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Calculer est-ce penser ?

Publié le 25/02/2004

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À première vue, il peut nous sembler évident que calculer, c'est penser : le prestige des mathématiques nous incline même souvent à croire que faire des opérations sur les nombres constitue l'activité supérieure de l'esprit humain. Toutefois, les machines aussi calculent, elles calculent même mieux, plus rapidement et plus sûrement que le meilleur des mathématiciens. Or dirons-nous que ces machines qui calculent pensent ? Notre réponse, ici, devient fort hésitante : spontanément, nous répugnons à considérer que nos calculatrices et nos ordinateurs pensent, réservant la pensée aux êtres humains. Le problème se pose donc de savoir si calculer, c'est réellement penser. Mais, si calculer c'est effectivement penser, le calcul est-il une forme particulière de la pensée ? ou bien est-il la forme de toute pensée, en ce sens que penser serait calculer, que la pensée en général serait réductible à la pensée calculatrice ?

  • I) Il faut calculer pour penser correctement.

a) Toute pensée est combinatrice. b) La pensée est un calcul. c) La pensée est réductible à un traitement informatique de données.

  • II) Pour calculer, il faut s'abstenir de penser.

a) La pensée n'implique pas le calcul. b) L'intelligence n'est pas la pensée. c) Penser, c'est comprendre.

.../...

« « L'appel aux idées n'est pas toujours sans danger, et beaucoup d'auteursabusent du prestige de ce terme pour donner du poids à certaines de leursimaginations ; car nous ne possédons pas l'idée d'une chose du fait que nousavons conscience d'y penser, comme je l'ai montré plus haut par l'exemple dela plus grande des vitesses.

Je vois aussi que de nos jours les hommesn'abusent pas moins de ce principe si souvent vanté : « tout ce que jeconçois clairement et distinctement d'une chose est vrai et peut être affirméde cette chose ».

Car souvent les hommes, jugeant à la légère, trouvent clairet distinct ce qui est obscur et confus.

Cet axiome est donc inutile si l'on n'yajoute pas les CRITERES du clair et du distinct [...] , et si la vérité des idéesn'est pas préalablement établies.

D'ailleurs, les règles de la LOGIQUEVULGAIRE, desquelles se servent aussi les géomètres, constituent descritères nullement méprisables de la vérité des assertions, à savoir qu'il nefaut rien admettre o certain qui n'ait été prouvé par une expérience exacteou une démonstration solide.

Or une démonstration est solide lorsqu'ellerespecte la forme prescrite par la logique ; non cependant qu'il soit toujoursbesoin de syllogismes disposés selon l'ordre classique [...] mais il faut dumoins que la conclusion soit obtenue en vertu de la forme.

D'une telleargumentation conçue en bonne et due forme, tout calcul fait selon les règlesfournit un bon exemple.

Ainsi, il ne faut omettre aucune prémisse nécessaire,et toutes les prémisses doivent ou bien être démontrées préalablement, oubien n'être admises que comme hypothèses, et dans ce cas la conclusion aussi n'est qu'hypothétique.

Ceux qui suivront ces règles avec soin se garderont facilement des idées trompeuses.

»Leibniz.

L'évidence est un critère de vérité insuffisant, parce que subjectif.

Il repose sur une inspection de l'esprit (laconscience que nous avons de penser à quelque chose).

Il manque donc à la règle cartésienne des idées claires etdistinctes un critère objectif, qui nous permette de savoir à quoi reconnaître le clair et le distinct, autrement quepar l'attention que nous y portons.L'évidence peut être trompeuse.

Où trouver alors les critères objectifs du clair et du distinct, et donc de lacertitude ? Dans les règles de la logique, c'est-à-dire dans le respect de la forme logique du raisonnement, dont lanon-contradiction est la principe le plus universel.

Le syllogisme des Anciens en fournit l'exemple.

Les mathématiquesaussi, mais Leibniz retient d'elles moins, comme Descartes, la clarté des intuitions que la rigueur du formalisme.Le calcul, manipulation réglée de signes, telle que la conclusion est nécessaire et immanquable, devient la règlesuprême de la vérité : règle machinale, mais par conséquent plus sûre et plus objective que l'appel à l'évidence.On peut qualifier la conception cartésienne d'intuitionnisme et lui opposer le formalisme de Leibniz.

[Il est parfaitement possible de calculer sans penser.

Calculer, c'est mettre en oeuvre des mécanismes.

Le pur calcul n'est qu'un automatisme que la machine est capable de reproduire.] La pensée n'est pas nécessaire au calculC'est la machine à calculer qui nous prouve que calculer n'est pas penser.

Quelle que soit sa sophistication, unemachine n'est que matière, et la matière ne pense pas.

Pourtant la machine calcule ou, plus exactement, l'hommepeut la faire calculer.

Or, en ne se trompant jamais, la machine montre bien qu'elle n'est qu'une machine et qu'ellene pense pas.

Si l'erreur est humaine, c'est parce qu'elle est pensée. Il ne faut pas confondre intelligence et penséeLe calcul demande de l'intelligence, et c'est pourquoi l'on parle, à propos des ordinateurs, d'intelligence artificielle.Mais l'intelligence n'est pas la pensée.

Un ordinateur calcule (le programme d'échecs Belle examine 29 millions deconfigurations en trois minutes...) mais ne pense pas.

Il est incapable de seulement reproduire ce qu'on appelle le«sens commun». Calculer, c'est manipuler, penser, c'est comprendreOn peut calculer sans comprendre, sans même savoir à quoi correspondent les calculs.

Nous l'avons tous fait enrésolvant des équations à une ou plusieurs inconnues sans nous poser de question.

Mais pour comprendre unproblème, par contre, il faut convoquer sa pensée.. »

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