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La quête de la beauté est-elle la seule fin de l'art ?

Publié le 18/03/2004

Extrait du document

Une œuvre d’art n’a-t-elle pour vocation que celle d’être belle et de provoquer du plaisir chez le spectateur ? De sorte que toute œuvre d’art serait uniquement évaluée en termes de beauté et ne possèderait nulle autre fonction. Mais une œuvre d’art ne peut-elle pas être utile, en témoigne l’art contemporain qui fait des objets de l’utilité quotidienne des œuvres d’art ? Qui plus est, une œuvre d’art ne peut –elle pas conduire à la vérité ? n’est-elle pas porteuse de sens et de valeurs de sorte que de la réduire à sa beauté serait en occulter la majeure partie ?

Dans leurs contrastes, les deux tableaux les plus célèbres du monde, la Joconde et Guernica, témoignent de l'opposition de deux esthétiques : au sourire énigmatique du premier, expression souveraine de l'intelligence, s'oppose la beauté « convulsive « du second qui casse définitivement les reins à l'idéalisation, et fait place à tous les mythes mortifères de la modernité. Il nous apparaît aujourd'hui qu'une beauté qui n'aurait pas « quelque chose de sauvage, de brut, de frappant et d'énorme « (Diderot) trahirait la réalité du réel, la douleur et la mort et ferait de l'art une dérisoire évasion. « Le beau est le commencement du terrible « (Rilke). Mais cette « Terribilità « comme disait Vasari parlant des sculptures de Michel-Ange, n'est-elle pas ce que l'art a justement cherché d'abord à domestiquer dans sa quête de la beauté ?    

« III - L'illusion esthétique a) «Le beau ne plaît ni ne déplaît, il arrête», écrivait Alain ; c'est à la modalité plus ou moins brutale de cet arrêtque pourrait se référer la distinction du beau et du sublime.

Si l'oeuvre belle est un jeu, elle n'est pas qu'un jeu, entant justement qu'elle touche à la limite (sub-limis), qu'elle ravit et ravage, « comme la foudre » (Longin). b) Inversement le sublime dans son sérieux demeure un jeu : le spectateur ne doit pas être menacé par le spectaclesublime.

Le sublime doit `s'allier au beau sinon l'étonnement se transforme en épouvante.

La delightfull horror(Burke) que connaît celui qui échappe de justesse à la mort est un « flirt » avec le terrible.

Contre toutes lestentations de dionysisme sauvage - avis aux rockers ! - il faut rappeler que l'art n'est pas la vie et qu'il n'a jamaissauvé personne. c) On voit donc que l'art a le redoutable pouvoir de nous faire entendre la voix du tout Autre sans, pour autant,cesser d'être un divertissement.

L'art nous permet d'écouter comme Ulysse arrimé au mât de son navire le chant dessirènes ; tel est le paradoxe de l'art qui nous ouvre à l'étrange et qui nous en défend.

Sans la sous-jacence dudionysiaque, point de fascination, mais sans la distance maintenue ce serait la destruction.

En opposant Apollon,expression de la mesure, de la raison, de la beauté plastique, à Dionysos, symbole de démesure, de vie, maiségalement de violence et de destruction, Nietzsche donne le privilège au souffle créateur, représenté par lamusique, sur la raison, le concept abstrait.

Mais en réalité, le couple Apollon-Dionysos se trouve au principe detoute création. APOLLON ET DIONYSOS A.

Le rêve et l'ivressePour bien caractériser l'opposition entre les deux états d'esprit, Nietzsche leurdonne des noms de dieux : Apollon représente les arts plastiques (peinture,sculpture et architecture) et Dionysos représente les autres arts (poésie et,surtout, musique).

On peut les décrire par deux états de perte de laconscience, à savoir le rêve pour Apollon et l'ivresse pour Dionysos.

Dansl'illusion du rêve, la réalité du rêve est convaincante mais laisse cependantl'impression de n'être qu'une apparence.

Comme le philosophe se plaît à voirdans la réalité sensible une apparence qui cache une autre réalité, l'artisteapollinien voit dans la réalité du rêve également une apparence.À l'opposé du rêve, l'ivresse brise le principe d'individuation — à savoir ce quifait que le sujet se perçoit comme un être unique, identique à soi — et faitperdre au sujet la maîtrise de soi ; celui-ci renoue alors avec la nature et sesimpulsions originaires.

« L' homme n' est plus artiste, il est devenu oeuvred'art » (chap.

1, p.

30).L'artiste apollinien imite le rêve, l'artiste dionysiaque imite l'ivresse, la tragédieimite les deux à la fois.

L'ivresse des Grecs n'avait rien à voir avec les orgiesbarbares : ils se protégeaient du débordement (hubris) par la mesureapollinienne.

Les fêtes de Dionysos étaient des phénomènes d'art.

Mais ce futun choc pour les Grecs de découvrir la division de l'être entre la nature etl'esprit, dans l'expérience de la musique dionysiaque (chap.

2). B.

L'apollinismeL'antique légende du roi Midas rapporte que le bien suprême pour l'homme serait de ne pas être né et que le seconddes biens, c'est de mourir bientôt.

« Le Grec connaissait et ressentait les terreurs et les atrocités de l'existence : etpour qu'en somme la vie lui fût possible, il fallait qu'il interposât, entre elles et lui, ces enfants éblouissants du rêveque sont les Olympiens » (p.

36).

L'horreur de l'existence est voilée par la médiation artistique.

Homère, « l'artistenaïf », en créant des héros et des dieux pleins de vie, a permis aux Grecs de se voir non pas souffrants, mais beauxet volontaires (chap.

3).L'illusion apollinienne est un mirage sublime.

Apollon donne la beauté aux formes, donne le sens aux rêves, confère àl'individu le sentiment de son unité.

La musique dionysiaque vient renverser ces valeurs en révélant la démesure dela nature (chap.

4). Conclusion C'est parce que la beauté est le commencement du terrible qu'elle est ce qu'il y a de plus désirable (erasmiôtaton)mais, du désir, il n'y a de satisfaction qu'analogique comme il n'y a de jouissance que par la vertu et par la grâced'une fiction aussi illusoire que vaine.. »

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