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Commentez cette affirmation de Sartre : « Autrui est le médiateur indispensable entre moi et moi-même ». ?

Publié le 12/07/2004

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sartre

Nous pouvons comprendre ainsi : le médiateur indispensable est celui dont je ne peux absolument pas faire l'économie. Non seulement je ne peux pas me passer du médiateur qu'est autrui, mais encore il faut que j'en passe par lui pour me découvrir et me reconnaître. A partir de là le sens du mot médiateur dans la phrase que nous commentons se précise quelque peu. Nous trouvions surprenant que l'on puisse appliquer ce terme à une seule chose (en l'occurence : « moi «). Mais en fait c'est entre moi et moi-même qu'autrui apparaît comme un médiateur indispensable. Le « moi-même « marque la plénitude de mon ipséité, c'est-à-dire de ce qui me caractérise en propre et me distingue de tout autre. Lorsque j'ai honte (parce qu'un autre m'a surpris alors que j'écoutais à une porte par exemple), «J'ai honte de moi devant autrui « (L' Être et le Néant, p. 350). C'est ainsi à bon droit que Sartre peut employer le terme de médiateur à propos d'autrui puisque l'on ne peut pas purement et simplement confondre le premier et le second « moi s. Il y a donc bel et bien « trois dimensions « (p.

sartre

« autrui.

La honte en effet fait non seulement apparaître un moi-objet aux yeux de l'autre, mais aussi « une ipséité(moi-même) qui a honte » (p.

350).

On peut dire que l'affrontement des regards manifeste bien le conflit qui sous-tend toutes mes relations avec autrui.

Le conflit serait ainsi le mode selon lequel s'articulerait le rapport moi-autrui :« Le conflit est le sens originel de l'être-pour-autrui » (p.

431). Or le conflit est-il vraiment le mode fondamental du rapport moi-autrui.

Nous ne le pensons pas.

Nous dirons doncplutôt que le conflit est un des modes de ce rapport, mais non le mode unique ou privilégié.

Lorsque deux personnesregardent le même paysage, il n'y a pas forcément conflit, il peut même fort bien y avoir aide ou compréhension.Prenons un autre exemple.

Supposons que je regarde un tableau avec quelqu'un d'autre ; si l'autre a un regard quiest plus exercé que le mien, il pourra m'apprendre à voir ce tableau.

On peut se demander si les trois dimensions deSartre ne se réduisent pas, malgré tout, aux deux dimensions qu'elles sont initialement, à savoir moi et autrui.

Ilmanquerait ainsi une dimension fondamentale à Sartre : celle du monde.

C'est peut-être parce que Sartre n'a pasanalysé avec suffisamment de densité cette appartenance commune d'autrui et de moi-même au monde que sesdescriptions manquent de nuances et ont un aspect unilatéral (elles se déroulent dans l'horizon du conflit).

Merleau-Ponty a quant à lui bien mieux tenu compte des véritables trois dimensions que sont autrui moi et le monde.

Ils'aperçoit alors qu' « autrui n'est plus tellement une liberté vue du dehors comme destinée et fatalité, un sujet rivald'un sujet, mais qu'il est pris dans le circuit qui le relie au monde, comme nous-mêmes, et par là aussi dans le circuitqui le relie à nous.

— Et ce monde nous est commun, est intermonde (Le Visible et l'Invisible, p.

322).

Autrement ditce qu'on peut rapprocher au sujet, à l'ego sartrien, c'est de n'avoir aucun relief, d'être si l'on veut, un egodésincarné.

L'ego en effet n'est' peut-être pas ce pur pour-soi que décrit Sartre.

Et l'ego auquel pense Merleau-Ponty est bien plutôt celui qui fait corps avec le monde.

Art fond dit Merleau-Ponty :« chez Sartre c'est toujours moi qui fais la profondeur, qui la creuse, qui fais tout, et qui ferme du dedans ma prisonsur moi » (Le Visible et l'Invisible, p.

291).

Il est très vrai qu'en un sens il y a une médiation indispensable d'autruientre moi et moi-même, mais celle-ci n'est pas inéluctablement conflictuelle, et surtout, elle a lieu sur la toile defond du monde.

C'est d'ailleurs pour cette raison, notons-le, que le primat du conflit est supprimé.En transformant ainsi ce que Sartre appelait le « problème d'autrui », on s'aperçoit qu'il ne s'agit peut-être pas tantde parler d'autrui que des autres.

En effet, nous prenons alors « les autres à leur apparition dans la chair du monde» (Merleau-Ponty, Signes, Gallimard, p.

22).

Le problème du rapport moi-autrui est peut-être lié à un certain type dephilosophie qui aurait la double caractéristique d'être une philosophie du sujet et une philosophie de l'existence.

Pourdéfinir les choses de façon très schématique, on pourrait qualifier de philosophie du sujet toute philosophie qui fait,comme nous l'avons déjà dit, de la conscience (le sujet) la source de tout sens.

Les philosophies du sujet posentainsi le primat de l'ego.

Quant à la philosophie de l'existence, on pourrait dire qu'elle s'interroge sur la situation del'homme dans le monde.

C'est dans cette double perspective que Sartre aborde le problème d'autrui.

On peut si l'onveut considérer que la philosophie de l'existence de Sartre dans l'Être et le Néant correspond à une évolutionprécise de la philosophie du sujet.

d'est peut-être parce que Merleau-Ponty, surtout dans sa dernière oeuvreinachevée : Le Visible et l'Invisible, a tenté de se dégager de ce cadre que sa méditation sur les rapports avecautrui prend une autre allure.

Le problème moi-autrui cède la place à une question plus vaste, celle qui concernel'ancrage des autres comme de moi-même dans le monde. Plan: 1) Autrui n'est pas le médiateur entre moi et moi-même (le solipsisme et la certitude du cogito chezDescartes). Le solipsisme Du latin solus, "seul", ipse, "moi-même", le solipsisme est le point limite de l'idéalisme métaphysique : il définit uneattitude du sujet pour lequel rien n'existe en dehors de sa conscience.

Tout se passe dans la solitude du moi : jesuis seul dans ma tête et ne puis entrer dans la conscience d'autrui.

Dans cette perspective, les autres se réduisentà n'être que de pures fictions créées par mon esprit. Pour le solipsisme • Descartes, découvrant le cogito, aboutit à une unique certitude après le doute : la seule existence de son êtrepensant.

Quant à l'existence des choses et à celle d'autres consciences, elle n'est pas encore avérée et faitproblème.

Nous ne pourrions imaginer autrui que par le subterfuge d'un raisonnement par analogie.

La conscienced'autrui découlerait ainsi de la conscience de soi.. »

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