Découvrant pour la première fois la beauté d'un paysage, par exemple d'une côté rocheuse ou d'un massif montagneux, la réaction la plus habituelle d'un individu est sans doute de rester muet, d'admiration ou de stupéfaction, comme il pourra le dire lui même. C'est que ce qu'il a devant lui le surprend plus ou moins violemment, lui "coupe le souffle", parce qu'il ne "s'attendait pas à ça". La première visite d'un musée, si l'on parvient à en retrouver l'ambiance, produit peut-être le même effet: les oeuvres que l'on y découvre surprennent, on n'avait pas prévu de telles rencontres avec différents univers; il y a là en quelques sortes, trop de formes, trop de couleurs, trop de maîtrise, trop parfois, de beauté évidente... Ces premières impressions sont-elles destinées à se répéter, ou à disparaître? le beau est-il toujours surprenant?
Cette oeuvre illustre fort bien la théorie, en gros husserlienne, selon laquelle l'objet esthétique ne s'accomplit vraiment, le temps d'un regard ou d'une audition, que dans la perception qu'elle sollicite. Si elle est précaire, inachevée, ouverte, c'est pour mieux requérir la perception active d'un spectateur qui doit être un peu un exécutant, presque un virtuose, autant qu'un juge. Et en effet, si le public a d'abord été - est encore souvent - déconcerté par cette négation scandaleuse de l'oeuvre, il en est venu à l'admettre et à l'attendre : il veut entrer dans le jeu, il veut être de la fête. La fête : c'est bien l'un des pôles qui aimante l'art contemporain et sa contestation de l'oeuvre. Avec l'art cinétique, avec la musique stochastique, avec certains films d'animation, l'oeuvre devient événement. Sans doute l'était-elle déjà, en un sens, dans les arts temporels, là où l'objet esthétique ne s'accomplit que le temps d'une exécution. Mais les oeuvres plastiques semblent aussi renoncer à la substantialité et à la pérennité de l'objet pour ne durer que le temps d'une expansion «, d'une scintillation, d'un jeu ; cela est même vrai de l'objet architectural, lorsque l'habitat peut être indéfiniment modifié au gré de l'occupant. L'artiste rêve d'inscrire cet événement dans la vie quotidienne, pour y introduire de la fantaisie et du bonheur : la fête, certains disent la révolution. Et sans doute la notion de fête est-elle ambiguë : cérémonie - le premier des arts, disait Alain - ou orgie ? Apollon ou Dionysos ?
Etat de satisfaction parfaite, de contentement du corps, du cœur et de l'esprit.
L'idée selon laquelle tout serait écrit, déterminé à l'avance, a conduit à ce que les Anciens ont appelé l'argument paresseux. Cet argument consiste à penser que si tout est décidé à l'avance, il est inutile que je cherche à bien faire, puisqu'il arrivera de toute façon ce qui doit arriver.
Le mot dérive du latin universus, qui signifie "tout entier". Lorsqu'il désigne les planètes, les étoiles, les galaxies, l'étendue cosmique, il prend une majuscule. Il s'agit de bien distinguer ce sens astronomique du sens usuel. Parler d'une vérité "universelle" ne signifie pas que l'on se réfère à l'infini cosmique. Universel, en ce sens, désigne ce qui est vrai pour toute l'humanité.
Dieu de la vérité, Apollon incarne la lumière et l'harnomie, expressions de l'idéal. Nietzsche a vu dans la vénération d'Apollon un signe de fuite et, par extension, de dédacence. D'où son intérêt pour Dionysos, plus sombre, mais plus réel.