Devoir de Philosophie

L'amour de l'humanité nous est-il naturel ?

Publié le 24/02/2004

Extrait du document

amour
Mais, à chaque fois, une fonction de la pitié est indiquée : à la suite de la souffrance, Rousseau montre que la pitié joue dans l'état de nature le même rôle que la loi joue dans l'état de société (« la pitié tient lieu de lois, de moeurs, et de vertu »). De même, à la suite de l'injustice, Rousseau montre que la pitié débouche sur une maxime valable dans l'état de nature (« une maxime de bonté naturelle ») autrement plus efficace que la maxime qui a cours dans l'état de société. A chaque fois, la pitié est un sentiment immédiat (« sans réflexion »), à l'opposé de ce que serait une raison naissante qui pèserait le pour et le contre, les avantages et les inconvénients. La pitié s'oppose même à l'instinct. En effet, elle est même capable de nous « détourner » du mouvement instinctuel qui nous ferait prendre ce qui est à portée de main (« c'est elle [la pitié] qui détournera tout sauvage robuste d'enlever à un faible enfant... »), instinct par lequel le fort est tenté d'opprimer le faible. A chaque fois, la pitié est un sentiment qui naît du spectacle d'autrui -à l'opposé de l'amour de soi à qui l'existence d'autrui importe peu. Tout d'abord par une sorte de sympathie (empathie) devant la souffrance d'autrui (« ceux que nous voyons souffrir »), ressentie vraisemblablement comme une souffrance que nous ressentons dans notre propre corps. Le « secours » que nous portons à autrui est un secours que nous porterions spontanément à nous-mêmes. Il n'est certainement pas ici (ce qui se passera au contraire plus tard avec Bentham) lié à un calcul (plus ou moins rationnel).
amour

« l'ordre du sentiment (la pitié) est déjà là, en l'homme, au niveau de l'homme naturel, et donc premier (et par làmême antérieur) à la raison qui, elle, est seconde (et par là même postérieure), de l'ordre de l'homme civilisé.Ainsi, Rousseau, au niveau de l'homme « naturel », distingue-t-il un sentiment égoïste (« l'amour de soi ») etun sentiment altruiste (« la pitié »).

Il les comprend comme antagonistes, et s'équilibrant l'un l'autre (« la pitié[...] modérant dans chaque individu l'activité de l'amour de soi-même »).Sans que Rousseau soit très explicite sur ce point, on peut imaginer que l'amour de soi conduit l'homme aurepli et l'éloigne de ses semblables (à moins que l'amour de soi ne le conduise à vouloir imposer sa volonté parla force).

Au contraire, la pitié nous ouvre vers autrui et conduit à nous rapprocher des autres hommes, nossemblables, nos frères.

Chacun, éprouvant de la pitié pour l'autre, est enclin à le protéger et à lui portersecours.

Ainsi, la pitié concourt-elle « à la conservation mutuelle de l'espèce ». 2) Aussi Rousseau se livre-t-il à une célébration de la pitié, en décrivant ses différentes fonctions.

Plusexactement, il croise les descriptions concrètes avec les fonctions abstraites.

Ainsi la pitié est reliée à lasouffrance (« c'est elle qui nous porte [..] au secours de ceux que nous voyons souffrir ») ou bien elle estpensée comme frein à l'injustice (« c'est elle qui détournera tout sauvage robuste d'enlever à un faible enfant[...] sa subsistance acquise avec peine »).Mais, à chaque fois, une fonction de la pitié est indiquée : à la suite de la souffrance, Rousseau montre que lapitié joue dans l'état de nature le même rôle que la loi joue dans l'état de société (« la pitié tient lieu de lois,de moeurs, et de vertu »).

De même, à la suite de l'injustice, Rousseau montre que la pitié débouche sur unemaxime valable dans l'état de nature (« une maxime de bonté naturelle ») autrement plus efficace que lamaxime qui a cours dans l'état de société.A chaque fois, la pitié est un sentiment immédiat (« sans réflexion »), à l'opposé de ce que serait une raisonnaissante qui pèserait le pour et le contre, les avantages et les inconvénients.

La pitié s'oppose même àl'instinct.

En effet, elle est même capable de nous « détourner » du mouvement instinctuel qui nous feraitprendre ce qui est à portée de main (« c'est elle [la pitié] qui détournera tout sauvage robuste d'enlever à unfaible enfant...

