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Comment comprendre que l'on puisse se mentir à soi-même ?

Publié le 11/01/2004

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mentir
Ainsi, au sujet du rêve, Freud a montré que certains processus, comme la condensation ou le déplacement, permettaient à la conscience de ne saisir qu'une partie du message envoyé par l'inconscient. Un autre processus de la conscience analysé par Freud, celui de la mélancolie, illustre à nouveau cette contradiction entre la conscience et l'inconscient. En effet, lors de la perte d'un être cher par exemple, une des attitudes possibles pour l'homme est la mélancolie, c'est-à-dire le refus d'accepter la mort de cet être cher. Alors qu'une partie de la conscience reconnaît la réalité, une autre partie, gouvernée par l'inconscient, refuse l'évidence. Ce processus d'intériorisation du sur-moi montre encore la possibilité d'un mensonge intérieur.De plus, Freud, en analysant dans sa seconde optique les principes de plaisir et de réalité, montre que l'homme peut se tromper lui-même grâce à son imagination. En effet, le jeune enfant réclamant l'accomplissement de son désir, celui du sein maternel par exemple, se satisfait à travers son imagination. Des images mnésiques lui permettent d'investir son énergie dans un plaisir factice. Ainsi l'inconscient trompe l'activité corporelle de l'enfant en ne satisfaisant pas réellement ses besoins; il y a risque pour lui, s'il n'aboutit pas au principe de réalité et à la satisfaction réelle de ses désirs, de vivre dans un univers factice. Ainsi, le principe de plaisir facilite un nouveau mensonge intérieur, lorsqu'il y a difficulté pour l'enfant d'atteindre le principe de réalité.

• Remarquer que peu importe, pour traiter le sujet, de croire ou de noter qu'il arrive qu' « on désire ce qui a du prix pour les autres «.  Le problème est de savoir si « on « désire toujours ce qui a du prix pour les autres.  • Que désire-t-on ? Qui (ou quoi) désire en nous?  - Selon Hegel, la véritable finalité du désir n'est pas tel ou tel objet sensible mais l'unité de la subjectivité avec elle-même, unité que la conscience cherche à travers la reconnaissance d'un autre désir.  Voir le texte de J. Hyppolite sur la position de Hegel, p. 26 de l'Anthologie philosophique de Grateloup ( Hachette).  - Selon la psychanalyse freudienne, le désir n'est pas fondamentalement désir d'objet : il est des désirs sans objets. Ce qui est vécu comme « manque « par le sujet et qui fait naître une demande fixée sur un objet déterminé trouve sa référence « en réalité « dans le champ des fantasmes inconscients qui renvoient à l'histoire du sujet.

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« Ainsi nous avons vu que le mensonge intérieur pouvait provenir de causes profondément enracinées dans notre inconscient.

Niais on peutégalement se demander si cette dissimulation intérieure n'a pas pour origine des événements extérieurs.Pour l'homme, la principale adversité rencontrée en dehors de lui-même est autrui, dont nous avons besoin pour exister, niais qui, pourSartre, nous réduit à un être ponctuel en nous disant : « tu es...

» et en détruisant ainsi notre être en devenir, notre « pour soi ».

Autruinous donne une étiquette que par facilité nous acceptons.

Ainsi, autrui nous renvoie de nous-mêmes une image fausse, ou du moinsincomplète, que nous supportons en nous mentant à nous-mêmes.

Pour les anti-psychiatres, comme Ronald Laing, le masque que nousportons devant autrui est dû d'abord à une contradiction interne comme nous l'avons vu avec Freud, mais aussi à un refus : celui dereconnaître que nous avons besoin d'autrui.

Comme le pense Sartre, nous pouvons nous mentir à nous-mêmes en adoptant une attitudeindifférente devant autrui.

Nous découvrons donc que devant l'énigme que représente autrui, notre conscience se trouve à nouveaudérivée.

Une partie de cette conscience accepte autrui, une autre le rejette, en se dissimulant l'importance d'autrui.

Nous pouvonsremarquer avec Laing que cet autre peut être aussi bien individuel que collectif, comme une famille ou une société, mais dans tous cescas, la contradiction intérieure a pour origine une opposition extérieure. Une autre de ces oppositions est analysée par les Stoïciens : ce sont les lois de la nature.

Pour eux, ilexiste des événements qui dépendent de notre volonté et d'autres qui n'en dépendent pas.

Ainsi,l'homme ne doit s'occuper que des événements qu'il peut modifier. La source de tout bien et de tout mal que nous pouvons éprouver réside strictement dans notre proprevolonté.

Nul autre que soi n'est maître de ce qui nous importe réellement, et nous n'avons pas à noussoucier des choses sur lesquelles nous n'avons aucune prise et où d'autres sont les maîtres.

Lesobstacles ou les contraintes que nous rencontrons sont hors de nous, tandis qu'en nous résidentcertaines choses, qui nous sont absolument propres, libres de toute contrainte et de tout obstacle, etsur lesquelles nul ne peut agir.

Il s'agit dès lors de veiller sur ce bien propre, et de ne pas désirercelui des autres ; d'être fidèle et constant à soi-même, ce que nul ne peut nous empêcher de faire.

Sichacun est ainsi l'artisan de son propre bonheur, chacun est aussi l'artisan de son propre malheur ens'échappant de soi-même et en abandonnant son bien propre, pour tenter de posséder le biend'autrui.

Le malheur réside donc dans l'hétéronomie : lorsque nous recevons de l'extérieur une loi àlaquelle nous obéissons et nous soumettons.

Nul ne nous oblige à croire ce quel'on peut dire de nous, en bien ou en mal : car dans un cas nous devenons dépendants de laversatilité du jugement d'autrui, dans l'autre nous finissons par donner plus de raison à autrui qu'ànous-mêmes.

Enfin, à l'égard des opinions communes comme des théories des philosophes, oumême de nos propres opinions, il faut savoir garder une distance identique à celle qui est requisedans l'habileté du jeu, c'est-à-dire qu'il faut savoir cesser de jouer en temps voulu.

Dans toutes lesaffaires importantes de la vie, nul ne nous oblige en effet que notre propre volonté. Mais cette philosophie présente apparemment un risque : celui de justifier la passivité d'un homme en limitant son champ d'action.

Dansune optique stoïcienne, un homme passif risque d'invoquer ces limites pour donner un alibi à sa passivité.

Ainsi, l'homme se ment ànouveau à lui-même, un nouveau mensonge qui ménage son confort intellectuel.

De même Spinoza montre qu'en proclamant qu'il estheureux, l'homme est victime d'une illusion, et cette illusion cache un nouveau mensonge.Nous envisageons ici les risques d'une instance supérieure, morale ou religieuse, qui crée de nouvelles contradictions internes.

La moralekantienne, par exemple, ne résout pas tous les problèmes de l'homme.

Il existe des cas pour lesquels une morale ne peut décider à laplace de la conscience.

Pour un homme, se réfugier aveuglément derrière une morale quelconque peut consister à nier sa propreconscience, et donc à réaliser un nouveau mensonge intérieur. Ainsi nous avons découvert que ce mensonge intérieur pouvait aussi bien avoir une origine extérieure qu'une origine provenant del'inconscient.

Il est maintenant bon de Se -demander si, dans un certain sens, un mensonge à soi-même n'est pas profitable à l'homme.Par exemple, dans la philosophie de Platon, il y a une contradiction entre le corps de l'homme et son esprit.

Pour Platon, les sensationsmentent à l'homme, et l'esprit ne doit pas leur faire confiance.

Mais, dans l'optique de Platon, on aboutit cette fois-ci à une dualité entrele corps et l'esprit qui peut créer une contradiction interne.

Mais cette dualité primitive est nécessaire pour arriver à la connaissancesuprême et à la réconciliation du corps et de l'esprit.

De même, l'usage chez Descartes, dans ses Méditations, du doute hyperbolique,oppose la volonté suprême de l'homme, non seulement aux sens trompeurs, mais aussi à toutes les évidences que l'homme a admisesjusque-là.

Là encore, cette contradiction n'est pas réelle, et elle tend vers un but bénéfique : la découverte du cogito et du primat de laconscience.

Enfin, parmi d'autres « mensonges » bénéfiques, on peut invoquer l'illusion d'immortalité, l'homme pouvant vivre en côtoyantsans arrêt la mort.Nous voyons donc que parfois, un mensonge d'une partie de l'individu à une autre partie peut être positive, soit en aboutissant à uneréconciliation des deux parties, soit en garantissant la santé mentale de l'homme.

Il convient toutefois de noter que, dans les casprécédents, le mensonge observé est plus « un procédé », une démarche consciente de l'esprit qu'une véritable dissimulation de la vérité.Contrairement aux autres contradictions relevées plus haut, celles-ci sont conscientes et peuvent cesser lorsque l'homme le désire. Nous pouvons donc conclure qu'un véritable mensonge intérieur ne peut être bénéfique à l'homme, et que leurs efforts doivent tendre ànous débarrasser de ces contradictions.

En remarquant que même les mensonges profondément enracinés dans l'inconscient sont tous enpartie causés par un événement extérieur, un désir refoulé, la mort d'autrui, ou les conditions familiales et sociales, on doit se demandersi la réflexion sur les contradictions internes de l'homme ne doit pas s'accompagner d'une réflexion politique, ou du moins d'unephilosophie de groupe.

Il semble qu'une solution soit apportée par Marcuse dans Éros et civilisation.

Cependant sur la théorie des pulsionsrefoulées de Freud, Marcuse réclame la disparition totale du sur-moi, c'est-à-dire la disparition d'une société coercitive et la disparition de« l'idéal du moi ».

A partir du moment où l'harmonie est retrouvée entre l'individu et autrui, les contradictions internes disparaissent, etnous pouvons nous découvrir nous-mêmes à travers autrui.

Si autrui n'est plus le symbole de l'adversité, mais celui de l'harmonie, il nouspermet d'être en paix avec nous-mêmes, et donc de bannir ces mensonges intérieurs.. »

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