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STENDHAL VU PAR UN AMI

Publié le 08/05/2011

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stendhal

Il est gros, court, trapu, fort, vivace. Ses cheveux sont frisés, son oeil est ardent et il a une figure de la nature des Socrates, avec cette différence qu'il augmente son naturel au lieu de le combattre, comme le premier des philosophes du monde. Stendhal est systématique, comme presque tous les hommes de ce siècle-ci. Le fond de sa doctrine est que la vie est dans l'activité, qu'ainsi en augmentant l'activité on remplit le but de la vie et que même on la rend plus agréable. De ce principe juste, Stendhal en a fait une application particulière; il ne donne de mouvement qu'à son corps et à son esprit et laisse les facultés de son âme endormies. Il fait plus, car il les comprime, quand elles veulent agir à son insu. En un mot, Stendhal s'egt fait athée et matérialiste par calcul. Il aime les arts, les sciences, les femmes, la nature entière comme un joujou propre à le distraire : toutes les fois qu'il sent qu'une de ces choses pourrait produire sur lui une impression profonde, il dirige ses désirs, ses sens, ses yeux sur un objet qui divertit vivement sa pensée et donne un autre cours à ses désirs. Le grave, le sérieux lui est désagréable et il n'admet devant lui que ce qui peut le réjouir. L'amitié lui pèse, parce qu'elle occupe sérieusement.... Je serais bien trompé si Stendhal n'était pas désolé d'être trop gros et de manquer de cette élégance naturelle qui vous donne de la confiance en vous-même.... Lorsqu'il est tout à fait à l'aise, entre hommes, il saute par-dessus le naturel, il devient cynique, et, alors, je lui trouve moins d'esprit que quand il est retenu. Avec les femmes, il est maniéré. Où il est le mieux, c'est avec des hommes instruits qu'il ne connaît pas intimement. C'est alors qu'il se tient suffisamment et qu'il donne l'idée la plus avantageuse de son esprit.

E.-J. Delécluze, Carnet de route d'Italie [en 1823-24], pages 102 et suiv.

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