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TONTON BLUES, PAPA GOSPEL ET BÉBÉ ROCK de 1950 à 1959 : Histoire

Publié le 13/12/2018

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TONTON BLUES, PAPA GOSPEL ET BÉBÉ ROCK

 

L’Amérique se cherche désespérément une histoire et des racines; mais, le plus souvent, le mythe y précède la reconnaissance des faits. Ainsi, plus de trente ans après la conclusion du phénomène rock’n’roll (1951-1958), musiciens et musicologues, historiens et sociologues commencent à peine d’en restituer les grandes phases, d’y dénouer l’écheveau des influences, et d'en reconnaître les vrais pionniers. Alors que l’histoire du jazz s’est écrite, sinon au jour le jour, du moins avec très peu de décalage, celle du rock ne s’est vraiment clarifiée qu’au cours des années quatre-vingt. Il fallait pour cela en finir avec deux légendes tenaces et contradictoires: la première, que l’on pourrait dire «héroïque», faisait d’Elvis Presley l’initiateur d’un phénomène dont il n’a été en fait que le catalyseur assez tardif (1954) ; la seconde, «folkloriste» ou «ethnologique», faisait du rock’n’roll une invention exclusivement noire, adaptée et commercialisée pour les Blancs par des Blancs (principalement des juifs, toujours selon la mythologie).

 

En fait, s’il fallait nommer la «vraie couleur» du rock, ce serait le vert: «Rien ne rapproche plus un Blanc et un Noir, un jeune et un vieux, un paysan et un citadin, qu’un dollar placé entre les deux», note avec humour le critique Nick Tosches. Et si cette chasse au dollar a toujours été sous-jacente dans la musique populaire américaine, c’est avec l’essor du rock’n’roll qu’elle s’affiche sans pudeur jusque dans les paroles des chansons qui célèbrent le culte de la Cadillac plus encore que celui de la femme.

 

C’est pourtant le sous-entendu sexuel qui est à l’origine de l’expression «rock and roll» vite contractée en «rock’n’roll»: dans l’argot afro-américain, «rock» (balancer, bercer, secouer) est (comme d’ailleurs «swing» et même «jazz») le synonyme transparent de «fuck»; «roll» pouvant se traduire par «batifoler». 

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« TONTON BLUES ...

Jerry Lee Lewis lors d'une tournée européenne, à la fin des années cinquante.

© Rancurel.

TONTON BLUES ...

Bill Haley et ses CcmetS e11 1958.

Ils ont créé Rock around the Clock en avril /954.

© Rancurel.

TONTON BLUES ..

.

Gene Vincent.

© Rancurel invention exclusivement noire, adaptée et commercialisée pour les Blancs par des Blancs (principalement des juifs, toujours selon la mythologie).

En fait, s'il fallait nommer la «vraie couleur» du rock, ce serait le vert: «Rien ne rapproche plus un Blanc et un Noir, un jeune et un vieux, un paysan et un citadin, qu'un dollar placé entre les deux», note avec humour le critique Nick Tosches.

Et si cette chasse au dollar a toujours été sous-jacente dans la musique populaire améri­ caine, c'est avec l'essor du rock'n'roll qu'elle s'affiche sans pudeur jusque dans les paroles des chansons qui célèbrent le culte de la Cadillac plus encore que celui de la femme.

C'est pourtant le sous-entendu sexuel qui est à l'origine de l'expression «rock and roll» vite contractée en «rock'n'roll»: dans l'argot afro-américain, «rock» (balancer, bercer, secouer) est (comme d'ailleurs «Swing>> et même «jazz,.) le synonyme transparent de «fuck»; «rOll» pouvant se traduire par «batifoler».

Si l'on s'en tient à la terminologie, le «rock» en tant que métaphore musicale de l'acte sexuel remonte à 1922, quand Trixie Smith, la chanteuse de blues, enregistre My Daddy Rocks me with on Steady Roll; et quand, en 1931, Duke Ellington publie son Rockin' in Rhythm, le mot a défini­ tivement acquis son double sens qui assimile la danse à l'acte sexuel sans pour autant le nommer.

Et c'est en 1934 (alors que Gladys Presley est enceinte du fqtur Aaron Elvis) que les pétulantes Boswell Sisters chantent Rock and Roll...

