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L’acte volontaire. — Le développement de la volonté.

Publié le 12/11/2016

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III. — LE DÉSIR ET LA RAISON.

 

C’est généralement à Condillac (1715-1780) que l’on se réfère pour énoncer la théorie selon laquelle la volonté se ramènerait au désir. Un désir, qu’il nomme assez gauchement « désir absolu », c’est-à-dire un désir prédominant, prépondérant, voilà ce que serait la volonté.

 

D'autres auteurs plus récents, WuNDT, Rignano, ont, avec des nuances diverses, également vu dans la volonté un processus affectif. Pas d’acte volontaire sans état affectif : jusque dans la délibération, les représentations elles-mêmes seraient soumises à cette nécessité. On a un acte volitif, affirme Rignano, « toutes les fois qu’une tendance pour une fin à venir s’oppose victorieusement à une tendance pour une fin actuelle ».

 

Au fond, donc, la volonté « n’est pas autre chose qu’une tendance affective ». Cette tendance,. inhibant toutes les autres, détermine l’action.

 

A cette théorie, s’oppose celle qui ramène, au contraire, la volonté à la raison. « Il suffit de bien juger pour bien faire », dira Descartes, reprenant ainsi la célèbre formule socratique « Nul n’agit mal en pleine connaissance de cause » (la traduction traditionnelle « nul n’est méchant volontairement » est, nous semble-t-il, moins précise). Bref, volonté implique délibération, réflexion... et raison.

1. — VOLONTÉ ET VALEURS.

 

La notion de volonté paraît, à première vue, appartenir au seul domaine de la Psychologie. On ne remarque pas assez, en général, qu’elle suppose des jugements de valeur. Nous sommes d’autant plus fondés à insister sur ce point que notre Programme a précisément inscrit l'étude de la volonté au seuil de la Philosophie morale .

 

Rien de plus facile, au demeurant, que de relier cette nouvelle question à celle que nous ,venons d’examiner (Les tendances).

 

La vie sociale, la vie morale introduisent en nous, dès le plus jeune âge, une sorte de conflit intérieur. Il y a, plus ou moins fortement ressentie, une contradiction entre les tendances originelles et les devoirs que nous impose notre entourage. Sans cette lutte entre les impulsions et les obligations, l’idée même de volonté n’aurait plus de contenu. .

 

L’Animal (sauf quand il est dressé, domestiqué) n’obéit qu’à ses seuls instincts. Il peut, devant telles difficultés rencontrées, apporter à l’assouvissement de ses tendances instinctives une. grande énergie. Pourtant, aucun psychologue ne parlera, en ce cas, d’une « volonté ». Pour l’Homme, la volonté implique soit une résistance aux impulsions, aux désirs, soit une action qui n’est pas spontanément désirée.

 

Pourquoi donc cet effort, cette contrainte que nous nous imposons, sinon parce que telle « conduite » est jugée moralement préférable, selon une « échelle des valeurs ? »

« 168 PHILOSOPHIE MORALE exercée par les impératifs collectifs qui nous pénètrent.

Il y a, comme l'é crivait Em.

Durkheim, des manières d'agir, définies et spéciales, qui s' imposent à nous dans toutes les circonstances même importantes de la vie.

Le Droit et les mœurs fixent notre conduite ...

Alors , la décision, selon cette thèse, serait, à propr ement parler, obéissance.

• Obéissance consentie, si l'on veut », précise Ch.

Blondel, «mais néanmoins obéissan ce, puisque la conscience reçoit sa loi du dehors » ...

Le conflit dont nous parlions plus haut entre instincts et devoirs, cet auteur en conteste l'importance.

«Les tendances les plus profondes pèsent moins qu'on ne pourrait le croire, devant l'impératif collectif».

S:ms doute, pour la grande majorité des humains, la volonté est ainsi obéissance aux impératifs sociaux.

C'est le cas très banal de «c ette immense tourbe d'hommes • dont parle Péguy, «qui veulent par volontés toutes faites ''· Nous aurons à nous demanç!er, au cours de notre exposé, si le mot volonté convient bien pour désigner ce conf ormisme.

Il :n'y a pas que les héros ou les saints pour dépasser le niveau de l'obéissance.

Assurément, et H.

BERGSON le remarque (lect ., p.

rz), la société « trace à l'individu le programme de son exis­ tence quotidienne.

On ne peut vivre en famill e, exercer sa profèssion, vaquer aux mille soins de la vie journalière, faire ses emplettes, se promener dans la rue ou même rester chez soi, sans obéir à des pres­ criptions et se plier à des obligations.

Un choix s'impose à tout in.stant ; nous optons naturellement pour ce qui est conforme à la règl e.

C'est à peine si nous .en avons conscience » (etc.) ...

Les mêmes remarques vaudraient pour ce que nous avons vu au sujet de la Raison qui (au sens fort et précis) a relativement peu d'occasions de s'exercer dans le déroulement si fréquemment machinal de bien des existences individuelles.

Cependant, Ch.

Blondel soutient que « ces obéissances passives, ces volontés toutes faites, à peine personnelles, sont bel ,et bien des volontés », Peu .

importe, ajoute-t-il, que les concepts en lesquels s'exp riment les impératifs soient acceptés ·à l'aveugl ette, adoptés sans discussion.

Ils sont avant que nous ne soyons.

L'éducation les imprime en nous : nous pouvons nous donner l'illusion de )es faire surgir tout armés de notre propre conscience.

Mais ce n'est qu'une illusion.

"P our faire preuve de volonté, point n'est besoin que nous allions chercher en je ne sais quel for intérieur nos principes d'action » ...

Notre auteur admet simplement qu'une «élite • ne s'arrête pas là et ne se satisfait pas à si peu de frais.

Pour cette élite, la volonté n'est plus obéissance passive, même si elle est obéissance « à quelque chose qui dépasse l'individu ».

Eh bien, sans prétendre orgueilleusement faire partie de l'élite, mais sans renoncer du moins à nous efforcer de lui ressembler, nous persistons à penser que notre volonté dépasse la simple obéissance.

Pour mieux comprendre en quoi elle c-onsiste, nous allons considérer deux théories classiques : la théorie affectiviste et la théorie intellec­ tuali ste.

Leur confrontation nous fournira les éléments d'une conclusion.. »

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