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LA CULTURE DE L'AVENIR: G. BERGER, Le Monde en devenir

Publié le 13/10/2011

Extrait du document

culture

 

Nous devons briser les vieilles routines de l'humanisme classique

pour être à sa taille. Et je pense que l'Université doit être un des

moteurs du progrès. C'est d'elle que l'anthropologie prospective qui

mettra en circulation les nouvelles données modernes du savoir, doit

recevoir ses lettres officielles. Je considère comme très important que

ce soient des hommes de science qui méditent aujourd'hui sur les fins

dernières, qui s'interrogent sur les raisons de vivre, qui proposent de

nouvelles définitions de l'homme. Cette situation n'a pu s'établir que

grâce au rayonnement de la culture universitaire. Or, les hommes

qu'elle a formés, les produits qu'elle a mis en circulation, doivent

maintenant revenir en son sein et l'enrichir. Les savants et les chefs

d'entreprise doivent proposer à l'Université la nouvelle forme de son

ambition :former les hommes de l'avenir. En échange, cette science

et ces entreprises recevront une sagesse, une culture qui accroîtront

leur vrai pouvoir sur le monde. Le nouvel humanisme ne peut croître

que de cette union.

Est progrès ce qui accroît le pouvoir lucide de l'homme, sa maîtrise

sur lui-même et sur les lois de la nature, ce qui lui permet de triompher

des forces de l'absurde, ce qui suscite son enthousiasme, sa joie de

vivre, sa qualité d'être ... Je crois que l'Occident doit faire un palier. Il

ne s'agit plus maintenant pour les meilleurs esprits de ce temps

d'accroître la productivité, de multiplier les biens de consommation,

de développer l'information et le confort. Ce stade primaire du progrès

va atteindre son seuil, dans une durée très prévisible. Le temps est

passé où l'on pouvait parler de l'homme en termes de consommation

ou de production, d'électeur ou de prolétaire, de sous-développé ou

de ploutocrate. L'humanité a atteint un état complexe supérieur où

toutes les données de l'économie, de la culture, de la politique s'interpénètrent.

Toutes les courbes se rejoignent et « quelque chose «

apparaît à ce point ultime : un certain homme se profile. L'homme du

progrès, justement, que la prospective veut définir, qu'elle s'efforce

de concevoir totalement avec ses exigences intimes, en opposition à

cet homme écartelé, mutilé, spécialisé, que notre époque a installé

dans des cases qui se nomment école, usine, magasin, etc. Le progrès

c'est quand nous cesserons d'entrer dans l'avenir à reculons, pour le

vouloir.

Dans tous les lieux où des hommes responsables ont pris conscience

de la relativité de nos connaissances, de la faiblesse de notre

style de vie, de la pauvreté de nos ambitions, il existe une classe de

civilisés qui a décidé de ne pas assister les bras croisés à la mort des

cités. La prospective leur proposera une discipline d'exploration du

futur. Une sorte de cartésianisme pour spéculer sur le temps, avec

d'infinies précautions certes, de nombreuses réserves, mais une possibilité

certaine d'extrapolation, de prévisions, de déterminisme. Et

cet élan, ce dynamisme fera partie, un jour, du sens culturel de certains

esprits.

La culture n'est pas une f in en soi, c'est un capital qu'il s'agit de

mettre en circulation, une expérience de la qualité qui n'a de valeur

que si elle vous rend plus libre, plus assuré de vos incertitudes, plus

grand pour triompher des erreurs. La culture doit seulement vous préparer

au voyage vers tous les<< peut-être «. L'art, et spécialement la

peinture, m'apparaît comme le film des états d'âme de l'humanité; le

livre d'heures de ses angoisses, de ses rêves, de ses erreurs; rien

n'est plus prospectif que la confrontation d'un esprit même non préparé

avec une oeuvre. S'il peut s'établir un dialogue, même subconscient,

entre une toile et un cerveau. c'est un voyage dans le temps qui

s'opère, une confrontation qui oblige à s'évader hors des limites de

l'espace. C'est, en quelque sorte, le premier indice d'un pouvoir sur le

temps. La contemplation artistique est un élément de l'éducation telle

que je la conçois. C'est même sur un certain plan un exercice intellectuel

indispensable à l'équilibre d'un esprit. L'art, qui peut aussi être

considéré comme de la culture mise en forme, est un grand catalyseur.

