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A quoi sert la vérité ?

Publié le 05/09/2004

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Ce texte de Kierkegaard est extrait de son Journal et nous livre, sur un mode biographique, la conception de la vérité que ce philosophe défend.La vérité qu'il cherche n'est pas cet ensemble de propositions qui visent à «l'objectivité«, c'est-à-dire qui s'affirment comme valables pour tous, quelle que soit la situation existentielle de chacun de ceux qui la reçoit. Au contraire, elle est pour lui fondamentalement subjective: «il s'agit de trouver une vérité qui en soit une pour moi«.« Subjectif « ne veut toutefois pas dire ici réductible à l'opinion. Il s'agit bien plutôt d'affirmer que chaque existence possède sa vérité propre, sa destination particulière, et que celle-ci ne peut être appliquée comme une loi générale, à tous les autres individus. Ce que sous-tend le propos de Kierkegaard concerne l'idée selon laquelle Dieu a choisi pour chacun d'entre nous une destination, un but propre que notre existence doit réaliser et qui constitue notre vérité.Ainsi le problème est de comprendre « ce que Dieu au fond veut que je fasse«.

 La vérité peut se définir, de façon simple, comme ce qui est le critère qui vrai et du faux, c’est-à-dire plus spécifiquement la vérité-correspondance donc l’accord entre l’idée et la chose. (Il y a aussi la vérité-cohérence mais elle sera moins porteuse pour le sujet et elle est sujette à de nombreuses contradiction). Pourtant la question ne porte pas directement sur la définition de la vérité mais bien sur l’utilité ou la valeur de la vérité, c’est-à-dire sa fécondité notamment pratique et théorique. En effet « servir « c’est être utile à. Radicalement, le sujet « à quoi sert la vérité ? « nous invite à nous interroger sur la nécessité ou le besoin de rechercher la vérité c’est-à-dire quels avantages nous pouvons en tirer dans le domaine de la technique ou plus simplement en vue de la vie de l’homme. Derrière cette question se pose aussi toute la critique du discours des sciences et notamment de la philosophie comme n’étant d’aucune utilité notamment pratique. En creux donc cela nous oblige à nous justifier aussi de cette volonté de vérité mais aussi à en rechercher les causes. D’une certaine manière il s’agit pour toute discipline scientifique d’une introspection ou plus simplement d’une remise en cause de sa légitimité et de ses fondements.

            Or si la vérité en tant que connaissance sert l’homme notamment dans sa compréhension du monde mais aussi dans sa maîtrise à travers la technique (1ère partie) mais quand bien même la vérité ne serait pas servile, c’est-à-dire subordonnée à autre chose qu’elle-même faisant alors de la vérité une valeur en soi, faudrait-il céder à cet « esprit utile « ou « pratique « (2nd partie) ; mais au fond s’il y a un certain étonnement face à cette question désarçonnante n’est pas aussi le signe que nous avons besoin de la vérité mais non pas tant en tant que connaissance mais bien comme croyance psychologique (3ème partie) ?

 

« capacité de modifier le monde qui nous entoure notamment par la technique et c'est bien en ce sens que l'on peutcomprendre cette injonction de Descartes dans le Discours de la méthode « il faut se rendre comme maître et possesseur de la nature ».

Cette formule si elle incarne bien la volonté et l'idéal d'un progrès notamment chez lesClassiques d'un progrès scientifique, et comme le note Bacon dans le Novum organum puisqu'il s'agit de « vaincre la nature ».

La vérité est donc au service de l'homme. Transition : Ainsi la vérité nous permet-elle de développer notre connaissance du monde et sa maîtrise.

Elle permet alors àl'homme de devenir de plus en plus et d'augmenter sa puissance d'agir en agissant sur le monde afin de le modifier etde le rendre plus adapté à sa nature.

Mais parler d'utilité de la vérité n'est pas la subordonner à autre chose qu'elle-même alors qu'elle est une valeur en soi intrinsèquement ? N'est-ce pas souscrire à une volonté de rentabilité dusavoir qui lui est extérieur ? II – Contre “l'esprit d'unité” : le paradoxe de la philosophie en tant que recherche de la vérité a) Mais effectivement, la question de la valeur de la Vérité est ici ordonnée à son utilité.

Le jugement oul'interrogation que nous propose le sujet est bien d'une certaine manière de savoir si la vérité est utile et si oui àquoi.

Pourtant, si la vérité est utile ce n'est que par ses effets, par les manières dont on s'en sert.

Ce que l'on veutdire c'est que la vérité en elle-même ne vaut que pour elle-même : elle est une valeur intrinsèque en soi.

Dès lorselle n'a pas à être jugée suivant son rendement ou son utilité.

La vérité manifeste une progression de l'esprit et laquestion de son utilité n'est vraiment que secondaire.

