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Arendt et le domaine de la vie privée

Publié le 26/03/2005

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Depuis les Grecs, nous savons qu'une vie politique réellement développée conduit à une remise en question du domaine de la vie privée, et à un profond ressentiment vis-à-vis du miracle le plus troublant : le fait que chacun de nous a été fait ce qu'il est - singulier, unique et immuable. Toute cette sphère du strictement donné, reléguée au rang de la vie privée dans la société civilisée, constitue une menace permanente pour la sphère publique qui se fonde sur la loi d'égalité avec la même logique que la sphère privée repose sur la loi de la différence universelle et sur la différenciation. L'égalité, à la différence de tout ce qui est impliqué dans l'existence pure et simple, n'est pas quelque chose qui nous est donné mais l'aboutissement de l'organisation humaine, dans la mesure où elle est guidée par le principe de justice. Nous ne naissons pas égaux ; nous devenons égaux en tant que membres d'un groupe, en vertu de notre décision de nous garantir mutuellement des droits égaux. Arendt
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« Rousseau montre alors que l'accès à la liberté politique, à l'égalité de tous devant la loi et à la sécurité grâce à laforce commune, remplace avantageusement l'indépendance première.

Pour sa part, Arendt préfère se contenter desouligner combien l'égalité est une conséquence du politique. [III.

L'égalité comme élaboration] [A.

Le donné ignore l'égalité]Dans ce que Arendt nomme « l'existence pure et simple », l'égalité est absente.

Le singulier ne s'en soucie pas, etd'autant moins qu'elle est en contradiction avec ce qui le fonde.

On peut même concevoir que règne initialementune certaine inégalité, ne serait-ce qu'entre les capacités physiques des individus – comme Rousseau l'a conçu dansle Second Discours –, mais l'important est peut-être davantage dans l'absence du principe de justice qui aboutit àrechercher l'égalité.

Séparés, les individus singuliers ne peuvent concevoir un tel principe. [B.

Justice et égalité]Ce n'est que comme « membres d'un groupe » que les hommes peuvent se soucier de justice, de répartition desbiens ou des charges entre eux.

Pour que ce souci devienne efficace, il faut alors que soit prise une décision degarantie mutuelle de droits égaux.

Par où réapparaît le problème du contrat initial fondant le corps politique : pourque soit prise cette décision, il faut avoir déjà admis l'égalité des voix de ceux qui décident.Mais, pour Arendt, ce qui importe, c'est que le principe de justice suppose l'intervention d'une « organisationhumaine ». [C.

Extension de l'égalité]Du point de vue moral, affirmer de la sorte que l'égalité est une conquête vient rappeler que, pour respecter lajustice, l'homme doit vaincre ce que demande sa première singularité.

Et il apparaît nécessairement qu'uneorganisation humaine de plus en plus étendue devrait être capable d'assurer une égalité concernant elle aussi deplus en plus d'hommes.

L'affirmation « nous ne naissons pas égaux » peut concerner aussi bien l'ensemble del'humanité qu'une communauté plus ou moins étendue, et l'égalité apparaît alors comme la situation à instaurer pourl'ensemble de l'humanité, pourvu qu'elle connaisse un fonctionnement « démocratique », implicitement assimilé à laplus sûre organisation humaine, ne serait-ce que dans la mesure où les autres systèmes ne se soucient pas aumême point qu'elle, ni de l'égalité, ni de la garantie mutuelle des droits égaux entre tous. [Conclusion] En montrant que l'égalité entre les hommes est une tâche à accomplir, et non un donné, Arendt prend acte desdifficultés de l'organisation politique : celle-ci n'est viable qu'à la condition de reléguer dans la sphère privée, et ainside condamner à l'inefficacité, tout ce qui constituait initialement l'individu.

Celui-ci est donc authentiquementtransformé par son entrée dans le corps politique, comme l'avait déjà fortement souligné Rousseau.

Ce qu'ajouteArendt, c'est que cette transformation aboutit à une opposition marquée entre sphère privée et sphère publique,d'où il n'est pas interdit de penser que pourront naître de multiples conflits.. »

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