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DESCARTES: l'opinion vulgaire

Publié le 27/02/2008

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descartes
Il faut (donc) entièrement rejeter l'opinion vulgaire qu'il y a hors de nous une fortune qui fait que les choses arrivent ou n'arrivent pas, selon son plaisir, et savoir que tout est conduit par la Providence divine, dont le décret éternel est tellement infaillible et immuable, qu'excepté les choses que ce même décret a voulu dépendre de notre libre arbitre, nous devons penser qu'à notre égard il n'arrive rien qui ne soit nécessaire et comme fatal, en sorte que nous ne pouvons sans erreur désirer qu'il arrive d'autre façon. Mais parce que la plupart de nos désirs s'étendent à des choses qui ne dépendent pas toutes de nous ni toutes d'autrui, nous devons exactement distinguer entre elles ce qui ne dépend que de nous, afin de n'étendre notre désir qu'à cela seul ; et pour le surplus, encore que nous en devions estimer le succès entièrement fatal et immuable, afin que notre désir ne s'y occupe point, nous ne devons pas laisser de considérer les raisons qui le font plus ou moins espérer, afin qu'elles servent à régler nos actions : car, par exemple, si nous avons affaire en quelque lieu où nous puissions aller par deux divers chemins, l'un desquels ait coutume d'être beaucoup plus sûr que l'autre, bien que peut-être le décret de la Providence soit tel que si nous allons par le chemin qu'on estime le plus sûr nous ne manquerons pas d'y être volés, et qu'au contraire nous pourrons passer par l'autre sans aucun danger, nous ne devons pas pour cela être indifférents à choisir l'un ou l'autre, ni nous reposer sur la fatalité immuable de ce décret ; ...mais la raison veut que nous choisissions le chemin qui a coutume d'être le plus sûr ; et notre désir doit être accompli touchant cela lorsque nous l'avons suivi, quelque mal qu'il nous en soit arrivé, à cause que ce mal ayant été à notre égard inévitable, nous n'avons eu aucun sujet de souhaiter d'en être exempts, mais seulement de faire tout le mieux que notre entendement a pu connaître, ainsi que je suppose que nous avons fait. Et il est certain que lorsqu'on s'exerce à distinguer ainsi la fatalité de la fortune, on s'accoutume aisément à régler ses désirs en telle sorte que, d'autant que leur accomplissement ne dépend que de nous, ils peuvent toujours nous donner une entière satisfaction.DESCARTES

Descartes ici reprend une problématique qui a déjà été étudiée notamment par les antiques. On retrouve d’ailleurs des accents stoïciens dans ce texte. Il s’agit en effet de savoir si notre vie est déjà écrite et dans quelle mesure nous avons la maîtrise de notre destin. Une thèse commune tient notre vie pour soumise à une fatalité. Dans ce cas là, à quoi bon réfléchir sur nos actions, si tout est déjà réglé ? Que pouvons nous espérer de la vie, de nos désirs et de notre entendement ?

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