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Commentaire Composé : Noé de Jean Giono

Publié le 16/03/2012

Extrait du document

giono

Texte

Je prononce d'abord la formule d'exorcisme moderne: Les héros de ce roman appartiennent à la fiction romanesque, et toute ressemblance avec des contemporains vivants ou morts est entièrement fortuite; fortuite également toute similitude de noms propres. Rien n'est vrai. Même pas moi; ni les miens; ni mes amis. Tout est faux. Maintenant, allons-y. Ici commence Noé. Je venais de finir d'écrire Un roi sans divertissement. La tête de Langlois venait à peine d'éclater sur mon papier que je me suis dit (et très violemment) : «Tu as mené ce personnage jusqu'au bout de son destin. II est mort, maintenant. Il est là, étendu par terre dans son sang et sa cervelle répandus. Là-bas, Delphine et Saucisse viennent d'ouvrir la porte du bongalove; elles appellent Langlois comme si elles espéraient qu'il va encore pouvoir leur répondre. Et, est-ce qu'il ne leur répond pas, tel qu'il est là? Est-ce que ce n'est pas une réponse suffisante? Si tu fais tant que d'attendre que Delphine arrive au bord du carnage avec ses petits souliers fins; si tu fais tant que d'essayer de la décrire, retroussant ses jupes audessus du sang et de la cervelle de Langlois comme au bord d'une flaque de boue, tu vas voir que Delphine va vivre. Alors, tu n'as pas fini. Tu sais bien qu'elle est toute neuve. Est-ce qu'elle était préparée à cet éclat? Non. "Tu l'as dit toi-même: elle avait rangé soigneusement les boîtes à cigares de chaque côté de la glace de la cheminée. Et n'oublie pas que tu as parlé de ce tablier blanc (impeccable, à bavette brodée) qu'elle faisait porter à sa petite bonne dans la maison de Grenoble. Tout ça, ce sont des signes. Amène-la seulement jusqu'ici; attends qu'elle ait traversé le labyrinthe de buis (où tu entends déjà qu'elle court en frappant les dalles de ses talons de bottines comme une biche frappe les rochers de ses sabots) et tu verras qu'elle va vivre. Termine-moi ça rondo, pour le moment. Tu ne peux pas te payer le luxe d'une Delphine. «

Jean Giono. Noé. Éditions Gallimard

Paratexte

Jean Giono a toujours pratiqué le mensonge: pour transformer une réalité morne et plate, pour oublier les vicissitudes du sort, vivre dans l'imaginaire lui apparaît comme idéal. Dans ses romans, il projette les représentations fictives que lui inspire sa vision sciemment déformée de la réalité. Dans Noé, il prend comme sujet de sa narration, d'une part, ses errances dans l'imaginaire et, d'autre part, ses promenades dans Marseille et les visions qu'elles engendrent. Dans le passage cidessous, qui ouvre Noé, il se remémore l'état psychologique dans lequel il se trouvait au moment où il achevait sa première chronique, Un roi sans divertissement.

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« répond pas, tel qu'il est là? Est-ce que ce n'est pas une réponse suffisante? Si tu fais tant que d'attendre que Delphine arrive au bord du carnage avec ses petits souliers fins; si tu fais tant que d'essayer de la décrire, retroussant ses jupes au- dessus du sang et de la cervelle de Langlois comme au bord d'une flaque de boue, tu vas voir que Delphine va vivre.

Alors, tu n'as pas fini.

Tu sais bien qu'elle est toute neuve.

Est-ce qu'elle était préparée à cet éclat? Non.

"Tu l'as dit toi-même: elle avait rangé soigneusement les boîtes à cigares de chaque côté de la glace de la cheminée.

Et n'oublie pas que tu as parlé de ce tablier blanc (impeccable, à bavette brodée) qu'elle faisait port er à sa petite bonne dans la maison de Grenoble.

Tout ça, ce sont des signes.

Amène-la seulement jusqu'ic i; attends qu'elle ait traversé le labyrinthe de buis (où tu entends déjà qu'elle court en frappant les dalles de ses talons de bottines comme une biche frappe les rochers de ses sabots) et tu verras qu'elle va vivre.

Termine-moi ça rondo, pour le moment.

Tu ne peux pas te payer le luxe d'une Delphine.

» Jean Giono.

Noé.

Éditions Gallimard Plan : I.

L'invention.

- comment s'élabore-t-elle? - est-elle totale? - quelles sont les implications de ce processus? II.

La sélection des éléments de l'histoire.

- est-elle justifiée? arbitraire? - pourquoi ? - conséquences? III.

Le romancier et ses créatures.

- le romancier et l'illusion romanesque.

- comment l'auteur dialogue-t-il avec lui-même? - qu'est-ce que son état d'esprit trahit sur sa personnalité profonde ?. »

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