L'avenir est en esquisse dans l'intuition des créateurs . Une

grande synthèse prospective ne peut négliger le mouvement artistique

comme force prophétique, cristallisation des aspirations, noeud

des forces conservatrices et dynamiques.

Je rêve de faire asseoir ensemble artistes, ingénieurs, chefs

d'entreprises, universitaires, hommes de science pour rechercher un

langage commun. Ce serait là un travail éminemment prospectif.

G. BERGER, Le Monde en devenir. Encyclopédie permanente, Larousse.

Pour briser l'humanisme classique, il faudrait que s'instaure une collaboration entre l'université et les hommes qu'elle a formés : ceux-ci, engagés dans la vie active, aideraient celle-là à définir un nouvel humanisme. L'homme se cultivera de tout ce qui le fera progresser, au-delà des catégories idéologiques dans lesquelles on l'enferme....

culture

« qu'elle a formés, les produits qu'elle a mis en circulation, doivent maintenant reven ir en son sein et l'enrichir .

Les savants et les chefs d'entreprise doivent proposer à l'Université la nouvelle forme de son ambition :former les hommes de l'avenir .

En échange , cette science et ces entreprises recevront une sagesse , une culture qui accroîtront leur vrai pouvoir sur le monde .

Le nouvel humanisme ne peut croître que de cette union.

Est progrès ce qui accroît le pouvoir lucide de l'homme, sa maîtrise sur lui-même et sur les lois de la nature, ce qui lui permet de triompher des forces de l'absurde, ce qui suscite son enthousiasme , sa joie de vivre , sa qualité d'être ...

Je crois que l'Occident doit faire un palier .

Il ne s'agit plus maintenant pour les me illeurs esprits de ce temps d'accroître la productivité , de multiplier les biens de consommation , de développer l'information et le confort.

Ce stade primaire du progrès va atteindre son seuil, dans une durée très prévis ible .

Le temps est passé où l'on pouva it parler de l'homme en termes de consommation ou de production, d'électeur ou de prolétaire, de sous-développé ou de ploutocrate .

L'humanité a atteint un état complexe supérieur où toutes les données de l'économie, de la culture, de la politique s'inter­ pénètrent .

Toutes les courbes se rejoignent et « quelque chose » apparaît à ce point ultime : un certain homme se profile .

L'homme du progrès, justement, que la prospective veut définir, qu'elle s'efforce de concevoir totalement avec ses exigences intimes, en oppos ition à cet homme écartelé , mutilé, spécialisé, que notre époque a installé dans des cases qui se nomment école , usine, magasin, etc .

Le progrès c'est quand nous cesserons d'entrer dans l'avenir à reculons, pour le vouloir.

Dans tous les lieux où des hommes responsables ont pris cons­ cience de la relativité de nos connaissances, de la faiblesse de notre style de vie, de la pauvreté de nos ambit ions , il existe une classe de civilisés qui a décidé de ne pas assister les bras croisés à la mort des cités.

La prospective leur proposera une discipline d'exploration du futur .

Une sorte de cartésian isme pour spéculer sur le temps, avec d'infin ies précautions certes, de nombreuses réserves, mais une pos­ sibilité certaine d'extrapolation, de prévisions, de déterminisme .

Et cet élan, ce dynamisme fera partie, un jour, du sens culturel de cer­ tains esprits.

La culture n'est pas une fin en soi, c'est un capital qu'il s'agit de mettre en circulation, une expérience de la qualité qui n'a de valeur. »

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