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La conscience de soi doit-elle quelque chose à la présence d'autrui ?

Publié le 31/08/2004

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conscience

Kant, Anthropologie du point de vue pragmatique, 1798.Dès le moment où l'enfant commence à parler de lui à la première personne - moment décisif et irréversible -, il se saisit lui-même comme sujet pensant et conscient. Cette faculté de la conscience à se prendre elle-même pour objet, qu'on appelle la « réflexivité « de la conscience, fait de l'être humain une personne, c'est-à-dire, chez Kant, un sujet moral responsable constituant une fin en soi. Conscience : « C'est le savoir revenant sur lui-même et prenant pour centre la personne humaine elle-même, qui se met en demeure de décider et de se juger. « Alain, Définitions, 1953 (posth.)La conscience réfléchie, par laquelle chacun prend conscience de ses propres états de conscience, est aussi conscience morale. Car, portant mon attention sur mes véritables intentions, je suis à même d'en examiner la rigueur et la valeur morales. « La seule façon d'exister pour la conscience c'est d'avoir conscience qu'elle existe. « Sartre, L'Imagination, 1936. « Connais-toi toi-même.

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« chose pensante qu'après m'être coupé, par le doute, du monde et de mes semblables.

Autrui ne tarde pourtant pasà resurgir, en la personne de Dieu, dans le fil des méditations cartésiennes.

Je ne puis, en effet, me concevoir fini etimparfait qu'en ayant préalablement conscience d'une infinie perfection, dont l'idée est jetée en moi par un Êtrecapable de la produire : Dieu.

Ainsi Descartes découvre-t-il au plus intime de lui-même une altérité sans laquelle iln'aurait pas pleinement conscience de lui-même.b) On sait, en outre, qu'il n'est pas plus facile à un esprit de s'observer au moment où il pense qu'il l'est à notre oeiltant qu'aucun miroir ne nous est tendu.

Auguste Comte nous a appris à nous défier du mythe d'une aperceptionimmédiate de l'esprit par lui-même.

Notre conscience est d'abord tout entière tournée vers ce qui n'est pas elle,focalisée vers le spectacle qu'elle contemple.

Ce n'est qu'à la faveur du regard qu'autrui porte sur nos actes quenous devenons nous-même l'objet de notre conscience. c) "Je viens de faire un geste maladroit ou vulgaire : ce geste colle à moi, jene le juge ni le blâme, je le vis simplement [...].

Mais voici tout à coup que jelève la tête : quelqu'un était là et m'a vu.

Je réalise tout à coup toute lavulgarité de mon geste et j'ai honte.

[...] Or autrui est le médiateurindispensable entre moi et moi-même : j'ai honte de moi tel que j'apparais àautrui.

Et, par l'apparition même d'autrui, je suis mis en mesure de porter unjugement sur moi-même comme sur un objet [...].

Mais pourtant cet objetapparu à autrui, ce n'est pas une vaine image dans l'esprit d'un autre.

Cetteimage en effet serait entièrement imputable à autrui et ne saurait me"toucher".

[...

] la honte est, par nature, reconnaissance.

Je reconnais queje suis comme autrui me voit." SARTRE Chacun connaît la célèbre formule que l'on trouve dans huis clos "l'enfer, c'estles autres".

Ici, Sartre en explique les fondements philosophiques, alors qu'ilen donne une illustration plus vivante dans son théâtre. Problématique. Sartre part d'un exemple, d'une situation particulière, vécue, l'expérience dela honte.

Si l'ai honte d'un de mes actes, c'est parce que le reconnais que leregard moqueur ou méprisant d'un autre serait tout à fait légitime, et que, assistant à la même scène, je réagirais de la même manière.

Mon acte est alors effectivement "honteux", et je luiaccorde une valeur objective. Enjeux. On peut utiliser les arguments développés par Sartre lui-même pour nuancer la portée de ce texte.

Car après tout,je ne puis avoir honte que si je reconnais mon acte comme honteux, et si je décide à l'avance d'accorder au pointde vue des autres un caractère objectif.

Après tout, si j'ai commis cet acte (regarder par le trou d'une serrure),j'avais peut-être de bonnes raisons, ou je sais que de telles choses peuvent se faire, qu'elles font partie de ce quiest humainement possible.

En tout cas, la honte apparaît bien comme une des figures de la servitude. III — La pensée est-elle possible hors d'une communauté humaine ? a) Plus radicalement peut-être, il est permis de se demander si la pensée elle-même serait possible sans langage.Bergson, si souvent critique à l'égard de celui-ci, reconnaît que la pensée demeure confuse tant qu'elle ne s'est pasextériorisée dans la forme objective, universelle du langage.

« Pour que la pensée devienne distincte, écrit-il, il fautbien qu'elle s'éparpille en mots ; nous ne nous rendons bien compte de ce que nous avons dans l'esprit que lorsquenous avons pris une feuille de papier, et aligné les uns à côté des autres des termes qui s'entrepénétraient.

» Or, sila parole est l'une des dispositions innées de l'esprit humain, nul ne peut remettre en question l'idée que l'acquisitiond'un langage qui lui permette de se manifester soit liée à un apprentissage, que la vie sociale peut seule garantir.b) Autrement dit, une pensée solitaire est celle d'une conscience qui s'est isolée d'une communauté préalable, sanslaquelle elle eût été impossible.

Descartes n'est jamais seul : avant de rencontrer Dieu, il rencontre ses semblablesen s'exprimant dans leur langue.

« Je pense, donc je suis » est, autant que l'on sache, un énoncé formulé dans unelangue que Descartes n'a pas inventée.

Et tout autant que mon existence, le cogito cartésien prouve l'existence dela société.c) Les Grecs connaissaient mieux que Descartes leur dette à l'égard de la communauté à laquelle ils appartenaient.Platon lui-même a toujours refusé de dissocier recherche de la vérité et dialogue ; Socrate, son maître, ayant faitde la formule delphique « connais-toi toi-même » sa devise, n'a cessé de débattre avec ses concitoyens. Connais-toi toi même Il ne s'agit pas pour Socrate de se livrer à une investigation psychologique, mais d'acquérir la science des valeursque l'homme porte en lui.

Cette science importe essentiellement — bien avant de connaître la nature ou les dieux.Comment conduire sa vie pour être heureux ; voilà la question qui hante tous les hommes.

L'opinion, confortée encela par les sophistes, identifie le bonheur à la jouissance, au pouvoir, à la fortune, à la beauté.

Sans doute tout. »

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