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La création est-elle le propre de l'art ?

Publié le 23/01/2004

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NIETZSCHE: C'est ainsi notre vanité, notre amour-propre qui nous poussent au culte du génie : car il nous faut l'imaginer très loin de nous, en vrai miraculum, pour qu'il ne nous blesse pas 1.. .1. Mais, compte non tenu de ces insinuations de notre vanité, l'activité du génie ne paraît pas le moins du monde quelque chose de foncièrement différent de l'activité de l'inventeur en mécanique, du savant astronome ou historien, du maître en tactique. Toutes ces activités s'expliquent si l'on se représente des hommes dont la pensée est active dans une direction unique, qui utilisent tout comme matière première, qui ne cessent d'observer diligemment leur vie intérieure et celle d'autrui, qui ne se lassent pas de combiner leurs moyens. Le génie ne fait rien que d'apprendre d'abord à poser des pierres, ensuite à bâtir, que de chercher toujours des matériaux et de travailler toujours à y mettre la forme. Toute activité de l'homme est compliquée à miracle, non pas seulement celle du génie : mais aucune n'est un miracle ». - D'où vient donc cette croyance qu'il n'y a de génie que chez l'artiste, l'orateur et le philosophe ? qu'eux seuls ont une intuition " ? (mot par lequel on leur attribue une sorte de lorgnette merveilleuse avec laquelle ils voient directement dans l'« être !).

Le concept de création peut s’entendre de deux manières différentes. Il y a d’une part la création entendue comme production : elle est l’œuvre d’un agent doué d’une volonté, qui fait advenir quelque chose à l’être en vue d’une fin donnée, et sans l’intervention duquel cette chose serait demeurée dans le néant. Mais la création comme production peut s’entendre également comme une opération de mise en forme : le créateur est celui qui agence une matière qu’il n’a en revanche pas créée. Platon dans le Timée expose cette idée en évoquant une création du monde sur le modèle de l’artisanat : le créateur est celui qui modèle la chora, donné brut qu’il change en matière organisée. Le second concept de création est celui d’événement. La création ne désigne que le passage d’un état à un autre, du rien au quelque chose, sans que l’on puisse imputer cette translation à un quelconque agent. Le problème que pose ce concept n’est pas celui de l’existence, mais celui du temps : à quel moment se produit ce passage du rien au quelque chose ? Le monde a-t-il été créé à un moment donné, identifiable ? Ou s’agit-il d’une opération atemporelle qu’il n’est pas besoin de dater, de justifier ?

« conformément à la vision qui est la sienne.

Dans toutes les activités artistiques, un individu que l'on nomme à justetitre un créateur se rapport à une matière (qu'il s'agisse de mots, de couleurs, de sons…) dans le but de l'informer.Informer : c'est-à-dire, d'une part, faire passer ce chaos initial qu'est la matière à un état d'organisation quel'artiste a conçu préalablement dans son esprit et qu'il modifie dans le moment de la création (le peintre Frenhofferdans Le chef d'œuvre inconnu de Balzac écrit à ce propos que « on ne médite que les pinceaux à la main ») ; mais aussi organiser la matière en vue de la rendre belle (rappelons que le terme « informer » vient du latin « forma » quisignifie « beauté »).

Nous dirons donc qu'il est parfaitement exact de dire que l'art est une activité créatrice. b.

L'art est de manière distinctive une activité créatrice Mais est-ce à dire que la création est le propre de l'art ? Il semble bien que tel est le cas, car l'art est une activitéde création au sens le plus fort de ce terme.

En effet, ce que nous venons de voir dans le point précédent est quel'art est une activité créatrice en ce sens que l'artiste ordonne une matière, l'informe.

Mais en sens plus profond,nous pouvons dire que l'art crée quelque chose qui sans lui nous serait demeuré à jamais inconnu.

Prenons l'exemplede la littérature.

Kafka écrivait : « La littérature est la hache qui brise la mer gelée en nous ».

La littérature, en tant que prise de parole personnelle, est le meilleur moyen de mettre au jour l'individualité d'un homme, et de la fairepartager aux autres.

Par la littérature, la solitude des hommes prend fin : autrui se fait connaître à nous-mêmes.

Lacompréhension de son individualité passe même par le renoncement à ce que nous pouvons nommer la saisieanalogique (connaître autrui par moi-même) car celle-ci pourrait nous faire manquer ce qu'autrui a de profondémentsingulier.

Nous conclurons donc en disant que la création est bien le propre de l'art, création entendu au sens le plusfort de ce terme, car l'art n'est pas seulement l'activité qui ordonne une matière, mais celle qui tire du néant ce quisans elle n'aurait jamais vu le jour. II.

Cependant, la création comme production n'est pas le propre de l'art a.

Précisions sur le concept d'être « en propre » Cependant, sommes nous autorisés à dire que la création est le propre de l'art ? Nous avons montré dans laprécédente partie que l'art pouvait effectivement se définir comme une activité créatrice, c'est-à-dire comme uneactivité de production.

En ce sens, il est exact que la création est une caractéristique qui définit l'art, qu'en parlantd'activité créatrice à propos de l'art, nous disons quelque chose qui touche à son identité, à ce qu'il est en lui-même.

Mais cela n'est pas suffisant pour dire que la création est le propre de l'art.

Car dire d'une chose qu'elle est lepropre d'une autre, ce n'est pas uniquement définir son identité, mais son altérité.

En effet, une caractéristique quiest propre à une autre est une caractéristique qui lui appartient exclusivement.

Quand nous disons que le rire est lepropre de l'homme, nous disons d'une part que l'homme est une créature capable de rire (en ce sens, nous disonsquelque chose de l'humanité elle-même) mais aussi qu'il est le seul être à posséder cette qualité. b.

La création comme production : caractéristique d'activités diverses A la lumière de cette précision, nous pouvons dire que la création n'est pas le propre de l'art.

En effet, il ne s'agitque d'une caractéristique définitoire de l'art, non d'une caractéristique suffisante pour distinguer l'art de tout ce quin'est pas lui.

En ce sens, la création n'est pas le propre de l'art, car d'autres activités peuvent être à bon droitqualifiées de créatrices.

Par exemple, l'activité de Dieu qui met en forme le chaos initial du monde est une activitécréatrice ; de même, le scientifique qui met de l'ordre dans ses idées et parvient à une conception claire d'unproblème ou du moyen de le résoudre est également en train de se livrer à une activité créatrice.

Nous dirons doncque si la création est une caractéristique capable de dire une part de la singularité de l'art, elle est insuffisante pourdéfinir l'art dans son altérité. III. Le concept de création comme évènement n'est pas le propre de l'art a.

Précisions sur le concept de création comme évènement Néanmoins, nous avons vu dès l'introduction de ce travail que le concept de création avait deux sens : qu'il existaitd'une part une création qui pouvait s'entendre comme « production », et d'autre part une création qui s'entendaitcomme évènement.

Certes, nous venons de répondre à la question qui nous est posée dans le cas du premierconcept de création, mais il nous reste à nous interroger sur le second.

Tout d'abord, définissons ce que nousentendons par création entendue comme évènement.

Nous appelons création comme évènement le concept quiconsiste à désigner un passage d'un état à un autre dont nul agent ne peut être identifié.

Alors que le concept de. »

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