Devoir de Philosophie

LA THÉORIE DE L'IDÉAL CLASSIQUE

Publié le 18/05/2011

Extrait du document

BOILEAU. — LA QUERELLE DES ANCIENS ET DES MODERNES

I. — Boileau (1636-1711). Vie et caractère. — Comme Molière et Voltaire, Nicolas Boileau-Despréaux est né à Paris, le Ier novembre 1636. Il était le quinzième enfant de Gilles Boileau, greffier au Parlement. Il fit ses études au collège d'Harcourt (aujourd'hui lycée Saint-Louis), puis au collège de Beauvais, à Paris. On le destinait à l'Église; mais rebuté par la théologie, il obtint de son père la permission de faire son droit, et il devint avocat. D'ailleurs, il n'aimait pas plus la chicane que la scolastique. A la mort de son père (1657), il se trouva possesseur d'une modeste mais solide fortune et put librement se vouer à la poésie; c'est alors qu'il se fit appeler Boileau-Despréaux, et ses contemporains l'ont presque toujours désigné sous ce dernier nom. Boileau commença par publier quelques vers médiocres dans un recueil de poésies galantes paru en 1663. Mais, dès 1660, il avait écrit sa première satire; et il continua jusqu'en 1669 à combattre les mauvais poètes et à défendre ceux que la postérité a reconnus. C'est la première période de sa vie littéraire. — La seconde s'étend de 1669 à 1677: elle comprend les Épîtres, les quatre premiers chants du Lutrin, l'Art poétique. Protégé et-aimé par le Roi, il n'en obtient une pension qu'en 1676; en 1677, il est nommé historiographe, en même temps que Racine. —La troisième période, de 1677 à 1711, est celle pendant laquelle Boileau compose ses derniers ouvrages en vers, quelques satires et épîtres, les chants V et VI du Lutrin. L'Académie ne songeait point à lui; elle était pleine encore des écrivains qu'il avait ridiculisés; le Roi l'imposa en 1684. Il fut alors très occupé par la Querelle des anciens et des modernes, à partir de 1687. A la fin de son existence, survivant à tous ses amis, accablé d'infirmités, il était devenu morose et chagrin.

« en 1673; les deux derniers, en 1686.

Le sujet en est une querelle entre les membres du chapitre de la Sainte-Chapelle.

« Dans ce chapitre, écrit Boileau, le trésorier remplit la première dignité, et il officie avec toutes lesmarques de l'épiscopat.

Le chantre remplit la seconde dignité.

Il y avait autrefois dans le choeur, à la place où setient le chantre, un énorme pupitre ou lutrin, qui le couvrait presque tout entier.

Il le fit ôter.

Le trésorier voulut lefaire remettre.

De là arriva une dispute...

» M.

de Lamoignon ayant défié Boileau de faire un poème épique sur cesujet mesquin, Boileau tint la gageure, et écrivit le Lutrin.

Il eut l'honneur de créer en France une sorte de burlesquenouveau, en transposant sur le ton épique des aventures banales. L'Art poétique (1674).

— L'Art poétique est divisé en quatre chants.

Au Chant I, Boileau donne des préceptesgénéraux, qui peuvent convenir à tous les genres : nécessité de l'inspiration; connaître la nature de son propretalent; accord de la rime et de la raison; éviter l'emphase et le burlesque; être clair, correct; savoir se corriger etse soumettre à la critique.

Boileau intercale dans ce chant (v.

113-146) une courte histoire de la poésie française,de Villon à Marot.

— Le Chant II contient les préceptes des petits genres de poésie : l'églogue, l'élégie, l'ode, lesonnet, l'épigramme, le rondeau, la ballade, le madrigal, et la satire, dont Boileau fait l'histoire chez les Latins etchez les Français.

— Au Chant III, Boileau aborde les grands genres : tragédie, épopée, comédie.

A propos de latragédie, il étudie les origines du genre en Grèce, juge le théâtre du moyen âge et donne les règles de la tragédieclassique; pour l'épopée, il recommande le merveilleux païen, celui d'Homère, et il attaque vivement ceux quiconseillent ou qui pratiquent le merveilleux chrétien ; la comédie l'amène à juger Térence et Molière, — Le Chant IVest consacré à des conseils de bon sens et de moralité : la poésie ne souffre pas la médiocrité; faire choix d'un boncenseur; aimer la vertu; ne pas travailler pour l'amour du gain; éloge de Louis XIV qui, par ses bienfaits, a relevé lacondition du poète.Ce poème didactique est, de toutes les oeuvres de Boileau, celle qui a le plus servi à sa réputation et qui lui a leplus nui.

