se laisser mécaniquement conduire par le langage : on dit que la lettre finit par tuer l'esprit.

Il esttoujours facile de répéter des formules apprises, au lieu de réinvestir leur sens.

A suivreseulement les mots, on finit par ne plus entendre clairement ce qu'ils disent.

Unepensée faible s'en laisse facilement imposer.

Ainsi la lettre peut se transmettre sansl'esprit qui l'animait.

Une intelligence ainsi mécanisée devient incapable de donner unsens à des formules anciennes. · Le langage met parfois en péril la pensée quand il n'est pas maîtrisé et qu'il l'étouffe sous une prolifération anarchique et bruyante.

La puissance du langage peut seretourner contre la clarté et la vivacité de la pensée, peut même la jeter dans laconfusion.

La parole peut prêter au quiproquo, se révéler inadaptée ou mensongère, cequi laisse la pensée démunie.

En un sens, il est important que l'esprit conserve toujoursle témoignage silencieux devant ce qui est dit, sans être jamais étourdi.

Important, parce que l'intégrité de la pensée en dépend.

· En ce sens on comprend que le silence peut tout à fait être fécond et créateur d'un sens que le bavardage a tendance à étouffer et à oublier.

C'est d'ailleurs ce qu'onentend lorsqu'on emploie la formule « c'est un silence qui en dit long ».

Le silence ditdonc parfois beaucoup plus que de longues et périlleuses phrases.

Et c'est en ce sensqu'il est créateur et non pas réductible au simple refus de communication. · On comprend alors que l'intelligence tire une puissance d'inspiration de la valeur du silence qui réside entre les mots et entre les pensées. · De même, s'il y a plusieurs valeurs du silence, c'est que le silence est révélateur.

Il signifie l'existence telle qu'elle est, dans la joie ou le malaise, la jouissance ou letourment d'exister.

Le silence de l'expression de l'existence est d'ailleurs si éloquent enlui-même, qu'il faut beaucoup de bruit pour le contourner, pour s'en évader, afin de nepas se retrouver seul avec soi-même, confronté à sa propre présence.

Le silence est àlui-même son propre sens et notre propre question.

Il est donc tout à fait réducteur decondamner le silence, sous prétexte que le mutisme est un mal qu'il faut guérir, car lemutisme n'est, on l'a vu, qu'un aspect du silence. III- Le silence comme dévoilement des états d'âme et créateur de l'être propre. »

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