LEs MÉTAMORPHOSES DU RHYTHM'N'BLUES C'est en 1949 que le magazine Billboard, bible bimensuelle du monde du spectacle anglo-saxon, rebaptise sa rubrique consacrée à la musique populaire noire: le péjoratif Race Mus i c (•musique de nègre», pour ainsi dire) cède la place à Rhythm'n'Biues.

Ce terme désigne alors un genre en pleine expansion: une forme de jazz le plus souvent vocal, rendu plus accessi ble par l'accentuation du rythme binaire, des syncopes moins systématiques, le marquage du premier et du troisième temps, des solos instrumentaux plus brefs et incisifs, et surtout des «riffs» (phrases orchestrales} répétitifs et obsessionnels généralement joués crescendo.

Les musiciens de «rhythm'n'blues» sont souvent aussi d'excellents instrumentistes (pianistes, saxopho­ nistes et de plus en plus guitaristes') accompagnés de ces «small combas» (petites formations de moins de dix musiciens) qui profitent du déclin irréversible des big bands depuis 1942.

1942, on s'en souvient, fut l'année de la grève historique de I'American Federation of Musicians: une grève dirigée contre «la menace de la musique mécanique», qui dura plus d'un an et «SOnna» littéralement les trois grandes maisons de disques américaines (CBS, RCA-Victor et Decea), mais profita aux réfractaires: la nouvelle firme Liberty-Capital qui lança le grand chanteur-pianiste Nat King Cole et dont la première production -le Cow Cow Boogie de la chanteuse Ella Mea Morse -est un peu considérée comme la «première pierre» du rock'n'roll préhistorique; et aussi une multitude de petits labels indépendants (les «indics») regroupés au sein de la Fédération BMI et dont beaucoup, quoique dirigés par des Blancs, produisent surtout des musiciens noirs.

Certains d'entre eux vont devenir les premières vedettes du rock'n'roll noir originel: les «blues shouters» (crieurs) Big Joe Turner et Wynonie Harris, les pianistes-chanteurs Charles Brown, Cecil Gant et Amos Milburn, et surtout le saxophoniste alto et voca­ liste Louis Jordan, dont le style «jump» (bondissant} et fruste en fera l'antipode populaire d'un Charlie Parker.

Tous ces labels de rhythm'n'blues ont un rayon d'action local: Apollo, Atlantic et National à New York; Chess et Mercury à Chicago; King à Cincinnati; Aladdin, Imperial et Modern à Los Angeles; Nashboro à Nashville ...

et des dizaines d'autr�s constellent l'ensemble du territoire américain, à l'exception des Etats du Sud dont viennent pourtant bon nombre de musiciens, mais où la ségréga­ tion raciale exclut tout principe de collaboration entre producteurs blancs et orchestres noirs.

De toute façon, dans l'ensemble du pays, la diffusion des rhythm'n'blues va longtemps se faire au prix d'une gi­ gantesque escroquerie: celle des covers, ces versions édulcorées enre­ gistrées par des chanteurs blancs comme Pat Boone pour le compte des «major comparues».

C'est débarrassé de toute connotation sexuelle mais aussi en général de toute expressivité que le rock 'n'roll ainsi décoloré fait sa première entrée dans les juke-boxes.

Mais la brèche est ouverte.

Ce sont les stations de radios locales qui vont servir, souvent à contre-cœur, de haut-parleurs à cette ébullition musicale.

Les «dise­ jockeys,., moyennant un dessous-de-table quasiment systématique (le passage, la italo-américains dont la vogue s'est déve­ loppée dans les années quarante : Tony Bennett, Perry Como, Frankie Laine, Dean Martin et, bien sOr, Frank Sinatra, ce dernier se doublant d'un authentique virtuose du jazz vocal.

Virtuose, aucun ne le fut moins que Johnny Ray, mais ses soupirs et ses sanglots (mal} imités des chanteurs de blues lui gagnent dès 1951 un public survolté qui préfigure celui des grands rockers blancs.

Dans un tout autre registre, l'éphémère carrière de Hank Williams (de 1947 à 1953) cristallise l'évolution de nombreux chan­ teurs de «hillbillp (musique blanche d'origine rurale appelée depuis «COuntry & western,.) sous l'influence du boogie-woogie et du honky­ tonk hérités des pianistes noirs des années trente.. »

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