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VAN DER GOES

Publié le 24/06/2012

Extrait du document

Le maître se révèle, dans le tableau du Musée de Bruges comme dans ses autres oeuvres, un analyste incisif de la ferveur religieuse, un psychologue raffiné qui note avec précision les incidences troublantes de ces émotions sur les êtres humains: ils semblent parfois en perdre la raison ou, au moins, connaître l'anxiété et l'agitation, tandis que d'autres atteignent à un état de sérénité pacifiante. L'ascèse a chassé la moindre inquiétude chez l'Homme en prière et chez le Moine méditant, du Musée métropolitain de New-York; ce sont des âmes qui vibrent dans la lumière d'une vérité sereine et animent sobrement une effigie charnelle.

« au pied de la croix dans la tragique Crucifixion du Musée Carrer à Venise.

La composition est prenante: l'artiste lui insuffle un caractère familier, le spectateur est proche des personnages qui la peuplent, il communie pleinement avec les acteurs du drame; d'ailleurs, les plans de cons­ truction de l'œuvre lui facilitent cette pénétration: Marie et les apôtres se situent suivant une perspective qui creuse l'espace et mène au fond de la chambre mortuaire, là où aboutit un autre plan, celui sur lequel s'inscrit l'apparition du Christ, prêt à remonter aux cieux avec la coré­ demptrice.

Le vieux thème de la dormition de la Vierge s'est donc totalement renouvelé grâce à l'imagination créatrice de Van der Goes.

Le maître se révèle, dans le tableau du Musée de Bruges comme dans ses autres œuvres, un analyste incisif de la ferveur religieuse, un psychologue raffiné qui note avec précision les incidences troublantes de ces émotions sur les êtres humains: ils semblent parfois en perdre la raison ou, au moins, connaître l'anxiété et l'agitation, tandis que d'autres atteignent à un état de sérénité pacifiante.

L'ascèse a chassé la moindre inquiétude chez l'Homm~ en prière et chez le Moine méditant, du Musée métropolitain de New- York; ce sont des âmes qui vibrent dans la lumière d'une vérité sereine et animent sobrement une effigie charnelle.

Hugo Van der Goes aspira à cet état, il ne l'atteignit que rarement; en 1481, au retour d'un voyage à Cologne, il sombra même dans un profond déséquilibre.

Son compagnon de no­ viciat a décrit le mal de son confrère dans un document poignant qui fait participer aux angoisses et aux dépressions de l'artiste scrupuleux, du religieux inquiet.

Aussi bien, dans les personnages aux traits ravagés, aux yeux hagards, aux cheveux désordonnés, aux gestes hésitants, aux atti­ tudes lasses qui apparaissent dans son œuvre, pouvons-nous voir autant d'essais d'introspection du maître génial, de ce supersensible que l'effroi et l'agitation obsèdent sans cesse.

Il s'apaise cependant, à l'occasion, car son œil et son esprit se reposent à considérer la lumière éblouissante qui baigne un paysage, les bleus intenses et frais qu'il éparpille sur tous ses panneaux.

Autant de notes qui rapprochent le peintre du Rouge-Cloître de Vincent Van Gogh.

Celui-ci succombera à cause de ses outrances et de sa fougue, tandis que son ancêtre du XVe siècle s'épuisera par sa concentration angoissée.

Hugo Van der Goes compte parmi les plus grands peintres flamands du XVe siècle.

Ses contemporains et les générations suivantes ont reconnu ses caractères exceptionnels: concep­ tion et composition renouvelées des thèmes religieux, création originale de types populaires, analyse subtile de tout un secteur intime du comportement humain, prédilection pour un coloris clair et étincelant, découverte du jeu de l'ombre et de la lumière animant la nature, enfin intro­ ·duction du mouvement dans ses scènes.

Les miniaturistes ganto-brugeois du dernier tiers du siècle se sont mis volontiers à son école.

Sander Bening est le mieux doué des enlumineurs formés à son contact, tandis que le maître de Moulins est le plus brillant peintre étranger issu de son atelier.

Vasari cite le Retable Portinari comme une œuvre de grande qualité, les peintres italiens l'étudièrent d'ailleurs et Ghirlandajo répète plusieurs de ses formes vigoureuses dans son Adoration des bergers de la Trinité à Florence.

On a noté, avec raison, combien les merveilleuses audaces chromatiques de Van der Goes ont frappé Grünewald, cet autre visionnaire troublant.

JACQUES LAV ALLEYE Professeur à l' Universitl Louvain 73. »

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