Et c'est bien en ce sens que l'on peut comprendre le tonpolémique de Bertrand Russell dans Problèmes de philosophie , dans le dernier chapitre de l'ouvrage, lorsqu'il dénonce notamment cet « esprit d'utilité » régnant et régentant tout.

Et cela d'autant plus que la philosophie si elleest une quête ou une recherche de la vérité peut donc se comprendre la prémisse nécessaire à l'accès à la véritéce qui pose le paradoxe alors du jugement bien connu selon lequel la philosophie ne servirait à rien.

C'est bien parceque l'« esprit d'utilité » impatient qu'il ne peut comprendre alors la véritable valeur de la vérité et de la philosophie. b) En effet Bertrand Russell dans Problèmes de philosophie nous dit bien : « Il sera profitable en conclusion, de considérer la valeur de la philosophie et les motifs qu'on peut avoir de l'étudier.

Il est d'autant plus nécessaire detraiter cette question que bien des hommes, sous l'influence de la science ou de la vie pratique, incline à penser quela philosophie n'est rien d'autre qu'un jeu frivole, l'art de couper les cheveux en quatre, bref un ensemble decontroverses sur des sujets où la connaissance est impossible.

» On devrait alors convenir que cette quête de lavérité que se propose la philosophie au même titre que les autres sciences serait vain.

Mais il poursuit : « cettevision résulte pour une part d'un fausse conception des buts de l'existence, et pour une part d'une appréciationerronée des bienfaits que la philosophie est susceptible d'apporter.

Par l'intermédiaire des inventions techniques, laphysique est utile à une foule de gens qui en ignorent tout ; si bien que ce n'est pas seulement, ou surtout, pourl'effet qu'elle a sur le spécialiste, qu'il en faut recommander l'étude, mais bien en raison de son action sur le genrehumain.

Or ce genre d'utilité n'appartient pas à la philosophie.

Si son étude a quelque valeur pour d'autres que lespécialiste, ce doit être indirectement, à travers les effets qu'elle peut avoir sur la vie de celui qui s'y consacre.C'est dans cette influence qu'il faut d'abord chercher la valeur de la philosophie.

De plus, sous peine d'échouer danscette tentative, il faut nous libérer des préjugés de ce qu'on nomme à tort ‘esprit pratique'.

l'‘esprit pratique', ausens habituelle de cette expression, ne connaît que les besoins matériels de l'humanité ; il sait que l'homme doitentretenir son corps, il a oublié que son esprit réclame aussi de la nourriture » [1]. c) Or si d'une certaine manière plus positive, la vérité et sa recherche notamment à travers la philosophie a unevaleur c'est bien comme nous le dit Russell dans le chapitre XV de Problème de philosophie parce que : « L'esprit qui s'est accoutumé à la liberté et à l'impartialité de la contemplation philosophique, conservera quelque chose decette liberté et de cette impartialité dans le monde de l'action et de l'émotion ; il verra dans ses désirs et dans sesbuts les parties d'un tout, et les regardera avec détachement comme les fragments infinitésimaux d'un monde qui nepeut être affecté par les préoccupations d'un seul être humain.

L'impartialité qui, dans la contemplation, naît d'undésir désintéressé de la vérité, procède de cette même qualité de l'esprit qui, à l'action, joint la justice, et qui, dansla vie affective, apporte un amour universel destiné à tous et non pas seulement à ceux qui sont jugés utiles oudignes d'admiration.

Ainsi, la contemplation philosophique exalte les objets de notre pensée, et elle ennoblit lesobjets de nos actes et de notre affection ; elle fait de nous des citoyens de l'univers et non pas seulement descitoyens d'une ville forteresse en guerre avec le reste du monde.

C'est dans cette citoyenneté de l'univers queréside la véritable et constante liberté humaine et la libération d'une servitude faite d'espérances mesquines et depauvres craintes.

[…] Résumons notre discussion sur la valeur de la philosophie : la philosophie mérite d'êtreétudiée, non pour y trouver des réponses précises aux questions qu'elle pose, puisque des réponses précises nepeuvent, en général, être connues comme conformes à la vérité, mais plutôt pour la valeur des questions elles-mêmes ; en effet ces questions élargissent notre conception du possible, enrichissent notre imaginationintellectuelle et diminuent l'assurance dogmatique qui ferme l'esprit à toute spéculation ; mais avant tout, grâce à lagrandeur du monde que contemple la philosophie, notre esprit est lui aussi revêtu de grandeur et devient capable deréaliser cette union avec l'univers qui constitue le bien suprême.

[…] » Transition : Ainsi la vérité est-elle une valeur en soi intrinsèquement, et sa recherche ne doit pas dépendre que l'utilité que l'onpeut en retirer mais pour la pratique mais bien pour la vérité elle-même afin de ne pas borner son horizon et ne pastomber dans le dogmatisme.

La vérité nous ouvre les yeux vers la totalité infinie de l'inconnue en attente. »

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