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Comment concevez-vous les rapports de la vertu et du bonheur ?

Publié le 22/03/2004

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Une vie de plaisir revient à développer et à porter à son degré maximal la partie sensitive ne nous distingue en rien des bêtes qui éprouvent comme nous des sensations de plaisir et de peine. Grossière et partielle, la satisfaction hédoniste ne saurait convenir à un animal raisonnable. Le plaisir, par ailleurs, n'est jamais la fin dernière de nos activités, mais une fin surajoutée qui les couronne lorsqu'elles sont menées à bien. Ainsi l'acte de voir, lorsqu'il unit une vue parfaite et un objet parfait, produit une jouissance esthétique. Mais l'acte pourrait se réaliser sans plaisir, car la but de la vision est la perception de l'objet. Le plaisir n'est donc pas la cause finale de l'acte, mais il résulte d'une bonne adaptation de la faculté à son objet. Il apparaît donc comme un luxe, une fin qui s'ajoute à l'acte, qui le perfectionne et le rend plus désirable. « Le plaisir achève l'acte non pas comme le ferait une disposition immanente au sujet, mais comme une sorte de fin survenue par surcroît, de même qu'aux hommes dans la force de l'âge vient s'ajouter la fleur de la jeunesse. » Le plaisir est une sorte de surplus gracieux qui parachève le but. Outre les raisons développées par le stagirite, il faut remarquer que le plaisir ne peut constituer le suprême désirable en vertu de sa nature ponctuelle et éphémère.

« l'excellence du sujet et celle de l'objet connu.

Elle est la vertu de l'intellect, faculté la plus haute de l'homme, et s'attache à un objet parfait, Dieu,substance première.

Le premier moteur remplit toutes les exigences pour être un bien absolu.

Nul ne peut en être dépossédé, ni par un coup du sort,car il est éternel et nécessaire, ni par un mauvais coup d'autrui, car il est partageable et communicable sans dommage.

La satisfaction est totale, àla mesure de son objet.

Ainsi s'éclaire l'étonnante affirmation de la « Métaphysique » : « tous les hommes désirent naturellement savoir ». Toutefois des obscurités demeurent.

Si la sagesse était l'objet du désir humain, tous les « bipèdes sans plumes » que nous sommes devraient être philosophes et mépriser les biens volatils.

C omment se fait-il que, le plus souvent, les hommes dédaignent le suprême désirable ou lui tournent ledos avec indifférence ? Doit-on en conclure qu'ils s'aveuglent sur leur véritable désir ou que le bien souverain n'a pas le pouvoir de les émouvoir ?Aristote est tout à fait conscient de la difficulté et c'est d'ailleurs la raison pour laquelle il critique l'idée platonicienne d'un Bien en soi, principe transcendant et ultime objet de la contemplation.

Il constate qu'un tel bien est inaccessible à l'homme et ne lui est d'aucun secours pour réaliser cequi est à sa portée.

Q uel avantage, se demande-t-il, le tisserand ou le charpentier peut-il retirer de l'existence et de la contemplation d'un tel bien ?De l'avoir contemplé, deviendrait-on meilleur médecin ? C ar ce n'est pas la santé en soi que le médecin vise, ni même celle d'homme en général, maiscelle de tel individu déterminé.

Aristote sous-entend que nous désirons pas une chose parce qu'elle est bonne en soi.

Un bien qui n'est ni praticableni accessible à l'homme ne peut être désiré.

Il se garde toutefois d'en conclure que le bien est relatif aux individus et à leurs aspirations, et reste ence sens fidèle à Platon en affirmant l'existence d'un bien suprême et absolu qui est la fin de toutes nos activités.

Du même coup, toute son éthique va être déchirée par une tension interne inextricable.

D'un côté, il continue d'affirmer avec son maître que la contemplation est la plus haute destinationde l'homme et admet avec lui une fin objective universelle qui détermine les hommes à agir.

De l'autre, il confesse que l'idéal théorétique est leprivilège de la nature divine et qu'il est rarement accessible aux hommes.

« Une vie de ce genre sera trop élevée pour la condition humaine, car ce n'est pas en tant qu'homme qu'on vivra de cette façon, mais en tant que quelque élément divin est présent en nous .

» (« Ethique à Nicomaque » 1177b27).

Il balance entre un bien surhumain et un bien trop humain.

C ela se traduit chez lui par une oscillation entre l'idéal théorétique symbolisépar la sagesse et l'idéal pratique symbolisé par la « prudence ».

La « phronésis » est cette vertu intellectuelle qui est le propre des hommes capables de délibérer correctement sur ce qui leur est bon et avantageux, et d'ordonner leur savoir à la recherche de biens humains.

Le prudent est celui quivoit et prévoit ce qui lui est profitable.

Comme toute délibération implique la possibilité de choisir, la « phronésis » comporte toujours du contingent, car ce qui est nécessaire n'admet pas d'alternative.

Elle varie selon les individus et les circonstances, contrairement à une sagesse immuable etuniverselle.

La prudence est une vertu à caractère humain et, à ce titre, elle ne peut prétendre l'emporter sur une sagesse à caractère divin.

« Il est absurde en effet de penser que la prudence soit la forme la plus élevée de savoir, s'il est vrai que l'homme n'est pas ce qu'il y a de plus excellent dansle monde .

» (1141a20).

De par son aspect humain trop humain, la prudence ne saurait rivaliser avec la sagesse.

Elle serait toutefois la vertu par excellence de l'homme à défaut d'être l'excellence dans la vertu.L'homme se trouve ainsi pris dans le feu croisé d'une pluralité d'objets.

Q ue faut-il viser, la sagesse ou la « phronésis » ? Cruel dilemme, car désirer la sagesse, n'est-ce pas en définitive se condamner au désespoir ? Il n'est pas permis à tous d'être un Anaxagore ou un Thalès et d'acquérir un savoir divin, mais inutile à l'homme.

Désira-t-on alors la prudence ? Elle est ce qu'il y a de mieux, à défaut du bien absolu.

Elle apparaît néanmoins comme lasolution de rechange, le médiocre compromis qui, à un être moyen propose un objectif moyen.

Le mieux n'est-il pas l'ennemi du bien ?Pour Aristote , le duel entre les deux types de sagesse doit faire place à un duo, car l'homme est un dieu par son intellect, mais aussi un animal politique qui doit vivre et agir dans la cité.

Le stagirite préconise donc un genre de vie mixte qui réconcilie la vie contemplative et la vie politique.Mais, son souci de définir un bien à la portée de l'homme le conduit à pousser la synthèse jusqu'à réintégrer dans sa conception du souverain bien lavie de jouissance et le cortège des biens extérieurs.

P our être sage, on n'en est pas moins homme et la contemplation ne saurait suffire à nouscombler.

Loin d' Aristote l'idée que le sage puisse être heureux même dans le ventre du taureau de Phalaris .

Du même coup, le bonheur se trouve composé d'une multitude d'objets savamment hiérarchisés et dosés dont aucun finalement ne peut pleinement satisfaire l'homme, bien que le primatde la contemplation ne soit jamais remis en cause.Tout porte à croire que cette vie mixte est en réalité bâtarde dans la mesure où aucun objet n'est jamais vraiment « ça » comme le dirait Lacan .

Il faudrait bénéficier d'un heureux hasard pour que toutes les composantes du bonheur soient réunies et que le même homme soit sage, prudent, riche ethonoré.

Le bonheur apparaît comme une lointaine chimère.

De là à penser avec Kant qu'il n'est qu'un idéal de l'imagination, il n'y a qu'un pas qu'Aristote ne franchit pas.

Il vous invite cependant à nous demander s'il existe véritablement un objet susceptible de satisfaire nos désirs. B) Bonheur et vertu ne sont pas liés.

Ces dispositions intérieures de l'âme comme la juste mesure, la maîtrise de soi, aussi favorables qu'elles paraissentsouvent à la moralité n'ont pas, cependant, cette valeur absolue que leur attribuait Aristote .

Elles peuvent même se prêter à un mauvais emploi : le courage d'un criminel ne le rend-il donc pas plus odieux ? Seul peut être véritablementbon ce qui l'est par soi, ce qui l'est absolument.

P ar suite, comme le souligne Kant , dans « Fondements de la métaphysique des moeurs », il n'est rien qui puisse être tenu pour absolument bon, si ce n'est seulement une bonne volonté.

Et ce qui fait que la volonté est bonne ou non, « ce ne sont pas ses oeuvres ou ses succès », ni « son aptitude à atteindre tel ou tel but proposé », mais son vouloir même.

La bonne volonté, c'est celle qui se détermine à agir par pur respect du devoir.Or il est bien connu qu'on peut être vertueux tout en étant malheureux, et être heureux sans être vertueux.

On peutmême dire que faire son devoir n'est pas le moyen le plus sûr d'être heureux : agir par devoir, c'est souvent allercontre ses inclinations, ses désirs.

C ertes agir moralement n'implique pas l'ascétisme, et on peut considérer que c'estaussi indirectement un devoir de travailler à son bonheur car un minimum de bien-être est la condition de la vertu.Reste que pour Kant la recherche du bonheur n'a de valeur morale que lorsqu'elle n'est qu'un devoir.

Ainsi un homme gravement malade, qui n'a aucun espoir de recouvrer la santé, peut bien manger ce qu'il veut, quitte à en souffrirensuite, mais l'impératif du bonheur lui commande d'observer les règles de l'hygiène ; c'est dire, au fond, que larecherche du bonheur peut devenir une vertu lorsqu'on a perdu tout espoir d'être effectivement heureux.Si, pour Kant , il y a une certaine opposition entre le bonheur et la vertu, c'est parce que le bonheur obéit à des motivations empiriques rebelles par nature à toute universalisation, alors que le devoir commande universellement.

C eque les hommes nomment le bonheur n'est souvent que l'objet temporaire et accidentel de leur désir.Le bonheur, selon l'expression de Kant , est « un idéal, non de la raison, mais de l'imagination ».. »

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