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Colette, Sido: Il y avait dans ce temps-là de grands hivers

Publié le 12/02/2011

Extrait du document

temps

Il y avait dans ce temps-là de grands hivers, de brûlants étés. J'ai connu, depuis, des étés dont la couleur, si je ferme les yeux, est celle de la terre ocreuse, fendillée entre les tiges du blé et sous la géante ombelle du panais sauvage (1), celle de la mer grise ou bleue. Mais aucun été, sauf ceux de mon enfance, ne commémore le géranium écarlate et la hampe enflammée des digitales. Aucun hiver n'est plus d'un blanc pur à la base d'un ciel bourré de nues ardoisées, qui présageaient une tempête de

flocons plus épais, puis un dégel illuminé de mille gouttes d'eau et de bourgeons lancéolés (2)... Ce ciel pesait sur le toit chargé de neige des greniers à fourrages, le noyer nu, la girouette, et pliait les oreilles des chattes... La calme et verticale chute de neige devenait oblique, un faible ronflement de mer lointaine se levait sur ma tête encapuchonnée, tandis que j'arpentais le jardin, happant la neige volante... Avertie par ses antennes, ma mère s'avançait sur la terrasse, goûtait le temps, me jetait un cri : — La bourrasque d'Ouest! Cours! Ferme les lucarnes du grenier!... La porte de la remise aux voitures!... Et la fenêtre de la chambre du fond ! Mousse exalté du navire natal, je m'élançais, claquant des sabots, enthousiasmée si du fond de la mêlée blanche et bleu noir, sifflante, un vif éclair, un bref roulement de foudre, enfants d'Ouest et de Février, comblaient tous deux un des abîmes du ciel... Je tâchais de trembler, de croire à la fin du monde. Mais dans le pire du fracas, ma mère, l'œil sur une grosse loupe cerclée de cuivre, s'émerveillait, comptant les cristaux ramifiés d'une poignée de neige qu'elle venait de cueillir aux mains même de l'Ouest rué sur notre jardin... Colette, Sido. SUJET Vous ferez un commentaire composé de ce texte en étudiant, par exemple, l'art avec lequel Colette (1873-1954) évoque, à travers ses souvenirs d'enfance et son amour pour sa mère, l'attention passionnée qu'elles portaient l'une et l'autre à la nature.

(1) ombelle du panais sauvage : ombellifère à racine comestible. (2) lancéolés : en forme de fer de lance.   

temps

« enlève le caractère dramatique que le reste de la phase pouvait avoir, grâce à une notation familière. — «La calme et véritable chute ...

volante».

Là encore, variété (le calme et la tempête) introduite par desdirections.

Après les couleurs dont nous avons noté la présence, des lignes dessinent le paysage.

Les sonsrenvoient à la mer que la deuxième phrase du passage introduisait dans un autre contexte.

Apparition, pour lapremière fois, de l'enfant.

Il faut noter à ce sujet le mouvement de celui-ci et de la nature : « arpentais », «happant » en accord avec «la chute», « devenait oblique», «se levait», «la neige volante». — «Avertie par ses antennes ...

un cri».

Deuxième personnage du récit : Sido, la mère de Colette.

Intuition mise enévidence par l'apposition.

«Goûtait le temps» marque l'attention et le plaisir éprouvés à savourer la saison. — «La bourrasque d'Ouest...

» reprend le thème de la tempête et de la protection nécessaire : un peu d'affolementappelle le mouvement. — «Mousse exalté du navire natal».

La mer a préparé l'image du bateau qui doit se replier sur lui-même pour luttercontre la bourrasque. — «Je m'élançais ...

du ciel».

«Exalté» et «enthousiasmé» montrent le plaisir éprouvé.

L'image du mousse souligne lejeu qui naît au contact de la nature et que suscite la mère de Colette.

Notations de couleurs et de son.

«Enfantsd'Ouest et de Février» : l'éclair et le roulement de foudre sont assimilés à des compagnons de jeu un peu effrayants.Univers plein, animation qui couvre les « abîmes du ciel ». — «Je tâchais ...

fin du monde».

Effort d'imagination de l'enfant qui s'amuse à avoir peur.

Mais la conscience du jeureste présente. — «Mais ...

notre jardin».

Contraste entre «le pire du fracas», «l'Ouest rué sur notre jardin», et l'attitude calme etattentive de Sido.

La douceur aussi du verbe «cueillir aux mains même de l'Ouest».

«S'émerveillait» répond àl'enthousiasme de l'enfant.

ORDONNER LES REMARQUES Après cette lecture attentive et linéaire, il convient de regrouper les remarques.

Le commentaire composé impose,en effet, de restructurer le texte. Deux possibilités se présentent alors : l'élève peut avoir, au terme de sa lecture, l'idée des grandes directions quiordonneront sa copie.

Le libellé du sujet l'aide parfois : ainsi «souvenirs d'enfance», «amour pour sa mère»,«attention passionnée qu'elles portaient l'une et l'autre à la nature».

Il est possible aussi que ces directions ne luiapparaissent pas ou que les thèmes proposés par le libellé lui semblent trop déséquilibrés pour fournir un planharmonieux.

Il doit alors minutieusement regrouper tous les détails qu'il a relevés d'abord.

Il est commode deprocéder alors par éléments qui se ressemblent, qui s'opposent.

Ayant recréé de petits ensembles, de petitesunités, il suffira de les rassembler pour composer les lignes directrices du devoir.

C'est cette deuxième démarche quenous utiliserons ici. 1.

Le passé.

Enfance.

Comparaison avec ce qui attire Colette par la suite. 2.

Les contrastes.

La variété des saisons. 3.

Les couleurs. 4.

Les sons. 5.

La violence des éléments. 6.

La précision des termes. 7.

L'abondance.

La richesse. 8.

Le jeu. 9.

Les mouvements. 10.

Les lignes. 11.

La sensibilité (imagination, intuition). 12.

Le goût de la nature.

Émerveillement.

Attention. Si l'on cherche encore à regrouper ces éléments, on peut avoir l'organisation suivante (mais, bien sûr, il peut en. »

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