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Sommes-nous conscients ou avons-nous à nous rendre conscients ?

Publié le 27/02/2005

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Ce sujet consiste en une alternative. Comment faut-il concevoir le phénomène de la conscience? On peut y voir une disposition spontanée, une donnée de notre condition naturelle. Il ne semble pas en effet que nous ayons à produire notre état de conscience; c'est une fonction qui, comme la respiration, s'exerce en nous involontairement. On peut voir aussi dans la conscience un phénomène ne résultant pas tant de la nature que de l'histoire sociale du sujet. Ce dont un individu prend conscience n'est pas indépendant en effet de ce qu'il a déjà vécu, de son degré d'instruction, du système culturel auquel il appartient. L'alternative du sujet pouvait donc se reformuler ainsi : la conscience est-elle un fait de nature ou bien un effet de la culture?

« qui nous permet d'être présent au monde.

Ainsi, je ne puis avoir mal sans savoir, ou avoir conscience que j'ai mal.

Etce sans même avoir à réfléchir sur ma douleur ! L'onomatopée "aïe" exprime bien cette idée : je ne réfléchis pasquand je dis "aïe", l'expression est énoncée spontanément, or elle exprime ma conscience d'avoir mal.Sans doute existe-t-il plusieurs degrés de conscience : le fait d'être dans le coma et celui de rédiger cettedissertation ne renvoient certainement pas au même degré de conscience.

Néanmoins, l'homme étant vivant danschacune de ces deux situations, il est aussi nécessairement conscient.Mais alors que veut-on dire quand on dit de quelqu'un qu'il est inconscient ? Comment peut-on évoquer une absencede conscience si tout homme est conscient ? Le problème est le suivant ; si tout homme est, comme nous venonsde le dire, conscient, alors ou bien l'inconscience n'existe pas, ou bien il existe une autre forme de conscience quecelle que nous venons d'évoquer, qui ne nous accompagne pas toujours. Il existe en effet une autre forme de conscience qui, elle, ne nous accompagne pas toujours ; c'est la conscienceréfléchie.

La conscience spontanée, que nous venons de définir, est un savoir qui accompagne tous nos étatspsychiques et tous nos actes, sans que l'on réfléchisse sur ceux-ci.

La conscience réfléchie, elle, consiste en unretour réflexif opéré sur ces états et sur ces actes.

Ainsi, toujours à propos de la douleur, je puis non seulementavoir conscience de la ressentir, mais aussi me demander quelle en est la cause.

La conscience réfléchie n'est quele prolongement de la conscience spontanée : il s'agit de la même conscience, mais leur degré de réflexion n'est pasle même.

Aussi la conscience réfléchie est-elle, en tant que réfléchissante et interrogeante, la condition de touteconnaissance, à commencer par la connaissance de soi.

Encore faut-il l'utiliser! Car si la conscience spontanée nousaccompagne sans cesse, la réflexion sur nos actes et nos états de conscience, en revanche, ne se fait pas toujours!C'est ainsi que s'explique le phénomène de l'inconscience : il ne s'agit pas d'une absence totale de conscience, maisd'une absence de conscience réfléchie.

L'homme qualifié d'inconscient est dépourvu de conscience réfléchie, maispas de conscience spontanée, aussi bas soit son degré.

On peut, en simplifiant, dire qu'il existe trois formesd'inconscience.

La première est l'inconscience physique.

Elle consiste en une perte de conscience, lors d'unévanouissement par exemple.

La personne est dans l'incapacité d'exercer le moindre retour sur ses états deconscience, conscience qu'elle a pourtant, puisqu'elle est vivante.

Sa conscience spontanée est à un degré tropbas pour pouvoir se réfléchir.

La seconde consiste en un manque d'attention lors de l'accomplissement d'un acte,manque d'attention qui peut engendrer l'étourderie et sa conséquence, l'erreur.

L'habitude est souvent la cause dece phénomène, car la répétition des mêmes gestes finit par s'effectuer de manière automatique, sans que laréflexion soit convoquée.

