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Autrui peut-il être autre chose pour moi qu'un obstacle ou un moyen ?

Publié le 31/01/2004

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A-t-on le droit de traiter ainsi un homme ? Et que devraient être nos relations avec autrui si l'on ne se limite pas à en faire un obstacle ou un moyen ?   Introduction Il y a en moi, comme en tout homme, deux mouvements opposés. Le premier me fait entrer en société car je ne peux me passer des autres pour vivre humainement : en ce sens, autrui est un moyen sans lequel mon but ne saurait être atteint. Le second me fait m'opposer aux autres car nous désirons la même chose : en ce sens, autrui est un obstacle qui m'empêche d'atteindre mon but, de satisfaire mon désir. Ne pouvant me passer de la société des autres, mais continuant à ne penser qu'à moi, il semble donc impossible qu'autrui puisse jamais être autre chose que moyen ou/et obstacle pour cette fin qu'est mon moi. Pourtant ne puis-je cesser de tout rapporter à moi et à mes buts? IL faudrait que je puisse considérer autrui autrement que relatif à moi, c'est-à-dire comme une fin en soi, et autrement que relatif, c'est-à-dire comme ayant valeur absolue. Y a-t-il dans mon humanité la possibilité d'un tel décentrement moral? Ou bien une telle espérance est-elle naïve, comme le pensent les cyniques?

« cadre qui ne me faisait appréhender autrui que dans la seule perspective de mes buts. b) Je peux alors respecter en autrui sa valeur absolue de fin.Il est comme moi capable de moralité, il est une personne : il n'est pas chose relative à moi et à mes buts, mais finen soi ; sa valeur n'est pas relative, elle est absolue.

Impossible de le traiter seulement comme un moyen. c) Je peux même me rendre responsable d'autrui sans attendre la réciproque.Si je surmonte ma peur de l'autre, je découvre son visage.

Or ce visage qui, sans défense, s'offre à moi, n'est pasl'adversaire du moi, il n'est pas moyen pour le moi : il est la charge qui lui est confiée (Lévinas, Éthique et Infini, 7). Pour Lévinas, l'éthique est la « voie royale vers l'absolument autre » (Préface).

En effet, le désir d'infini n'est pas undésir au sens habituel et négatif de manque mais une expérience sans retour possible de soi vers l'autre, du familiervers l'étranger.

Car « l'absolument autre, c'est autrui » (Rupture de la totalité), autrui n'est donc pas la négation demoi-même, ce qui impliquerait encore une relation d'identité, mais il est positivement « l'absolument autre ».

Autruime révèle le sens de l'éthique comme « rapport non allergique du Même et de l'Autre » (L'Être comme bonté).L'éthique trouvant son sens premier dans la relation de face à face, elle présuppose une ouverture à « l'absolumentautre » que seul le visage d'autrui permet d'entrevoir.

L'éthique est bien originellement une « optique » mais sansimage, car la vision est encore une totalisation.

Or le visage empêche le regard de se fixer, il nous tourne vers unau-delà, un ailleurs ; il figure « l'infiniment autre » qu'on ne parviendra jamais à totaliser.

Le visage d'autrui se donneà voir comme « révélation » de l'Autre dans sa nudité et sa fragilité.

Il m'appelle alors à la responsabilité infiniedevant lui. « Je pense plutôt que l'accès au visage est d'emblée éthique.

C'est lorsque vous voyez un nez, des yeux, un front, un menton, et que vous pouvez les décrire, que vous vous tournez vers autrui comme vers un objet.

Lameilleure manière de rencontrer autrui, c'est de ne pas même remarquer la couleur de ses yeux ! Quand on observela couleur des yeux, on n'est pas en relation sociale avec autrui.

La relation avec le visage peut certes être dominéepar la perception, mais ce qui est spécifiquement visage, c'est ce qui ne s'y réduit pas. Il y a d'abord la droiture même du visage, son expression droite, sans défense.

La peau du visage est cellequi reste la plus nue, la plus dénuée.

La plus nue, bien que d'une nudité décente.

La plus dénuée aussi: il y a dansle visage une pauvreté essentielle.

La preuve en est qu'on essaie de masquer cette pauvreté en se donnant desposes, une contenance.

Le visage est exposé, menacé, comme nous invitant à un acte de violence.

En même tempsle visage est ce qui nous interdit de tuer.

» Lévinas , « Ethique et infini ». Lévinas commence par opposer perception d'un objet et rencontre authentique d'autrui.

Quand je pose l'autre comme objet, je le projette sur une surface d'objectivité : il m'apparaît comme un tableau à décrire, une surface àobserver et détailler, son unité éclate en autant de petits objets à commenter (les éléments du visage sont eux-mêmes réductibles à des unités plus petites.

Ce rapport est un rapport théorique qui ne me donne pas véritablementautrui : dans un processus de connaissance, ma conscience s'assimile l'objet plutôt qu'elle ne s'ouvre à l'altérité dudonné.

En posant autrui comme objet, je reste seul. La saisie véritable d'autrui (celle qui me fait vraiment sortir de moi et rencontrer une dimension irréductible auxsimples données de l'expérience) ne donne pas une richesse d ‘éléments à décrire mais présente une pauvreté.L'autre se présente simultanément comme sans défense et invitation au respect : en effet, la possibilité physique detuer autrui se donne en même temps que l'impossibilité morale d'accomplir cet acte.

Autrui nous est livré dans unedimension éthique comme celui que je n'ai pas le droit de tuer. Conclusion Comme je ne suis d'abord qu'une force naturelle qui va, aveugle à tout ce qui n'est pas ses buts et son intérêt, ilsemble bien naïf de croire qu'autrui puisse jamais être autre chose pour moi qu'un moyen ou un obstacle servantmes buts.

IL me faudrait être aussi parfait et autarcique qu'un dieu pour être capable de générosité et de gratuité,pris que je suis dans ma lutte pour ma survie.

Mais, d'abord immoral, je suis pourtant capable de me moraliser, desortir du cadre où l'autre ne pouvait être qu'un obstacle ou un moyen pour mes buts.

Je suis capable de m'éveillerau scrupule moral et d'accorder à autrui le pouvoir d'entamer ma tranquillité d'être.

Le « moi, je » vire au « me voici».

Acceptant d'être fragilisé par la fragilité d'autrui, je deviens humain.. »

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