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Blaise PASCAL: Le coeur et la raison

Publié le 18/04/2009

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Nous connaissons la vérité non seulement par la raison mais encore par le coeur. C'est de cette dernière sorte que nous connaissons les premiers principes et c'est en vain que le raisonnement, qui n'y a point de part essaie de les combattre. Les pyrrhoniens, qui n'ont que cela pour objet, y travaillent inutilement. Nous savons que nous ne rêvons point. Quelque impuissance où nous soyons de le prouver par raison, cette impuissance ne conclut autre chose que la faiblesse de notre raison, mais non pas l'incertitude de toutes nos connaissances, comme ils le prétendent. Car les connaissances des premiers principes : espace, temps, mouvement, nombres, sont aussi fermes qu'aucune de celles que nos raisonnements nous donnent et c'est sur ces connaissances du coeur et de l'instinct qu'il faut que la raison s'appuie et qu'elle y fonde tout son discours. Le coeur sent qu'il y a trois dimensions dans l'espace et que les nombres sont infinis et la raison démontre ensuite qu'il n'y a point deux nombres carrés dont l'un soit double de l'autre. Les principes se sentent, les propositions se concluent et le tout avec certitude quoique par différentes voies - et il est aussi inutile et aussi ridicule que la raison demande au coeur des preuves de ses premiers principes pour vouloir y consentir, qu'il serait ridicule que le coeur demandât à la raison un sentiment de toutes les propositions qu'elle démontre pour vouloir les recevoir. Cette impuissance ne doit donc servir qu'à humilier la raison - qui voudrait juger de tout - mais non pas à combattre notre certitude. Blaise PASCAL
(Position du problème) — La raison peut-elle connaître le vrai ? Sans le raisonnement qui rend nécessaire ses affirmations par des preuves, il n'y aurait que croyance incertaine, elle semble donc indispensable pour la connaissance certaine du vrai. Cependant, la raison peut aussi bien prouver que réfuter ses affirmations, comment le montrent les sceptiques, elle même semble donc rendre impossible une connaissance certaine du vrai. (Thèse) — La solution de Pascal est dans cet extrait des Pensées que si la raison s'appuie non uniquement sur elle-même mais sur les principes du cœur, elle peut produire des connaissances certaines. (La raison n'est ainsi nécessaire que pour la connaissance des conséquences logiques que l'on peut tirer des premiers principes, qui sont eux-mêmes connus avec certitude, mais par le cœur seulement, d'où leur caractère inattaquable par la raison. (Argumentation) — Pour montrer cela, Pascal commence par dénoncer l'erreur qu'il y aurait à croire que la connaissance de la vérité ne vient que de la raison : elle vient aussi (et d'abord) du cœur. On peut alors en déduire que la raison ne peut remettre en cause les principes issus du cœur et que les sceptiques qui s'y essayent ne convainquent personne. En conséquence également, les principes de la connaissance comme par exemple que « nous ne rêvons point « (et donc ce que nous percevons à l'état de veille existe) sont certains, même si nous ne pouvons les prouver. Il s'ensuit que la raison est faible ou limitée (en ce qu'elle ne peut remettre en cause les premiers principes tels que "l'espace existe") et non que toute la connaissance (y compris rationnelle) est incertaine comme le voudraient les sceptiques. Tout cela permet d'aboutir à la thèse qui est ici que la raison doit s'appuyer sur les connaissances du cœur pour pouvoir être vraie. 

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« connues des notions telles celles d'espace, de nombre, etc.

qui sont des notions parfaitement claires en elles-mêmes et comprises de tous les hommes ; leur vérité est aussi assurée que si elle était fondée sur unedémonstration.Le coeur « sent » les premiers principes, dont la raison déduit les conséquences.

Il en résulte pour Pascal lacomplète séparation du coeur et de la raison (ou encore de l'esprit de finesse et de l'esprit de géométrie) : il estabsurde de demander des preuves des premiers principes, tout comme il est absurde de vouloir « sentir » lesconclusions.

Mais cette séparation a une signification bien précise : le coeur surpasse infiniment la raison ; cettedernière est impuissante à saisir certaines vérités que le coeur admet d'emblée.

Cette séparation prend alors toutson sens dans le projet pascalien d'une apologie de la religion chrétienne (dont les Pensées ne sont que le brouillon): le coeur sent les vérités de la foi, la raison ne peut pas les comprendre.

Par exemple, il est impossible d'expliquerrationnellement le dogme de la Trinité.

La séparation du domaine du coeur et du domaine de la raison est ainsi laséparation de la science et de la religion : le Pascal chrétien humilie la raison pour sauvegarder la pureté de la foi, etle Pascal savant (mathématicien et physicien) sépare foi et raison pour sauvegarder l'indépendance de la science.

Ils'agit donc d'une contradiction qui fut intérieure à Pascal lui-même, dont les écrits montrent toute la tension.

