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TEXTES DE REFERENCE: Névroses et psychoses

Publié le 25/07/2010

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"Les paranoïaques présentent dans leur attitude ce trait frappant et généralement connu, qu'ils attachent la plus grande importance aux détails les plus insignifiants, échappant généralement aux hommes normaux, qu'ils observent dans la conduite des autres ; ils interprètent ces détails et en tirent des conclusions d'une vaste portée. Le dernier paranoïaque que j'ai vu, par exemple, a conclu à l'existence d'un complot dans son entourage, car lors de son départ de la gare des gens ont fait un certain mouvement de la main. Un autre a noté la manière dont les gens marchent dans la rue, font des moulinets avec leur canne, etc. Alors que l'homme normal admet une catégorie d'actes accidentels n'ayant pas besoin de motivation, catégorie dans laquelle il range une partie de ses propres manifestations psychiques et actes manqués, le paranoïaque refuse aux manifestations psychiques d'autrui tout élément accidentel. Tout ce qu'il observe sur les autres est significatif, donc susceptible d'interprétation. D'où lui vient cette manière de voir ? Ici, comme dans beaucoup d'autres cas analogues, il projette probablement dans la vie psychique d'autrui ce qui existe dans sa propre vie à l'état inconscient. Tant de choses se pressent dans la conscience du paranoïaque qui, chez l'homme normal et chez le névrosé, n'existent que dans l'inconscient, où leur présence est révélée par la psychanalyse ! Sur ce point, le paranoïaque a donc, dans une certaine mesure, raison : il voit quelque chose qui échappe à l'homme normal, sa vision est plus pénétrante que celle de la pensée normale ; mais ce qui enlève à sa connaissance toute valeur, c'est l'extension à d'autres de l'état de choses qui n'est réel qu'en ce qui le concerne lui-même". Freud, Psychopathologie de la vie quotidienne, 1901, trad. S. Jankélévitch, Petite Bibliothèque Payot, 1981, pp. 273-274.

