Devoir de Philosophie

Qu'est-ce que la vérité ?

Publié le 27/02/2005

Extrait du document

- 3° Enfin, à supposer qu'elle soit possible, une telle intuition nous ferait vivre la vérité plutôt qu'elle ne nous la ferait connaître : « Une vérité, écrit BERGSON, n'est pleinement comprise que si elle est vécue. Vivre une vérité consiste à en faire un objet de vie intérieure auquel on croit, dont on se nourrit, que l'on pratique et que l'on aime au point d'unifier en lui toute son âme : est vrai définitivement ce qui résiste à l'épreuve d'une telle vie. » Or, il importe de maintenir une différence essentielle entre vivre une pensée et connaître son objet. V. Conclusion. De ces différentes interprétations nous pouvons cependant retenir certaines indications qui nous fourniront les éléments d'une solution. A. - Si le vrai ne doit pas être confondu avec le réel, il ne saurait cependant en être totalement dissocié. Le tort de la conception dogmatique et réaliste a été, non pas d'affirmer leur correspondance, mais surtout de méconnaître le rôle du sujet dans l'oeuvre de la connaissance. B.

« IV.

La vérité selon Bergson. BERGSON accepte pour une large part la théorie de W.

JAMES.

Il le loue d'avoirrejeté la conception de la vérité-copie, de n'avoir pas admis que « la véritéserait déposée dans les choses et dans les faits ».

Avec lui, il déclare que « lavérité d'ordre intellectuel est une invention humaine qui a pour effet d'utiliser laréalité plutôt que de nous introduire en elle » (La Pensée et le mouvant, p.

276-279).

Mais, au-delà de cette « vérité rationnelle, intégralement maniable, queses lois d'origine et de genèse condamnent inéluctablement à la contingence età la relativité » (Revue de Métaphysique, 1899, p.

562), BERGSON admet unmode de connaissance qui nous permet de « posséder une réalité absolument aulieu de connaître relativement » (Ouv.

cité, p.

206).

Ce mode de connaissance,c'est, selon lui, l'intuition, c'est-à-dire cette « sympathie » par laquelle on setransporte à l'intérieur de l'objet, on « s'installe en » lui, on « coïncide avec » lui.Car l'intuition n'est rien d'autre que « l'instinct devenu désintéressé, conscientde lui-même, capable de réfléchir sur son objet ».

Or « c'est sur la forme mêmede la vie qu'est moulé l'instinct » (L'Évol.

créatrice, p.

179 et 192).

L'intuitionest donc le vrai moyen de ressaisir « par la conscience l'élan de vie qui est ennous », de coïncider avec cette réalité qui est elle-même mobilité et vie {LaPensée et le mouvant, p.

36 et 238).

— Mais la théorie bergsonienne soulèvebien des objections.—1 ° En ce qui concerne le rôle de l'intelligence, toutescelles que nous avons adressées au Pragmatisme pourraient être reprises ici.

a) « Toute vérité, écrit BERGSON lui-même (Ouv.

cité, p.

278) commentant W.

JAMES, est une route tracée à travers la réalité; mais, parmi ces routes,il en est auxquelles nous aurions pu donner une direction très différente si notre attention s'était orientée dans unsens différent ou si nous avions visé un autre genre d'utilité.

» C'est bien là l' « amorphisme de la vérité » quedénonçait DURKHEIM dans le Pragmatisme, b) Au reste, n'est-ce pas, comme l'a écrit Maurice BLONDEL, « intervertirles valeurs » que de réduire l'intelligence « à la tâche subalterne de manipulatrice de la matière, de fabricanted'outils » et méconnaître son rôle spéculatif ? — 2° La nature même de l'intuition bergsonienne demeureextrêmement vague, d'autant plus que, comme le remarque encore BLONDEL, elle « ne se réalise pleinement pournous présentement dans aucun domaine ».

Ainsi que l'a dit aussi A.