»), instinct par lequel le fort est tenté d'opprimer le faible.A chaque fois, la pitié est un sentiment qui naît du spectacle d'autrui –à l'opposé de l'amour de soi à quil'existence d'autrui importe peu.

Tout d'abord par une sorte de sympathie (empathie) devant la souffranced'autrui (« ceux que nous voyons souffrir »), ressentie vraisemblablement comme une souffrance que nousressentons dans notre propre corps.

Le « secours » que nous portons à autrui est un secours que nousporterions spontanément à nous-mêmes.

Il n'est certainement pas ici (ce qui se passera au contraire plus tardavec Bentham) lié à un calcul (plus ou moins rationnel).En effet, Rousseau indique que ce mouvement de la pitié est « sans réflexion ».

Il n'est possible qu'au prixd'une sympathie universelle où chaque individu est en même temps tous les autres.Si la pitié est un sentiment premier (qui joue pleinement son rôle dès l'état de nature), c'est aussi unsentiment proprement humain, qui s'oppose à l'instinct (naturel lui aussi, mais strictement animal).

Là encore,la pitié inonde l'homme (tout « sauvage robuste » qu'il soit) au moment du spectacle du malheur.

Le sauvagese connaît comme fort, il voit l'enfant comme « faible ».

La pitié abolit les distances.

Elle nous fait aller d'uncoup vers l'autre, elle nous fait l'égal de l'autre, et nous sommes prêts à lui donner la puissance que nousavons en trop, mais qui lui manque. 3) Cette description concrète des effets de la pitié se croise avec une réflexion sur ses fonctions.

Ellepréfigure, dans l'état de nature, ce qui se passera dans l'état social (ou état civil).

Elle est la forme première(et primitive) « des lois, des moeurs et de la vertu », mais ces lois, ces moeurs et cette vertu qui aurontcours dans l'état social perdront de leur efficacité par rapport à la pitié.

Car, avec l'entrée en scène de laraison dans l'état social, le raisonnement joue son rôle néfaste.

Il est alors possible de désobéir à ce que dictela raison.

La pitié est trop immédiate, elle est trop entière, elle est trop puissance, elle est trop exclusive (leraisonnement n'y trouve aucune place) pour qu'à aucun moment sa voix, qui est impérative, soit discutée.La pitié joue un autre rôle, particulièrement pratique et « terre-à-terre » (loin du « sublime » de la raison).

Elleest le sentiment sur lequel, dans le début d'une réflexion (puisqu'à partir d'elle se forge une formulation quidégage un principe), peut se construire « utilement » (mais sans la perfection, qui relève de la raison) unemaxime.On sait qu'une maxime est le principe (subjectif) que le sujet se donne lui-même pour règle dans sa manièred'agir.

La maxime se formule généralement de manière impérative, sur le mode du « Fais ceci de telle ou tellemanière, de telle sorte que...

».

Rousseau épouse cette approche, que l'on trouvera plus tard sous la plumede Kant.

Ici, Rousseau, dans son expression, (« Fais ton bien avec le moindre mal d'autrui qu'il est possible »)tient compte à la fois de l'amour de soi-même (« Fais ton bien »), formulation qui renvoie à un inévitableégoïsme, et l'amour d'autrui (« le moindre mal...

»).

Le mouvement de la pitié va vers autrui (deuxième partiede la maxime) mais il vient de nous, et ne peut alors s'opposer à nos propres intérêts : « Fais ton bien »(première partie de la maxime).Dès lors, la pitié est tension entre le mien et le tien, sorte de synthèse dialectique (bien que le terme, à larésonance hégélienne, soit anachronique) qui satisfait l'intérêt non égoïste du nous. 4) Avec le sentiment de la pitié, nous sommes bien dans l'état naturel.

Loin donc des arguments qui relèventde l'usage de la raison, tel qu'il peut se produire dans l'état social (« plutôt que dans des arguments subtils »)et qui par leurs subtilités relèvent de la finasserie, la pitié est un sentiment d'une force inégalée provoquantchez tout homme une « répugnance » (qui n'a pas à s'expliquer) à l'égard des mauvaises actions.5) Ainsi, en suivant le texte de près, nous voyons que pour Rousseau, grâce à la pitié, la morale n'est passeconde, liée à la société, ou le résultat de l'éducation.

Il y a chez l'homme une « répugnance » native « à. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles