Devoir de Philosophie

Le cinéma, par la force contraignante de l'image, laisse-t-il une place à la rêverie ?

Publié le 14/10/2011

Extrait du document

Simone de Beauvoir a sans doute raison de dire que, contrairement au roman, le cinéma, par la force contraignante de l'image, ne laisse pas de place à la rêverie. Mais il est incontestable aussi que sa puissance d'évocation peut en revanche donner à un personnage ou à un cadre un relief inoubliable. Est-il donc possible, en définitive, d'établir objectivement un ordre de préférence entre ces deux arts qui se recommandent par des mérites différents ?

« dans Je meilleur des cas aucun film ne saurait atteindre à un certain degré de complexité.

Moins expressive que l'image - et donc, quand on se borne à donner à voir, moins rapide -, J'écriture est hautement privilégiée quand il s'agit de transmettre un savoir.

Quand une œuvre est riche, elle nous communique une expérience vécue qui s'enlève sur un fond de connaissances abstraites : sans ce contexte, J'expé­ rience est mutilée ou même inintelligible.

Or, des images visuelles ne suffisent pas à la fournir : si elles essaient de le suggérer c'est grossiè­ rement et en général avec maladresse.

On s'en est aperçu quand Costa Gavras a tourné L'aveu.

Il a réussi Z parce que J'intrigue était très simple, le contexte connu : une machination policière parmi d'autres.

Mais L'aveu n'a de sens que dans une situation qui renvoie à toute l'histoire de l'après-guerre en U.R.S.S.

et dans les pays de l'Est.

Les personnages n'existent pas seulement dans le moment du pro­ cès : chacun a toute une vie politique derrière soi.

Dans le livre, on savait exactement à qui on avait affaire et on connaissait les raisons de chaque agissement.

Réduit à un spectacle, le drame de London perdait son poids et son sens.

Ma préférence pour les livres vient surtout, je pense, du fait que depuis mon enfance c'est dans la littérature que j'ai investi.

Je suis plus sensible aux mots qu'aux images.

Un des lieux communs qu'on rabâche dans certains milieux, c'est que désormais la littérature n'aura plus à jouer qu'un rôle secondaire; J'avenir est au cinéma, à la télévision : à l'image.

Je n'en crois rien.

Quant à moi je n'ai pas de poste de télévision et je n'en aurai jamais.

L'image sur l'instant nous envoûte; mais ensuite elle pâlit et s'atro­ phie.

Les mots ont un immense privilège :on les emporte avec soi.

Si je dis : « Nos jours meurent avant nous », je recrée en moi avec exac­ titude la phrase écrite par Chateaubriand.

La présence en chaque homme des autres hommes, c'est par Je lan­ gage qu'elle se matérialise et c'est une des raisons qui me font tenir la littérature pour irremplaçable.

S.

DE BEAUVOIR, Tout compte fait.

(Bac.

Montpellier). »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles