AGNÈS de Molière l’École des Femmes
Publié le 07/10/2017
Extrait du document
«
CONSCIENCE
MORALE.
-THÈSES
181
Va-t-on pour autant dissocier une • conscience esthétique » de la
conscience proprement dite ? - Non.
Mais la dissociation, tradition
nellement, s'opère quand il s'agit des jugements de valeur portés
non plus sur le laid, le beau ou le médiocre, mais sur le bien et le mal.
Il.
-NATURE DE LA CONSCIENCE MORALE.
Les jugements de valeur dont l'ensemble représente ce qu'il est
convenu d'appeler la «conscience morale », d'où proviennent -ils ?
Avant de présenter les diverses thèses, une première remarque
s'i mpose : comme nous le verrons au chapitre suivant, l'Antiquité
païenne , identifiant la sagesse et la recherche intelligente du bonheur,
n'a pas eu l'idée du devoir.
Cette idée est liée à la conception chrétienne,
à la croyance au Jugement Dernier.
Pour que ce Jugement ait sa
signification logique, il faut admettre que tout humain possède la
facu lté de discerner le bien du mal, en même temps qu'une puissance
immanente de suivre les prescriptions indiquées par cette « fa culté ».
Nous avons là, par conséquent, une affirmation dogmatique que nous
pouvons considérer comme une première thèse : la thèse innéiste ou
nativiste de la conscience morale.
Elle est class ique, et se présente, chez
de nombreux auteurs, sous la forme très nette (et non pas seulement
métaphorique) d'une dualité de la personne humaine.
Ils voient
en la conscience morale (cf.
Gusdorf, lect., p.
114) «une sorte de
dédoublement de la personnalité, doué d'un privilège de juridiction ( ...
).
Le sens commun identifie la voix de la conscience avec la voix de Dieu ..
.
On parle du tribunal de la conscience ...
Ce dédoublement est d'ordi
naire mis en forme métaphysique ou théologique "··.
L'apostrophe
de J.-J.
Rousseau dans l'Émile sur «l'instinct divin», l'• immort elle
et céleste voix • ne fait que traduire avec lyrisme cette conception
traditionnel le.
Allons-nous la discuter ? Non.
Cela reviendrait à discuter la foi
sur laquelle se fonde 1 'affirmation de 1 'innéité.
En vain protesterait-on
que cette affirmat ion implique que la même connaissance du bien et
du mal se devrait retrouver identique à elle-m ême à travers la diversité
des époques, des pays, des milieux, alors qu'en fait les mœurs les
plus contradictoires s'y rencontrent : ce , qui paraît abominable ou
monstrueux à notre conscien ce paraît (ou a paru) normal en d'autres
temps, en d'autres lieux, en d'a utres civilisations, en d'a utres milieux ...
Admettons, comme nous 1 'avons fait pour la thèse de la « raison innée »,
que la conscience morale universelle existe « en puissance • chez tout
humain, et passons à d' autres exposés .
zo La thèse dite intellectuali ste, représentée par KANT, diffère-t-elle
essentiellement de la précédente ? Nous ne le pensons pas, et voici
pourquoi : Kant donne à ce que nous appelons la Conscience morale
le nom de «raison pratique • ; la conscience morale, c'est la raison
régissant l'action, c'est «le jugement porté par l'homme intelligible.
»
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