Devoir de Philosophie

Descartes: Qu'est-ce que la nature ?

Publié le 08/03/2005

Extrait du document

descartes
Sachez donc, premièrement, que par la Nature je n'entends point ici quelque Déesse, ou quelque autre sorte de puissance imaginaire, mais que je me sers de ce mot pour signifier la Matière même en tant que je la considère avec toutes les qualités que je lui ai attribuées comprises toutes ensemble, et sous cette condition que Dieu continue de la conserver en la même façon qu'il l'a créée. Car, de cela seul qu'il continue ainsi de la conserver, il suit de nécessité qu'il doit y avoir plusieurs changements en ses parties, lesquels ne pouvant, ce me semble, être proprement attribués à l'action de Dieu, parce qu'elle ne change point, je les attribue à la Nature ; et les règles suivant lesquelles se font ces changements, je les nomme les lois de la Nature.

Dans la sixième partie du « Discours de la méthode « (1637), Descartes met au jour un projet dont nous sommes les héritiers. Il s’agit de promouvoir une nouvelle conception de la science, de la technique et de leurs rapports, apte à nous rendre « comme maître et possesseurs de la nature «. Descartes n’inaugure pas seulement l’ère du mécanisme, mais aussi celle du machinisme, de la domination technicienne du monde.  Si Descartes marque une étape essentielle dans l’histoire de la philosophie, c’est qu’il rompt de façon radicale et essentielle avec sa compréhension antérieure. Dans le « Discours de la méthode «, Descartes polémique avec la philosophie de son temps et des siècles passés : la scolastique, que l’on peut définir comme une réappropriation chrétienne de la doctrine d’Aristote.

descartes

« Dans la sixième partie du « Discours de la méthode » (1637), Descartes met au jour un projet dont nous sommes leshéritiers.

Il s'agit de promouvoir une nouvelle conception de la science, de la technique et de leurs rapports, apte ànous rendre « comme maître et possesseurs de la nature ».

Descartes n'inaugure pas seulement l'ère du mécanisme,mais aussi celle du machinisme, de la domination technicienne du monde.Si Descartes marque une étape essentielle dans l'histoire de la philosophie, c'est qu'il rompt de façon radicale etessentielle avec sa compréhension antérieure.

Dans le « Discours de la méthode », Descartes polémique avec laphilosophie de son temps et des siècles passés : la scolastique, que l'on peut définir comme une réappropriationchrétienne de la doctrine d'Aristote.Plus précisément, il s'agit dans notre passage de substituer « à la philosophie spéculative qu'on enseigne dans lesécoles » une « philosophie pratique ».

La philosophie spéculative désigne la scolastique, qui fait prédominer lacontemplation sur l'action, le voir sur l'agir.

Aristote et la tradition grecque faisaient de la science une activité libreet désintéressée, n'ayant d'autre but que de comprendre le monde, d'en admirer la beauté.

La vie active est conçuecomme coupée de la vie spéculative, seule digne non seulement des hommes, mais des dieux.Descartes subvertit la tradition.

D'une part, il cherche des « connaissances qui soient fort utiles à la vie », d'autrepart la science cartésienne ne contemple plus les choses de la nature, mais construit des objets de connaissance.Avec le cartésianisme, un idéal d'action, de maîtrise s'introduit au cœur même de l'activité de connaître.La science antique & la philosophie chrétienne étaient désintéressées ; Descartes veut, lui, une « philosophiepratique ».

« Ce qui n'est pas seulement à désirer pour l'invention d'une infinité d'artifices qui feraient qu'on jouiraitsans aucune peine des fruits de la terre et de toutes les commodités qui s'y trouvent, mais principalement aussipour la conservation de la santé […] »La nature ne se contemple plus, elle se domine.

Elle ne chante plus les louanges de Dieu, elle est offerte à l'hommepour qu'il l'exploite et s'en rende « comme maître & possesseur ».Or, non seulement la compréhension de la science se voit transformée, mais dans un même mouvement, celle de latechnique.

Si la science peut devenir pratique (et non plus seulement spéculative), c'est qu'elle peut s'appliquerdans une technique.

La technique n'est plus un art, un savoir-faire, une routine, elle devient une science appliquée.D'une part, il s'agit de connaître les éléments « aussi distinctement que nous connaissons les métiers de nosartisans ».

Puis « de les employer de même façon à tous les usages auxquels ils sont propres ».

Il n'est pasindifférent que l'activité artisanale devienne le modèle de la connaissance.

On connaît comme on agit ou ontransforme, et dans un même but.

La nature désenchantée n'est plus qu'un matériau offert à l'action de l'homme,dans son propre intérêt.

Connaître et fabriquer vont de pair.D'autre part, il s'agit « d'inventer une infinité d'artifices » pour jouir sans aucune peine de ce que fournit la nature.La salut de l'homme provient de sa capacité à maîtriser et même dominer techniquement, artificiellement la nature.Ce projet d'une science intéressée, qui doive nous rendre apte à dominer et exploiter techniquement une naturedésenchantée est encore le nôtre.Or la formule de Descartes est aussi précise que glacée ; il faut nous rendre « comme maître et possesseur de lanature ».

« Comme », car Dieu seul est véritablement maître & possesseur.

Cependant, l'homme est ici décrit commeun sujet qui a tous les droits sur une nature qui lui appartient (« possesseur »), et qui peut en faire ce que bon luisemble dans son propre intérêt (« maître »).Pour qu'un tel projet soit possible, il faut avoir vidé la nature de toute forme de vie qui pourrait limiter l'action del'homme , et poser des bornes à ses désirs de domination & d'exploitation.

C'est ce qu'a fait la métaphysiquecartésienne, en établissant une différence radicale de nature entre corps & esprit.

Ce qui relève du corps n'estqu'une matière inerte, régie par les lois de la mécanique.

De même en assimilant les animaux à des machines,Descartes vide la notion de vie de tout contenu.

Précisons enfin que l'époque de Descartes est celle où Harveydécouvre la circulation sanguine, où le corps commence à être désacralisé, et les tabous touchant la dissection, àtomber.Car ce qu'il y a de tout à fait remarquable dans le texte, c'est que le projet de domination technicienne de la naturene concerne pas que la nature extérieure et l'exploitation des ressources naturelles.

La « philosophie pratique » estutile « principalement aussi pour la conservation de la santé ».

Le corps humain lui aussi, dans ce qu'il a de naturel,est objet de science, et même objet principal de la science.

« S'il est possible de trouver quelque moyen qui rendeles hommes plus sages et plus habiles qu'ils n'ont été jusqu'ici, je crois que c'est dans la médecine qu'on doit lechercher.

»La véritable libération des hommes ne viendrait pas selon Descartes de la politique, mais de la technique et de lamédecine.

Nous deviendrons « plus sages & plus habiles », nous vivrons mieux, en nous rendant « comme maîtres &possesseurs de la nature ».

La science n'a pas d'autre but.. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles