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Sommes-nous conscients de ce qui nous déterminent ?

Publié le 27/02/2008

Extrait du document

Analyse du sujet   Le mot conscience vient du latin cum scientia qui signifie « accompagné de savoir ». Etre conscient, c'est en effet agir, sentir ou penser et savoir qu'on agit, qu'on sent et qu'on pense. Le fait d'être conscient constitue donc pour l'homme un événement décisif qui l'installe au monde et lui commande d'y prendre position. Car l'homme, dans la mesure où il est conscient, n'est plus simplement dans le monde, chose parmi les choses,  vivant parmi les vivants. Il est au contraire devant le monde et, dans ce vis-à-vis, le monde se constitue pour lui comme monde à connaître, à comprendre, à juger ou à transformer. Le monde est ainsi mis à distance et tout l'effort de penser ou d'agir naît de cette expérience originelle de la séparation de l'homme et du monde, instaurée par la conscience. Ce qu'il faut ici penser c'est d'abord et avant tout le lien qui unit conscience et déterminisme. Etre déterminé semble a priori se définir comme l'ensemble des phénomènes qui pèsent sur nous et qui nous contraints d'agir d'une certaine manière, sans possibilité de choix. Or, se demander si nous sommes conscients de ce qui nous déterminent c'est en réalité s'interroger sur la fiabilité de la conscience d'abor envisagée comme un savoir plus ou moins clair que l'on a du monde et de nous- même. Si nous ne sommes, en effet, nullement conscients de ce qui nous déterminent - c'est-à-dire encore que nous croyons agir librement et par choix là où en réalité pèse sur nous une contrainte - alors c'est la conscience elle-même, dans sa prétention à dire le vrai, qui devra être remise en question. Il va donc falloir distinguer des degrés de conscience pour mettre au jour la nature tout à fait ambivalente de la conscience et par la son statut tout à fait particulier au sein des facultés de l'homme. Car si nous sommes à tout moment conscient, en ce sens que nous avons à tout moment une conscience perceptive du monde et de nous, n'y a-t-il pas des moments où la conscience - dans la prise de conscience par exemple - est plus vivace et plus riche que d'autres ? C'est donc bien la nature et le statut de la conscience qui sont ici mis à la question.   Problématique               La conscience, comme tout à la fois conscience de soi et du monde, est-elle toujours connaissance vraie et adéquate du monde et de nos actions, ou bien, au contraire, n'est-elle que productrice d'illusion sur nous-même et sur le monde ? Lorsque nous nous pensons comme des êtres libres, cela ne relève-t-il pas d'une production illusoire de la conscience ? Quelle est donc la nature du rapport entre conscience et déterminisme ?

« II.

La nécessité de la prise de conscience dans la reconnaissance et le dépassement de ce qui nous déterminent En tant que sujet de conscience je suis ce que ma vie affective et intellectuelle a pu rencontrer, assimiler,digérer du monde extérieur, et que du monde extérieur, tel qu'il m'apparaît maintenant, je ne peux connaître,éprouver que le reflet de ce que je suis déjà.

Comme le dit Bergson, dans un raccourci saisissant, « il n'y a pasde perception qui ne soit imprégnée de souvenirs », Matière et Mémoire, ch.

I.

® Pour Bergson, la conscience est mémoire.

Si la conscience est mémoire, alors cela signifie que nous sommes déterminés, par la nature de laconscience elle-même, a voir le présent qu'à travers le filtre de notre passé.Si cependant, la perception n'était que souvenir, je trahirais nécessairement cette réalité extérieure que jerencontre au présent.

La perception ne serait alors que subjectivité pure et le monde ne serait que le miroird'un moi qui ne pourrait rencontrer de la réalité extérieure que son reflet.

Or, précisément, l'adéquation entre lemoi et le monde est loin d'être totale.

La perception offre toujours de la réalité présente quelque chose que lesouvenir ne peut suffire à saisir, quelque chose d'absolument neuf, qui fait que nos grilles de lecture de laréalité, grilles acquises par l'expérience passée, ne suffisent jamais.Cette nouveauté du présent se manifeste alors comme une résistance aux projections du sujet, et donccomme une résistance à cette fusion-confusion que la conscience tend à instaurer entre le sujet et l'objet,entre le moi et le monde, et qui vient de ce que le sujet tend à ne voir dans le monde que le miroir de ce qu'ilest.

Car, précisément, la réalité n'est pas qu'un miroir du moi, et cela se manifeste parfois crûment au sujet.Les choses ne se passent pas toujours comme je le désire, comme je le crains, bref comme je m'y attends à lalumière de ce que j'ai déjà vécu.

Si elles sont incontestablement un support pour mes projections, ce supportn'est pas neutre, il a son mot à dire, parfois il s'impose, et m'impose de réajuster mes vues sur le monde.

Ceréajustement, c'est précisément ce qu'on appelle une prise de conscience, la saisie de la réalité « telle qu'elleest », plus exactement « telle qu'elle est à vivre dans son irréductible nouveauté », et non telle qu'on s'attendà ce qu'elle soit, telle qu'on aimerait qu'elle soit, telle que tout sujet tend à la rêver, à la transformer, à latrahir.La prise de conscience implique tjrs qu'il y ait eu occultation de conscience auparavant.

Cette occultationvient du fait que la perception que le sujet a du monde est une perception qui, nous l'avons compris, estnécessairement abusive, au sens où, par sa nature même, le sujet ne peut être sujet que s'il est un moi,autrement une subjectivité intéressée, avec une expérience qui lui sert à saisir la réalité et à l'organiser, maisqui est génitrice d'a priori, de préjugés, d'attentes, de désirs, bref de toute une grille de lecture subjective,plaquée sur la réalité objective.Il est en quelque sorte dans la nature même du moi de na pas voir la nouveauté et, si elle s'impose, de ne pasapprécier d'être bousculé par elle.

Le moi n'aime pas que les choses ne se passent pas comme une il le désire,comme il s'y attend.

Il vit ce qu'il y a d'absolument nouveau dans l'expérience présente comme quelque chosede pénible, et même comme un agression à sa propre nature.

C'est pourquoi il peut développer toute une sériede fuites ou de négations, de dénis, d'aveuglements divers, d'illusions en face de cette nouveauté, de cetterésistance de la réalité.

L'expérience présente peut ainsi être totalement court-circuitée par les filtres dumental que constitue l'assimilation du passé, filtres qui nous empêchent de voir les choses telle qu'elles sont oubien du moins telles que nous devrions les voir.

Nous trouvons là toutes les structures qui obscurcissent laconscience, des préjugés sur la vérité.Sans aller jusqu'à l'illusion et au délire qui déforment la réalité pour la rendre conforme au désir, nous pouvonsévoquer le cas très banal et courant de l'habitude.

L'habitude n'est pas en soi une mauvaise chose, car c'est lelieu d'un repose de la conscience.

Dans l'habitude, la vigilance n'était pas considérée comme requise, laconscience se met en retrait.

C'est confortable.

La vigilance exige, au contraire, toujours un effort.

Elle se meten place spontanément si on se sent en danger, en état d'alerte.

La conscience alors s'éveille, l'attention et lavigilance sont intenses.

Inversement, sans cette stimulation du danger, la conscience s'endort au moinspartiellement, elle vit sur les acquis du passé que représentent les habitudes.Retenons de cela que la conscience n'est pas tjrs au même niveau et qu'il y a bien des moments où l'on dort,autrement dit où l'habitude, les mécanismes appris dans le passé et qui fonctionne globalement bien, noushypnotisent et nous empêchent de voir la réalité telle qu'elle est maintenant.

La conscience exige que noussoyons attentifs à ce que nous vivons.

Si le danger constitue une alerte qui renforce la conscience, à l'inverseaussi le présente dans ce qu'il a d'absolument unique, de tjrs frais et nouveau, exige tjrs, pour être saisi, uneattention que l'on n'est pas tjrs prêt à donner, parce que tout simplement cette attention représente un effortet que l'homme aime à se laisser aller, à se reposer sur ces acquis.La prise de conscience est donc le plus souvent douloureuse, parce qu'il faut renoncer à ses acquis, à sesrepères, à ses habitudes mentales, mais aussi à ses désirs et ses attentes.

Elle est souvent arrachée au sujetpar la réalité elle-même, qui, à force d'être niée ou travestie, devient insupportable.

Elle naît lorsque l'être, enface duquel se tient le moi, est cause de perturbations telles qu'elles le mettent en danger.

Ces perturbationsimposent alors une restructuration du moi, qui peut aller jusqu'à la naissance d'un nouveau moi, un moi qui aassimilé et admis en son sein ce que le sujet a d'abord vécu comme de dangereuses perturbations.

Voilàpourquoi la prise de conscience est toujours bénéfique pour le sujet et lui permet de grandir : chaqueperturbation dépassée est une véritable nourriture pour le moi.C'est ce qui se passe le plus souvent dans une psychothérapie ou dans une psychanalyse.

Le patient nedécide pas de regarde la réalité en face parce que l'illusion dans laquelle il s'est enfoncé lui coûte désormaistrop cher.

Il fait alors un travail qui permet ces prises de conscience, salvatrices et libératrices.

Admettre laréalité et la nouveauté qu'elle apporte est en effet la seule chose à faire, le seul comportement positif, quin'est possible qu'avec des renoncements, des détachements et une volonté d'authenticité intense.

Le patient. »

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