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(Seconds Analytiques) - Aristote - Commentaire

Publié le 23/03/2015

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aristote

Il est clair que nous n'avons pas une connaissance innée des principes, et que, sans aucune connaissance ni disposition stable de notre part, ceux-ci ne peuvent pas davantage nous advenir. Il est donc nécessaire que nous possédions quelque capacité de les acquérir, sans toutefois que cette capacité soit supérieure en exacti­tude à la connaissance des principes. Or, il est manifeste qu'il en va ainsi pour tous les animaux. Ils possèdent, en effet, une puissance innée de discrimination, celle que nous appelons la sensation [...j.

De la sensation provient donc ce que nous nommons le souvenir, et du souvenir d'une même chose, répété à plusieurs reprises, provient l'expérience, car une multiplicité de souvenirs en nombre fait une seule expérience. Et de même, de l'expérience — c'est-à-dire de la généralité reposant tout entière dans l'âme, de l'unité distincte de la multiplicité, qui se trouve une et identique dans tous les cas particuliers — provient le principe de l'art et de la science : celui de l'art, pour ce qui concerne la production [de quelque chose] ; celui de la science, pour ce qui concerne [la considération de] ce qui est. Pour ces raisons donc, ces dispositions stables ne sont pas davantage prédéterminées en nous qu'elles ne proviennent d'autres dispositions plus connues ; elles proviennent, en revanche, de la sensation, comme si dans une bataille, au cours de la débâcle, un soldat s'arrêtant, un autre s'arrêtait, puis un autre, jusqu'à ce que l'ordre soit reconstitué. Eh bien ! l'âme est constituée d'une manière telle qu'elle peut éprouver cela [...]. En effet, lorsque s'arrête dans l'âme l'un des [traits spécifiques] indifférenciés, un premier universel advient en elle (car, même si l'acte de sentir se rapporte à de l'individué, la sensation est sensation de l'universel : elle l'est, par exemple, de l'homme, et non de l'homme-Callias).

(Seconds Analytiques)

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« Textes commentés 41 Les principes ne sont pas connus par démonstration, sinon ils ne seraient pas principes du savoir; de plus, l'hypothèse commode de l'innéisme est «absurde» (atopon, 99 b 26), car elle rend cette fois l'ignorance incompréhensible.

Reste donc, si l'on n'entend pas réifier les principes en Idées séparées, à admettre que la sensation elle-même constitue « une puissance innée de discrimination » qui nous rend capables d'accéder aux principes.

Les nuances sont ici essentielles: la sensation est une «puissance» ou une «capacité» (dunamis) qui nous met en route vers les principes, mais elle n'est pas leur connaissance en acte.

En effet, comme le Texte 1 nous l'a appris, en unifiant« une multi­ plicité de souvenirs» l'expérience sensible ne s'élève pas réellement au­ dessus de la particularité, puisque l'objet de cette expérience n'est jamais un universel.

Et pourtant, Aristote écrit aussi que la sensation est «sensation de l'universel (aisthèsis tou katholou) » ! Pour lever l'équi­ voque, il suffit de comprendre que l'unité de l'universel réside en puissance dans la multiplicité sensible, comme « une et identique dans tous les cas particuliers».

Ainsi, «l'homme», qui n'est aucun être humain particulier, «repose tout entier», mais in nuce, dans la vision de Callias : il y reste en attente d'un travail d'unification des traits spéci­ fiques ( « indifférenciés » dans l'acte perceptif, car « l' homme-Callias » est une sorte d'indiscernable) qui relient Callias, Socrate, etc.

Ce travail est une «induction» (epagôgè) allant du multiple vers l'unité de l'universel ; comme si, devant la profusion sensible, notre capacité à saisir des généralités synthétiques mettait peu à peu fin à une « débâcle ».

Dieu peut bien être le « stratège» de l'ordre parfait du Ciel (cf.

Métaph.

A, 10, 1 075 a 11-25), nous qui avons affaire au monde sublunaire imparfait, nous ne le comprenons souvent que «d'une manière vague et obscure, semblables aux soldats mal exercés dans les combats» (A, 4, 985 a 13-14).

C'est ainsi que nous marchons vers les principes les plus universels, en arrêtant l'une après l'autre les débâcles.

Mais la reconstitution finale de «l'ordre» (hè arkhè) sera le fait de l'intellect (nous).. »

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