C'estun des intérêts de la lecture de Pascal. « Nous connaissons la vérité non seulement par la raison* mais aussi par le cœur » Il serait ridicule de douter de tout sous prétexte que la raison ne parvient pas à tout démontrer, « on ne prouve pasqu'on doit être aimé en exposant d'ordre les causes de l'amour » (298).

Ainsi, Pascal répond aux pyrrhoniens etadjoint à la raison une leçon d'humilité.

C'est que le vrai est affaire de sentiment et d'intuition, tout autant que dedémonstration.

Et si la raison déduit, c'est en partant de principes certains par sentiment et non par raisonnement.« La dernière démarche de la raison est reconnaître qu'il y a une infinité de choses qui la surpassent ; elle n'est quefaible si elle ne va pas jusqu'à connaître cela.

» (188) Cela lui permettra de comprendre sa propre incompétencedans la connaissance de Dieu, qui peut être senti par le coeur mais reste hermétique aux analyses de la raison. PASCAL (Biaise). Né à Clermont-Ferrand en 1623, mort à Paris en 1662. Enfant précoce, il écrivit à onze ans un traité des sons, et retrouva tout seul, à douze ans, la trente-deuxièmeproposition du premier livre d'Euclide.

A dix-neuf ans, il inventa une machine arithmétique.

En 1646, il entre enrelations avec Port-Royal et fait sa première expérience sur le vide.

A partir de 1652, commence ce que l'on aappelé la « vie mondaine » de Pascal.

Ami du duc de Roannez, il fréquente les salons et les femmes, s'adonne aujeu, mais poursuit cependant la réalisation de ses travaux mathématiques : il se révèle le promoteur de l'analyseinfinitésimale et du calcul des probabilités.

Insatisfait de la vie qu'il mène, las du monde, le cœur vide, il éprouve lanostalgie de Dieu.

Pascal a une illumination dans la nuit du 23 novembre 1654, et trace quelques lignes sur unmorceau de papier, qu'il conservera cousu à l'intérieur de son vêtement.

Il se retire à Port-Royal-des-Champs, etparticipe avec ardeur à la polémique qui oppose les Jansénistes et les Jésuites, prenant la défense de Port-Royal(1656-1657).

La guérison de sa nièce, à la suite de l'attouchement d'une épine de la couronne de Jésus, le rendencore plus convaincu dans sa foi chrétienne.

Il abandonne ses recherches de mathématiques et de géométrie, etvit désormais dans l'humilité et la souffrance.

Il imagine la création de carrosses à cinq sols pour le déplacement despauvres, voitures qui sont à l'origine des transports publics en commun.

Il meurt le 17 août 1662.

— Bien entendu, iln'y a pas de système philosophique de Pascal, que Bayle a appelé « un individu paradoxe de l'espèce humaine ».Malade et las, Pascal a cherché en souffrant.

Il s'est approché de l'univers invisible, à tâtons.

Dieu est pour lui « ladernière fin, comme lui seul est le vrai principe ».

Polémiste, géomètre, physicien, Pascal est l'un des plus grandsécrivains français.

Sa distinction entre l'esprit de géométrie et l'esprit de finesse est célèbre.

L'esprit de géométrie,c'est celui qui procède par définitions et déductions rigoureusement logiques et qui s'étend jusqu'aux plus extrêmesconséquences.

L'esprit de finesse, c'est la « souplesse de pensée » qui permet, face à la complexité des choses,l'adaptation aux circonstances concrètes.

— Rappelons ici l'argument du pari, dans le problème de l'existence deDieu.

Ou bien Dieu est, ou bien il n'est pas.

Or, « il faut parier, cela n'est pas volontaire, vous êtes embarqué.Lequel prendrez-vous donc?...

Votre raison n'est pas plus blessée en choisissant l'un que l'autre, puisqu'il fautnécessairement choisir.

Voilà un point vidé ; mais votre béatitude ? Pesons le gain et la perte, en prenant croix queDieu est.

Estimons ces deux cas : si vous gagnez, vous gagnez tout ; si vous perdez, vous ne perdez rien.

Gagezdonc qu'il est, sans hésiter...

Tout joueur hasarde avec certitude pour gagner avec incertitude : et néanmoins ilhasarde certainement le fini pour gagner incertainement le fini, sans pécher contre la raison...

Et ainsi, notreproposition est dans une force infinie, quand il y a le fini à hasarder à un jeu où il n'y a pareils hasards de gain quede perte, et l'infini à gagner ».

— La grandeur de Pascal est dans ce combat qu'il a mené, où il a engagé toutes lescontradictions de son être, dans cette quête gémissante de la vérité.

Elle est aussi dans cette sourde inquiétudequ'il a fait naître dans le cœur des hommes, même dans le cœur de ses adversaires les plus obstinés.

Comme l'a ditun philosophe contemporain, « Pascal a vécu intensément le combat du chrétien, la lutte avec l'ange de la foi, où laseule victoire est de se reconnaître vaincu.

». »

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