DARBON, « l'immédiat que nous pouvonsatteindre n'est jamais un véritable immédiat ».

— 3° Enfin, à supposer qu'elle soit possible, une telle intuition nousferait vivre la vérité plutôt qu'elle ne nous la ferait connaître : « Une vérité, écrit BERGSON, n'est pleinementcomprise que si elle est vécue.

Vivre une vérité consiste à en faire un objet de vie intérieure auquel on croit, donton se nourrit, que l'on pratique et que l'on aime au point d'unifier en lui toute son âme : est vrai définitivement cequi résiste à l'épreuve d'une telle vie.

» Or, il importe de maintenir une différence essentielle entre vivre une penséeet connaître son objet. V.

Conclusion. De ces différentes interprétations nous pouvons cependant retenir certaines indications qui nous fourniront leséléments d'une solution.A.

— Si le vrai ne doit pas être confondu avec le réel, il ne saurait cependant en être totalement dissocié.

Le tortde la conception dogmatique et réaliste a été, non pas d'affirmer leur correspondance, mais surtout de méconnaîtrele rôle du sujet dans l'oeuvre de la connaissance.B.

— L'avantage du Kantisme est justement de nous rappeler ce rôle et, par suite, celui de l'activité de l'esprit.

Levrai n'est pas un décalque de l'objet : le rapport sujet-objet y demeure fondamental.C.

— En ce sens, il est exact de dire avec le Pragmatisme que la vérité se fait, s'élabore, que l'esprit la crée, en uncertain sens.

Mais cela ne signifie nullement qu'elle soit arbitraire ni subordonnée à nos besoins.

Il faut maintenir,contre le Pragmatisme, un certain contact du vrai avec le réel.D.

— II s'en faut en effet que le rôle du sujet dans la connaissance entache irrémédiablement celle-ci desubjectivité.

Comme l'ont rappelé R.

BLANCHE, G.

BACHELARD, etc., il ne s'agit pas ici du sujet individuel ni du sujet« en situation », c'est-à-dire englobé dans l'intersubjectivité du groupe ou de l'espèce.

Il s'agit du sujetconnaissant, du « sujet quelconque », c'est-à-dire du « sujet rationnel » (BACHELARD) — on pourrait dire, avecHUSSERL, de l' « ego transcendantal », déjà tourné vers le monde, puisqu'il n'est pas de conscience qui ne soitconscience de quelque objet.E.

— La vérité apparaît ainsi comme le résultat de cet effort du sujet connaissant pour se libérer des attaches dumoi empirique, d'un effort vers l'objectivité et l'universalité.

Il s'agit donc de « la constitution progressive d'un réelobjectif, en corrélation avec celle d'une connaissance intellectuelle » (R.

BLANCHE), d'une approximation incessantequi tend vers l'objectivité parfaite comme vers une limite.F.

— Cette approximation doit satisfaire à deux séries de conditions qui répondent elles-mêmes à la double exigence: 1° du sujet connaissant, c'est-à-dire rationnel; 2° de l'objet.

Les premières sont des conditions formelles, qui seramènent à l'exigence de cohérence interne, d'accord de la pensée avec elle-même (logique pure).

Les secondessont des conditions matérielles, qui se traduisent par l'obligation du contrôle incessant de la pensée à l'épreuve duréel, comme il arrive dans la connaissance expérimentale.G.

— Une telle vérité est évidemment une vérité construite, non une vérité intuitivement saisie.

L'instrument decette construction est le concept : et ceci s'applique aussi bien à la vérité obtenue par induction, à la véritéexpérimentale (qui est une conceptualisation du réel) qu'à celle que nous construisons par déduction comme enmathématiques.

Or, le concept, c'est, a dit V.

BROCHARD, « ce que l'esprit substitue aux choses pour les rendreintelligibles ».

En ce sens, « la pensée suit une marche progressive vers l'intelligible » (GOBLOT, Système des. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles