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L'art change-t-il la vie ?

Publié le 20/01/2004

Extrait du document

— L'art ne semble pas a priori avoir vocation à changer la vie des hommes. Cette tâche reviendrait plutôt à la technique qui permet aux hommes de bénéficier de certaines commodités rendant leur vie plus agréable.

 — La mission de changer la vie peut revenir également à la politique dans le sens où, comme le disait Aristote, elle s'efforce de faire en sorte que la vie des hommes ne soit « point trop accablée de peine «.

 – Mais l'art en tant que production consciente de la beauté ne semble pas avoir pour mission première de transformer la vie des hommes. Nous rechercherons donc si les apports de l'art peuvent contribuer à leur manière à changer la vie des hommes. Que serait la vie des hommes sans l'art? –

  • L'art rend-il la vie des hommes plus agréable?
  • L'art peut-il transformer le monde ou la société?
  • L'art peut-il rendre l'homme meilleur?

 

« L'art peut-il transformer le monde ou la société? – L'art peut-il jouer un rôle en matière politique? Est-il dans la vocation de l'artiste d'intervenir dans la vie sociale oupolitique soit pour dénoncer certaines injustices du monde, soit pour suggérer certaines transformations?– On pourra s'arrêter ici pour examiner le poids d'une certaine tradition prônant un art plus ou moins engagé.

DeVictor Hugo et Émile Zola jusqu'à Picasso et Aragon, on retrouve définie une certaine mission de l'artiste commetémoin et acteur de son temps.– L'artiste n'a-t-il pas pour mission d'ouvrir les yeux de ses contemporains? Sans l'art, comprendrions-nous lemonde? L'art change la vie parce qu'il rend le monde plus intelligible. L'art peut-il rendre l'homme meilleur? – Dans La Poétique, Aristote dit de la tragédie qu'elle est « une imitation faite par des personnages en action qui parl'entremise de la pitié et de la crainte accomplit la purgation des émotions de ce genre ». Le plaisir que procure la tragédie est spécifique.

Aristote le définit ainsi : « [...] la tragédie est l'imitation d'une action de caractère élevé et complète,d'une certaine étendue, dans un langage relevé d'assaisonnements d'uneespèce particulière suivant les diverses parties, imitation qui est faite par despersonnages en action et non au moyen d'un récit, et qui, suscitant pitié etcrainte, opère la purgation propre à pareilles émotions. » Assaisonnement du langage désigne la proportion variable de chants et de vers.

L'essence de latragédie réside dans l'action, non dans le récit, action représentée en untemps limité.

Le plaisir résulte des émotions ressenties: crainte et pitié.

Toutcela est clair.

Aristote mentionne la cause et les effets. Mais sur le mécanisme de l'opération, peu de détails ! Un seul terme assezinattendu: « purgation », catharsis.

On peut dire aussi « purification ».

Ce mot a donné lieu à maints commentaires.

Chez Aristote lui-même, il est l'objet de plusieurs interprétations.

On croit comprendre qu'il y a un rapport entrel'imitation, la mimésis, et la purgation, la catharsis: devant un spectaclereprésentant des actions éprouvantes, je suis enclin à ressentir les mêmesémotions que l'on cherche à provoquer en moi.

La représentation desentiments violents ou oppressants, par exemple la terreur, l'effroi ou la pitié,bien que mimés et donc fictifs, déclenche dans le public, dans la réalité, dessentiments analogues. Cette réaction est banale dans la vie courante; trop d'événements réels, effrayants ou affligeants, suscitent desémotions correspondantes, par exemple, de la compassion pour les victimes.

Mais ce phénomène est plus surprenantlorsqu'il s'agit d'un spectacle créé et imaginé de toutes pièces.

Il suppose une identification avec un personnage etnon plus avec une personne.

Certes, cette identification a ses limites, car il ne s'agit pas d'imiter, de copier ni detransposer dans la vie réelle les actions qui se déroulent sur la scène.

Et l'on imagine mal un jeune homme,influencé par l' " Œdipe " de Sophocle , décidant de tuer son père, de commettre un inceste avec sa mère et de se crever les yeux. Ce transfert de la fiction à la réalité est-il toutefois tellement inconcevable? Pour nous, malheureusement non.

Mais,pour Aristote , certainement.

En éprouvant des sentiments analogues à ceux que la tragédie provoque en moi, je me libère du poids de ces états affectifs pendant et après le spectacle.

J'en ressors comme purgé et apaisé.

Cesémotions préexistaient-elles en moi à l'état latent et le spectacle s'est-il contenté de les éveiller? Ou bien les a-t-ild'un bout à l'autre provoquées? Le spectateur est-il prédisposé, par sa nature même, à réagir en fonction d'unereprésentation spécialement conçue pour le troubler en des points sensibles de sa personnalité ? Aristote ne le dit pas. La " Poétique " ne répond pas vraiment à l'attente de la " Politique ".

Aristote , là aussi, avait évoqué la catharsis, mais uniquement à propos de la musique « Nous disons qu'on doit étudier la musique, non pas vue de l'éducation et de la purgation - ce que nous en vue d'un avantage unique, mais de plusieurs (en nous en reparlerons plusclairement dans un entendons par purgation, terme employé en général, traité sur la poétique - et, en troisième lieu,en vue du divertissement, de la détente et du délassement après la tension de l'effort). » Certes, il en reparle, mais si peu ! En revanche, la " Politique " donne quelques précisions qu'on ne retrouve pas dans la " Poétique ": à la crainte et à la pitié s'ajoute l'« enthousiasme ».

A propos de cet état d'exaltation, Aristote fait référence explicitement au sens thérapeutique du terme: « certains individus ont une réceptivité particulière pour cette sorte d'émotions [l'enthousiasme], et nous voyons ces gens-là, sous l'effet des chants sacrés, recouvrer leur calme comme sousl'action d'une cure médicale ou d'une purgation. » Est-ce pour lui, une manière de retrouver le lieu commun selon lequel « la musique adoucit les moeurs » ? Il y a sans doute un peu de cela, mais il faut aller plus loin dans l'interprétation.. »

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