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Anagrame Ronsard

Publié le 05/04/2011

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ronsard

Les Amours de Ronsard appartiennent à la poésie lyrique amoureuse, qui jouissait au 16ème siècle d’une grande faveur, sous l'influence de l'Italie et de Pétrarque. Les Sonnets pour Hélène, publiés en 1578, sont adressés à une jeune suivante de la reine dont l'auteur est amoureux. A travers le poème « Anagramme », il célèbre le nom d’Hélène, qui tout autant que son charme apparent, rend amoureux d’elle tout homme de bien.

Le mot anagramme vient du grec anagramma littéralement « en arrière » et « lettre » qui veut dire \"renversement de lettres\", c’est une construction fondée sur une figure de style, qui inverse ou permute les lettres d'un mot ou d'un groupe de mots, pour en extraire un sens ou un mot nouveau. L’anagramme était très prisée au 16ème siècle: à cette époque on composa des anagrammes à partir des noms de hautes figures de la cours tels que  Catherine de Médicis : Médecine de charité.  A titre d’anecdote l’anagramme de Pierre de Ronsard était « Se redorer Pindare ». Dans Amours, il effectuait déjà une anagramme sur le nom de Marie. Ici le poème a pour titre « anagramme », il se distingue ainsi en quelque sorte des autres poèmes, et Ronsard indique déjà le Jeu littéraire autour du nom d’Hélène de Surgères qui aura lieu dans ce sonnet.  Il s’agit d’un sonnet de type abba abba ccd eed. La structure binaire du sonnet crée une tension qui se prête admirablement au jeu de renversement de l’anagramme.

(Lire le passage)

Comment, autour d’une anagramme, le poète dresse dans son sonnet l’éloge d’H de S ?

- Le portrait d’H

- Le pouvoir du nom

 

I Le portrait d’helène

a)       Une femme de Vertu.

Champ lexical de l’honneur : «honneur » « vertu » vers 5, « honorer » vers 8

Vers 4 : elle ne laisse pas les sots êtres séduits par elle.

Vers 5 : Aussi = adv de phrase : c’est pourquoi elle est quelqu’un de vertueux  (énumération de qualités)

Véritable argumentation de R :

à Seul les hommes généreux son pris dans le filet (=séduit par elle) : cela fait d’elle qqn de vertueux : cette vertu fait que les hommes généreux s’éprennent d’elle = cercle vicieux, un boucle // rappelle le jeu de l’anagramme.

Vers 8 : Docte Maîtresse : Qui possède des connaissances étendues, renvoie aussi aux doctes sœurs : Muses dans les Métamorphoses d’Ovide. Beauté+docte : toutes les qualités.

Vers 12 : destin 1578 : déité : caractère divin.

Vers 1 « Déesse »

Décrite comme une femme de vertu, R va même jusqu’à lui attribuer un caractère divin, on retrouve cette notion tout au long du recueil.

 

b)      Puissance

Le sonnet début par le pronom « Tu »: Mets Hélène en position de force, accentue son pouvoir

Il s’adresse a elle deuxième personne du singulier + Pronom à la première personne : « MON cœur, MON sang » Tu et je amoureux, caractéristique du lyrisme, tisse un réseau de relations en créant un effet de couple, de proximité et de symétrie.

Vers 3 : quand il lui plaît : notion de pouvoir de la dame/son œil pouvoir de séduction // ensemble de l’œuvre

 

à Portrait d’une femme vertueuse et puissante. Cette puissance est accentuée par le pouvoir du nom.

 

II Le pouvoir du nom

a) La droite imposition du nom

Vers 9 « les noms ont efficace et puissance et vertu » : La vertu d’Hélène se trouve dans son nom (il le prouvera par l’anagramme), cette notion vient de Platon, et a été reprise par Pontus de Thiard (humaniste et membre de la Pléiade) par l’affirmation : De recta nominum impositione : La droite imposition des noms. Il est inscrit dans le nom même d’H qu’elle est vertueuse.

– « et puissance et vertu » : double emplois de la conjonction «et » insiste sur l’efficacité du nom, effet d’accumulation, rythme binaire rappelle cette symétrie du poème.

Vers 10 : le nom l’a combattu : personnifié (il a des caractéristique humaines), R accord un réel pouvoir au nom. Il use d'un vocabulaire de la guerre « combattu » « armes ». // Dualité Amour – Guerre du recueil.

Vers 6 et 10 : similitude entre les deuxièmes hémistiches « lequel rend amoureux » « lequel m’a combattu », rythme le poème et rappelle ce renversement de l’anagramme, ainsi que la complémentarité amour et guerre récurrente dans le recueil.

Vers 11 : Ce combat a eu une double ascendance sur Ronsard : sur son esprit et son corps. Cela accroit la puissance du nom, et l’usage double du « et » donne un rythme binaire, rappelant l’effet de l’anagramme.

Son nom l’a rendu amoureux, l’a séduit, étant un homme de bien, il a été pris dans le filet d’Hélène.

 

b)      anagramme

Vers 2 : «  ton œil est le filet et le Ré bienheureux » Motif de l’œil, récurant dans le recueil, ici par une métaphore l’œil devient le « rets ». Le Ré est un filet de chasse, un piège. Dans la littérature « le filet ou la dame prend l’amant ». C’est le filet dans lequel Ronsard s’est fait capturer. On retrouve ici le symbolisme de R.

Vers 13 : Ronsard arrive à la conclusion de son argumentation : le nom d’H, autant qu’elle, séduit, et vers suivant (avec lequel ce vers forme un enjambement) l’anagramme vient appuyer son argumentation.

 « Voila comme de nom, d’effet tu est aussi/ le ré des généreus : elène de surgère ». Anagramme. Ancienne orthographe conservée, Hélène sans H. Elle séduit les hommes bons. C’est inhérent à son nom, incontestable

 

Ronsard dresse donc un portrait élogieux d’Hélène de S, en exaltant sa vertu et sa puissance. Ses dires sont accompagnés d’une argumentation rigoureuse, qu’il rend irréfutable par une anagramme.

La femme aimée est peint comme un être de perfection, Ronsard ne cherche pas à donner un reflet fidèle d’Hélène de Surgères, le domaine du poète étant – selon la distinction aristotélicienne bien connue – non pas celui de la vérité mais celui du vraisemblable, il crée au delà de cette figure particulière, une véritable galerie féminine. Il manie admirablement bien ce langage que lui et ses contemporains cherchent à renouveler, il exprime ainsi , outre le pouvoir de sa dame, le pouvoir du poète, de jouer avec les mots, de créer.

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