"Même lorsqu'on sentait que ce qui était dit émanait d'un individu, le fragment du moi, d'où venaient les mots et les actes, n'était pas Julie. Ce pouvait être quelqu'un qui nous adressait la parole, mais quand on écoute un schizophrène, il est très difficile de savoir « qui « parle, et il est tout aussi difficile de savoir « à qui « on s'adresse […]. On peut commencer à identifier des bribes de discours, ou des fragments de comportement surgissant à diverges reprises, qui semblent aller ensemble en raison de similitudes dans l'intonation, le vocabulaire, la syntaxe, le souci d'énonciation, ou bien constituer un comportement à cause de certains gestes ou attitudes stéréotypés. On semblait donc être en présence de divers fragments, ou d'éléments incomplets, ou encore de « personnalités « différentes intervenant en même temps […] Avec Julie, il n'était pas difficile d'avoir une espèce d'échange verbal, mais elle semblait ne pas avoir d'unité globale et être une constellation de systèmes partiels quasi autonomes. Il était difficile de « lui « parler. Cependant […] même cet état de non-entité presque chaotique n'était nullement irréversible, et sa désintégration n'était pas fixée. Parfois, Julie se ressaisissait merveilleusement et faisait preuve d'une perception extrêmement pathétique de sa triste condition. Mais, pour plusieurs raisons, elle était terrorisée par ces moments d'intégration. Entre autres, parce qu'ils lui causaient une forte angoisse et que le processus de désintégration semblait être retenu par la mémoire et redouté comme une expérience si terrible qu'elle trouvait refuge dans sa non-intégration, son irréalité et sa torpeur. En tant que schizophrène chronique, l'être qu'était Julie se caractérisait donc par l'absence d'unité et par la division en ce qu'on pourrait désigner de diverses manières : « assemblages « partiels, ensembles, systèmes partiels, ou « objets internes «. Chacun de ces systèmes partiels possédait des traits reconnaissables et des traits propres spécifiques. En s'appuyant sur ces critères, on parvenait à expliquer bien des aspects de son comportement. Le fait que son ego n'était pas assemblé globalement, mais morcelé en plusieurs assemblages ou systèmes partiels, nous permet de comprendre que les diverses fonctions, qui présupposent la réalisation de l'unité personnelle ou, du moins, un degré élevé d'unité personnelle ne pouvaient se trouver en elle puisqu'on fait, elles n'existaient pas. L'unité personnelle est une condition préalable de la conscience réflexive, c'est-à-dire l'aptitude à réaliser que le moi agit avec une certaine absence de contrainte ou avec une simple prise de conscience primaire non réflexive. Chez Julie, chaque système partiel pouvait être conscient des objets, mais il pouvait arriver qu'un système ne soit pas conscient des processus se déroulant dans un autre système, séparé de lui. Par exemple, si au cours d'une conversation avec moi l'un des systèmes « parlait «, il semblait n'y avoir en Julie aucune unité globale pour laquelle « elle «, en tant que personne unifiée, pouvait être consciente de ce que ce système disait ou faisait. Dans la mesure où la conscience réflexive était absente, « la mémoire «, de laquelle la conscience réflexive semblerait un préalable, était très inégale [...] L'absence d'une expérience globale de tout son être signifiait qu'il lui manquait l'expérience unifiée sur laquelle fonder une notion précise de ses « limites «. Néanmoins, elle n'en était pas totalement dépourvue [...] Au contraire, chaque système paraissait avoir une limite propre. C'est-à-dire qu'un système pouvait très bien être conscient du fait qu'un autre système pouvait se situer hors de lui [...] C'était seulement de « l'extérieur « que l'on pouvait se rendre compte que différents systèmes conflictuels fonctionnaient simultanément chez Julie. Chaque système partiel semblait porter en lui sa propre focalisation du centre de conscience : il avait ses propres schémas de mémoire, très limités ; et des moyens limités de structurer des perceptions ; il avait des pulsions quasi autonomes ou séparées ; une tendance propre à préserver son autonomie et à se garder des dangers qui menaçaient son autonomie. Julie désignait ces divers aspects par « il « ou « elle «, ou s'adressait à eux en leur disant « vous «. C'est-à-dire qu'au lieu d'avoir une conscience réflexive de ces divers aspects d'elle-même, « elle « percevait le fonctionnement d'un système partiel comme s'il n'était pas le « sien « mais était à l'extérieur. Elle était en proie à des hallucinations/" R.D. Laing, The Divided Self : a study of sanity and madness, London, Tavistock, 1960, p. 214-217.

 

« s'intéresse à la paranoïa, la confusion hallucinatoire, et à la psychose hystérique ...

Son but n'est pas tant de classer - l'histoire des topiques successives démontre bien que Freud savait abandonner une classification périmée - que de partager entre deux structures différentes le terrain de la causalité sexuelle (du côté des névroses) et le terrain du conflit psychique (psycho-névrose de défense).

Il reste, pour l'ensemble, que les définitions de Freud s'éloignent peu des classifications cliniques et retrouvent les grandes distinctions entre deux modalités de perturbation : la névrose, trouble mineur, viable en société, avec des moments graves, mais sans perte de réalité; la psychose, trouble grave, demandant l' enfermement quand il devient insupportable au groupe où il se déroule.

Cependant, l'histoire du mouvement psychanaly­ tique, d'une part, et l'histoire des idées en un sens plus général, d'autre part, ont fait évoluer la question de la psychose et de la névrose, au point de la faire complètement éclater.

On a su assez tôt que Freud n'aimait pas les psychotiques : il l'a dit et montré en conduisant plutôt des analyses de névrosés.

On a pu penser qu'il tolérait mal l'absence radicale de sublima­ tion chez le psychotique : l'autre du fou, c'est l'artiste, idéal personnel de Freud, l'artiste qui sait contraindre ses pulsions à travailler pour le groupe.

On a constaté que la cure psychanalytique convenait au névrosé, mais que le psychotique n'entrait pas dans la règle du jeu : la , qui consiste à accepter de parler «librement» dans un espace et un temps donnés.

Mais, assez vite, cette situation bloquée - en grande partie par Freud lui-même - a changé; Melanie Klein a donné des éléments théoriques qui permettent de comprendre les mouvements de grande amplitude caractéristiques de la psychose.

Parallèlement, la psychiatrie s'est modifiée avec l'apparition, vers 1965, du mouvement antipsychia-. »

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