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La vitesse n'a-t-elle apporté que des inconvénients à notre civilisation ?

Publié le 29/03/2004

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Mais ce progrès de la vitesse n'est pas les hommes seulement néfaste aux objets matériels, il porte atteinte aussi directement aux personnes. Le rythme de la circulation dans les villes ou sur les grandes routes est devenu hallucinant. La cadence imposée aux actes des travailleurs est elle-même très souvent inhumaine. Verhaeren a décrit cet aspect nouveau des foules dans Les Campagnes Hallucinées : « La rue - et ses remous comme des câbles Noués autour des monuments - Fuit et revient en longs enlacements Et ses foules inextricables Les mains folles, les pas fiévreux, La haine aux yeux Happent des dents le temps qui les devance. » Ne voit-on pas se développer, comme un corollaire de cette nouvelle condition imposée aux hommes, de véritables maladies de la vitesse prenant la forme de névroses obsessionnelles ? Le cinéma et de nombreux romans se font le reflet de cette fascination exercée par la vitesse sur nos contemporains. N'est-ce pas aussi l'une des causes principales des accidents de la route, nouveau fléau de notre temps ?  Toute notre vie se trouve ainsi de plus en plus orientée vers la productivité, le « rendement », l'efficacité des mouvements. C'est ce qu'Alain nommait « la stupidité diligente des abeilles ». II y a de moins en moins de place dans notre existence pour la poésie, la détente dans le calme de la nature.

« « Et vous, grandes glaces à travers lesquelles j'ai vu passer la Sibérie et les Monts du Samnium,La Castille âpre et sans rieurs, la mer de Marmara sous lapluie tiède !Prêtez-moi, ô Orient Express, Sud Brenner-Bahn, prêtez-moiVos miraculeux bruits sourds...

» La vitesse dans la production des objets matériels n'accroît-elle pas aussi le bien-être de l'humanité en permettanttoujours à un plus grand nombre d'hommes de les utiliser ? Grâce à cela nous pouvons espérer vaincre un jour lafamine et la misère dans toutes les régions du globe.

Les économistes modernes savent que la consommation accruedes produits est le meilleur moteur de l'activité industrielle et commerciale d'une nation.Il existe par ailleurs un authentique plaisir de la vitesse que nos ancêtres ne pouvaient qu'ignorer.

On peut aimer lesimpressions ressenties dans un véhicule très rapide sans être pour autant un « névrosé ».

Dans La Prose duTranssibérien Biaise Cendrars a décrit l'attrait d'un paysage vu d'un train lancé à toute allure : « Toutes les gareslézardées, obliques sur la route, Les fils téléphoniques auxquels elles pendent Les poteaux grimaçants qui gesticulentet les étranglent Le monde s'étire, s'allonge et se retire comme un harmonica qu'une main sadique tourmente ».Loin de nous empêcher de goûter les d'accroître les loisirs beautés de la nature, cet accroissement du rythme denotre vie permet aussi de nous libérer davantage.

Le temps des loisirs devient plus important pour le commun desmortels qui peut désormais goûter chaque année une détente réelle pendant plusieurs semaines.

Les conditionsinhumaines de travail décrites dans les romans de Zola nous paraissent de plus en plus révolues. III.

UNE ADAPTATION NÉCESSAIRE L'inquiétude exprimée par Alain n'était donc pas entièrement fondée.

Il est cependant certain que ce nouveauvisage de notre existence présente des risques pour l'humanité.L'apparition de la vitesse dans les divers secteurs de notre activité s'est faite d'une manière trop soudaine.

Le XIXesiècle a vu se succéder en un intervalle de quelques années des inventions très importantes par leurs conséquences: la machine à vapeur, le moteur à explosion, l'aviation, les applications industrielles de l'électricité.

Vigny traduisaitcette impression de brutalité par un symbole expressif :« Sur le taureau de fer qui fume, souffle et beugle, L'homme a monté trop tôt .

»Les générations qui nous ont précédés et ses conséquences ont connu devant ces bouleversements une ivressevéritable qui les a parfois conduites à certains excès.

A quoi bon accroître la vitesse des machines si toute une partde la main-d'oeuvre doit en échange être transformée elle-même en « bête humaine » ? Les responsables actuels dutravail industriel doivent se garder de telles erreurs et l'on convient de plus en plus qu'il est nécessaire d'humaniserle monde des usines.D'autre part, notre univers du XXe siècle ne peut plus être pensé selon les normes du passé.

La vitesse a modifié lesrelations entre les êtres humains et le réel.

Ne vaut-il pas mieux s'adapter à ces conditions nouvelles ? Mais unetelle adaptation nous impose une discipline personnelle, un effort constant pour garder la préoccupation du servicedes hommes, en dehors duquel tout progrès demeurera vain.

C'est l'un des messages de Saint-Exupéry qui sutparticiper à la conquête de l'air sans perdre jamais de vue sa responsabilité d'homme.

« L'avion n'est pas un but,écrivait-il, c'est un outil comme la charrue.

» CONCLUSION La sagesse moderne ne consiste donc pas à rejeter la vitesse, mais bien plutôt à la maîtriser, à la fairevéritablement nôtre en l'adaptant aux exigences des hommes.

Ainsi, loin de nous appauvrir, elle nous aura donnéune dimension nouvelle ; loin de nous abrutir, elle rendra notre vie plus savoureuse.. »

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