Le travail est-il contrainte ou libération ?

Si le travail est source de développement des facultés humaines, il peut être considéré comme une valeur morale éminemment positive. Dans la tradition chrétienne, le travail attribué à l'homme, en punition de sa faute originelle, devient aussi le moyen de son rachat. Max Weber a souligné combien certaines formes de protestantisme ont contribué à l'essor du capitalisme par leur éthique austère, fondée sur l'idée que le travail est l'unique moyen de plaire à Dieu. De plus, la réussite dans son activité prouve que l'on a été élu par lui. Les philosophies personnalistes reconnaissent aussi le travail comme un facteur constitutif de l'homme et insistent sur le « sentiment de participation non pas à une solidarité abstraite et utilitaire, mais à un service et un compagnonnage « (E. Mounier). Ils notent cependant que cette valeur n'est pas actualisée dans les formes modernes du travail, trop souvent asservies à des impératifs de profit et de rendement. Ils rejoignent sur ce point, quoique par des voies très différentes, la vision de Marx, pour qui le mode de production capitaliste dépossède l'ouvrier de son travail et le rend dépendant, dans le mode de production, de celui qui détient le capital et les moyens de production. Plus profondément, Marx considère que le travail humain n'est pas libre, parce qu'il reste soumis à la nécessité, il répond à un besoin subi et non à une activité décidée volontairement. C'est pourquoi : « Le règne de la liberté ne commence, en réalité, que là où cesse le travail imposé par le besoin et la nécessité extérieure. « La communauté se doit donc, si elle a en vue le bien-être de tous, d'organiser la production sur les bases les plus rationnelles et les plus équitables possibles, en fonction du degré de développement des forces productives. Tel est le sens de la société nouvelle que Marx propose d'instaurer, au-delà du capitalisme, qui consacre encore un régime d'exploitation.