Or le défaut de vigilance risque de favoriser l'étourderie : supposons que la situation donton a l'habitude diffère , on ne s'en rend pas compte (on ne s'en rend pas conscient) ou on l'oublie, et on se trompe.Je dois me rendre à un endroit qui suppose que j'emprunte en partie le même chemin que pour aller au lycée...et jeme retrouve au lycée, ayant oublié que ce n'était pas ma destination initiale.

Si l'erreur va me permettre de prendreconscience que la destination n'était pas le lycée et le chemin pas tout à fait le même, cette prise de consciencearrivera malgré tout trop tard.

La troisième forme d'inconscience est l'inconscience morale : elle consiste à ne pasréfléchir, avant d'agir, sur les éventuelles conséquences néfastes de nos actes.

On peut prendre pour exemple unconducteur faisant du 200 km/h sur une route de village à la sortie d'une école : la réflexion lui intimerait de ralentir.Une fois l'action accomplie et le mal fait (un enfant écrasé), l'inconscience peut aller jusqu'au refus d'assumer cetacte et ses conséquences, c'est-à-dire au refus de se juger responsable.

L'absence de réflexion peut donc avoirHeu avant et après l'action.

Il s'agit dans les deux cas d'une responsabilité non assumée, ce qui est une faute.Sauf dans le cas de l'inconscience physique, l'inconscience est répréhensible : elle porte préjudice à nous-mêmesquand elle engendre une erreur, et préjudice aux autres quand elle engendre la faute.

Autrement dit, l'absence deconscience réfléchie doit être évitée : c'est une nécessité du point de vue de l'erreur, et un devoir du point de vuede la faute.

Nous avons donc à nous rendre conscients : la conscience réfléchie est une capacité qu'il faut exercer.Elle ne se manifeste pas d'emblée. Il ne s'agit donc pas, en définitive, de savoir si nous sommes conscients ou si nous avons à nous rendre conscients, il s'agit plutôt, après réflexion sur ce sujet, d'affirmer que non seulement nous sommes conscients, mais que nousavons aussi à nous rendre conscients.

L'alternative proposée par le sujet est à remettre en cause, car il y a deuxformes de conscience, entre lesquelles il n'y a pas à choisir.

La conscience spontanée nous accompagne toujours,de sorte que nous sommes conscients, et la conscience réfléchie doit être exercée, de sorte que nous avons à nousrendre conscients.Cette conscience réfléchie est non seulement une nécessité ou un devoir, comme on l'a vu, mais elle est aussi unetâche, une exigence.

En effet, si nous avons dit que la conscience spontanée est commune à l'animal et à l'homme,il n'en va pas de même pour la conscience réfléchie, qui est une spécificité humaine.

C'est par elle que l'homme sedistingue de l'animal, et c'est grâce à elle qu'il occupe une place particulière dans le monde : celle d'un sujet quipeut faire du monde un objet d'étonnement, de curiosité, d'étude.

Ce qui l'amène à essayer de connaître ce monde,de le comprendre, de l'interpréter, de le transformer La conscience réfléchie nous permet d'établir une distanceentre le monde et nous, distance qu'il nous revient d'exploiter Car c'est à cette condition que l'homme manifesteraet honorera son humanité. Non seulement nous sommes conscients, mais nous avons à nous rendre conscients.

Si nous sommes tous dotésd'une conscience spontanée, qui accompagne tous nos états psychiques et tous nos actes, il n'en demeure pasmoins que nous n'exerçons pas toujours un retour réflexif sur eux.

Ceci explique que nous puissions être évanouis,commettre des erreurs, être coupables de fautes.

Nous pouvons donc être conscients et inconscients, conscientset étourdis, conscients et dépourvus de conscience.

L'erreur nous étant préjudiciable, et la faute préjudiciable àautrui, il va sans dire que ce retour réflexif sur nous-mêmes doit être exercé : nous avons à nous rendre conscients.C'est aussi à cette condition que nous pourrons prendre possession de la place qui est la nôtre dans le monde :. »

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