Le Théâtre et son double
Publié le 27/03/2013
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Né à Marseille en 1896, Antonin Artaud monta à Paris en 1920 pour faire du théâtre. Il suivit les cours de Charles Dullin, figura ou joua dans nombre de pièces et de films. Simultanément à ses débuts de poète, il fonda avec Roger Vitrac le théâtre Alfred Jarry (1926-1930). De 1931à1933, Artaud fit campagne, avec plusieurs articles et conférences, pour un renouveau du théâtre. En 1935, il décida de faire un recueil de ces articles, Le Théâtre et son double, qui parut en 1938.
«
« La mort est cruauté,
la résurrection est
cruauté, la transfigura
tion est cruauté,
puisqu'en tous sens
et dans un monde
circulaire et clos
il n'y a pas de place pour la vraie mort.
»
~------- EXTRAITS
L'acteur dans une société malade
Entre le pestiféré qui court en criant à la
poursuite de ses images
et l'acteur à la
poursuite de sa sensibilité ; entre le vivant
qui se compose des personnages
qu'il
n'aurait jamais pensé sans cela à imaginer,
et qui les réalise au milieu
d'un public de
cadavres et d'aliénés délirants,
et le poète
qui invente intempesti
vement des person
nages
et les livre à un
public également inerte
ou délirant, il y a
d'autres analogies qui
rendent raison des
seules vérités qui comp
tent,
et mettent l'action
du théâtre comme celle
de la peste sur le plan
d'une véritable épidé
mie.
Le conformisme nuit
à la sensibilité
Une des raisons de l'at
mosphère asphyxiante,
dans laquelle nous
vivons sans échappée
possible et sans recours -et
à laquelle nous
avons tous notre part,
même les plus
révolutionnaires d'entre nous-, est dans ce
respect de ce qui est écrit.formulé ou peint,
et qui a pris forme, comme si toute expres
sion n'était pas enfin
à bout, et n'était pas
arrivée au
point où il faut que les choses
crèvent
pour repartir et recommencer.
On doit en finir avec cette idée des chefs
d'œuvre réservés
à une soi-disant élite, et
que la foule ne comprend pas ;
et se dire
qu'il n'y a pas dans l'esprit de quartier
réservé comme il y en a pour les rappro
chements sexuels clandestins.
Les chefs-d'œuvre du passé sont bons pour
le passé : ils ne sont pas bons pour nous.
Artaud révèle un même esprit appliqué
à chaque notion
L'ACTEUR
L'acteur est
à la fois un élément de première
importance, puisque
c'est de l'effi cacité de
son jeu que dépend la réussite du spectacle,
et une sorte d'élément passif et neutre,
puisque toute initiative personnelle lui est
rigoureusement refusée.
C'est d'ailleurs un
domaine où il
n'est pas de règle précise; et
entre l'acteur
à qui on demande une simple
qualité de sanglots,
et celui qui doit
prononcer un discours avec ses qualités de
persuasion personnelles, il y a toute
la marge
qui sépare un homme d'un instrument .
L'INTERPRÉTAT/ON
Le spectacle sera chiffré d'un bout à l'autre ,
comme un langa ge.
C'est ainsi qu'il n'y
aura pas de mouvement perdu, que tous les
mouvements obéiront
à un rythme ; et que
chaque personnage étant typé à l'extrême,
sa gesticulation, sa physionomie, son
costume apparaîtront comme
autant de
traits de lumière.
LE
PUBLIC
Il faut d'abord que
ce théâtre soit.
Gallimard, 1985
« ••• elle appelle des
images surnaturelles,
un sang d'images, un
jet sanglant d'images
aussi bien dans la tête
du poète
Q'!e dans celle
du spectateur.
»
NOTES DE L'ÉDITEUR « Si Artaud vivait aujourd'hui, ferait-il du
rock
? Posée de façon aussi abrupte, la
question semble incongrue -un
~auvais
gag, un paradoxe facile.
Et pourtant ! Il
suffit de lire attentivement Le Théâtre et
son double
pour voir surgir sa ns cesse des
parallélismes évidents entre la conception
d' Artaud et la manière dont agit -ou
devrait agir -le rock.
» Patrice Bolon,
« Ainsi , Artaud, dont on n'a voulu retenir
que la
" cruauté " quant au théâtre, et la
«On s'aperçoit finalement en lisant
Le Théâtre et son double, que ce débat mené
par Artaud à propos du théâtre pendant des
années recouvre
un débat plus profond : celui
de la culture, dans ses rapports avec la vie.
Il ne sert
qu'à dénoncer le malaise de la
civilisation :
« une rupture entre les choses et
les paroles, les idées, les signes qui en sont la
représentation .
» Paule Thévenin, Œuvres
c omplètes d'Artaud,
Gallimard, 1964.
1 Rog er -V io llc l 2, 3, 4 lith os de Wilfr edo Lam , Aubry - Rueff .
1966 / B .N .
« Artaud rock», Magazine littéraire n° 206,
avril 1984.
" déperdition " quant à la poésie, met le
plus profondément en question
et tout
aussitôt ordonne un mouvement formidable
et précis qui n'est pas près de s'arrêter.
Sans cesse, des tentatives apparemment
partielles, gratuites ou aberrantes
y
participent.
» Jean Thibaudeau, Artaud
homme
de théâtre, Éditions Borderie,
Oblique s, 1976.
ART AUD 02.
»
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