Chaque fois que Boileau touche à l'histoire littéraire, soit ancienne (Homère, la tragédie grecque, l'odegrecque), soit moderne (Marot, Ronsard, le théâtre au moyen âge), il est insuffisant ou inexact.

Exceptons-en sacourte histoire de la satire à Rome.

En donnant de chaque genre une définition abstraite et absolue, Boileau semblene tenir aucun compte des différences essentielles que les temps et les pays établissent dans I( goût littéraire.

Ilest souvent dogmatique, au sens le plus étroit du mot Il manque de ce que nous estimons le plus aujourd'hui dans lacri tique, le sens historique.

Ce défaut est particulièrement sensible dan son plaidoyer en faveur du merveilleuxpaïen.Mais, pour apprécier à sa valeur l'Art poétique, il faut, nous l'avons déjà observé, lui appliquer précisément cettecritique historique que Boileau ne pratiquait pas.

Tout y concorde avec l'idéal et avec l'usage des grands écrivainsclassiques, que Boileau ne faisait, après tout, qu' « enregistrer ».La doctrine de Boileau.

— Dégageons donc les principes essentiels de la poétique de Boileau, en consultant à la foisl'Art poétique et les Epîtres.1° Rien n'est beau que le vrai.

— Le vrai, c'est la nature.

Mais la nature à la fois générale et choisie ; — générale,parce qu'il faut que l'oeuvre d'art intéresse tous les hommes capables de réfléchir et de sentir, — choisie, parce queles exceptions ou les monstruosités que produit parfois la nature sont contraires à son plan ordinaire et que nousn'arrivons au général que par le choix.

Voilà pourquoi Boileau proscrit le précieux, le burlesque, l'emphase, et revientsans cesse au naturel, seul beau, c'est-à-dire seul digne d'attirer et de fixer l'artiste.

— Ce naturel, dans les grandsgenres, est surtout psychologique.

Cependant, Boileau n'exclut pas la peinture pittoresque de la nature extérieure;mais il en élimine les traits trop spéciaux, qui pourraient devenir inintelligibles aux lecteurs d'un autre âge.

— A.

de Musset a dit plus tard : Rien n'est vrai que le beau ; ce précepte n'a pas unautre sens que celui de Boileau.2° Le vrai seul est aimable.

— Le but de la poésie n'est pas d'instruire ni deprouver, mais de plaire.

Et Boileau affirme que seule la nature plaît.

Touteaffectation rebute le lecteur.

« Chacun pris en son air est agréable en soi.

»Et il faut plaire, au XVIIe siècle, à la société, laquelle ne supporte pas lesublime continu, ne tolère pas le réalisme trop bas, aime à se reconnaîtredans les analyses et dans les inventions qu'on lui présente, plutôt qu'à sesentir dominée et écrasée par l'extraordinaire.3° Aimez donc la raison.

— Mais quel sera le critérium dans la recherche duvrai et du naturel ? Notre imagination nous entraîne dans l'irréel et dans lafantaisie; notre sensibilité nous porte à exagérer nos propres façons desouffrir ou de jouir; donc, c'est notre raison qui nous servira de guide.

Raison,chez Boileau, est presque synonyme de bon sens.

C'est la faculté moyenne,commune à tous les hommes, dans tous les temps et dans tous les pays, quiprend pour base de ses jugements ce qu'il y a d'universel et d'irréductibledans la nature humaine.4° L'imitation des anciens.

— Et comment former notre raison, lui apprendre àdistinguer le vrai du faux, le général du particulier, ce qui durera de ce quidoit passer ? Par l'étude des anciens.

Ceux-ci, en effet, plus rapprochés quenous de la nature, l'ont décrite et analysée avec plus de simplicité.

Etsurtout, comment se fait-il que leurs ouvrages, conçus au milieu d'unecivilisation si différente de la nôtre, aient pu survivre à tant de révolutionsdans la politique, la religion, les moeurs, les formes mêmes de l'art ? Comment? si ce n'est par ce qu'elles contiennent de vraiment universel et deréellement humain? A leur école, donc, nous apprendrons comment on distingue l'homme sous les individus, et nosouvrages mériteront à leur tour de vivre dans la postérité.. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles