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La désobéissance à la loi peut-elle être un devoir ?

Publié le 16/02/2004

Extrait du document

 

Droit et devoir sont deux notions corrélatives. Ce qui est un droit pour moi correspond chez autrui à une obligation à mon égard, et inversement. Le salarié a le droit d'exiger de son employeur le respect des conventions collectives et du droit du travail. L'employeur a le droit d'exiger 35 heures de travail et de présence hebdomadaire. Ne multiplions pas les exemples.

Nous vous conseillons un plan en deux parties :

  • 1. Dans une première partie, interrogez-vous sur le devoir d'obéissance à la loi, et sur les implications. Droit et devoir existent dans une réciprocité fondamentale.
  • 2. Dans la seconde partie, montrez la nécessité morale de la désobéissance lorsque la conscience morale désapprouve la loi. Pensez à l'impératif catégorique kantien et au devoir d'insurrection.

« La désobéissance à la loi peut-elle être un devoir ? Injustement condamné à boire la cigüe, Socrate refusera de s’enfuir par respect pour les lois.

Cette considération inconditionnelle affirme la nature sacrée desinstitutions.

La loi, prescription établie par l’Etat et applicable à tous, définit les droits et devoirs de chacun.

Elle est également une condition à la liberté car il s’agitlà d’un contrat, un engagement libre et volontaire par lequel des individus renoncent à leur liberté naturelle, c'est-à-dire ne pas entraver la liberté d’autrui pour ne pasêtre soumis.

En échange, leur liberté, droits et sécurité sont garantis.

Mais puisqu’il s’agit de lois en société et non de lois intérieures que l’on choisit pour soi, quefaire lorsque ces lois sont injustes ? Jusqu'à quel point le principe de légalité doit prévaloir sur celui de justice ? La désobéissance à la loi peut-elle être un devoir ?Un devoir est quelque chose auquel on est obligé par rapport à la morale, les convenances ou par la loi.

Nous verrons donc dans une première partie que la loi est unecondition à la liberté, et que lui désobéir est ainsi s’en priver soi-même, puis nous verrons dans quelles situations la désobéissance à loi peut être un devoir, enfin nousnous demanderons s’il vaut mieux obéir à la loi ou à sa propre conscience. Selon l’article 4 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1793, « La loi est l’expression libre et solennelle de la volonté générale ; elle est la mêmepour tous, soit qu’elle protège, soit qu’elle punisse ; elle ne peut ordonner que ce qui est juste et utile à la société ; elle ne peut défendre que ce qui lui est nuisible.

»Dans ce cas précis, désobéir ne peut être un devoir, car nos seuls devoirs en société seraient de respecter la loi, non pas le contraire.

La loi n’est pas une contrainte, ordésobéir est un refus de se soumettre à la contrainte.

Elle nous libère de l’arbitraire d’autrui, des jeux de force et de domination entre Hommes.

Sans loi, on seraitreconduit à l’asservissement et à la violence.

Ainsi ce serait l’anomie, une situation de désordre social, sans lois, sans règles, où les différends se régleraient par laseule violence physique.Les lois ne sont donc pas faites pour être transgressées, contrairement à ce que prétend la fameuse expression littéraire, car leur existence est une condition nécessaireà la justice.

De plus, elles imposent le respect d’autrui, dont le respect de la propriété, de culte, de liberté de paroles, etc.

Les lois me garantissent donc le fait que mesbiens resteront les miens, de prier n’importe quel Dieu, une liberté de m’exprimer sur un sujet toujours dans le respect des autres sans qu’autrui intervienne dans lebut de me censurer.

Les lois garantissent également ma sécurité et la paix sociale.

L’enfreindre serait donc ne pas profiter pleinement de toutes ces garanties en n’enprivant les autres.

Enfin, ne pas respecter la loi est à l’origine de conséquences.

Selon l’article 7 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789« Tout Citoyen appelé ou saisi en vertu de la Loi doit obéir à l’instant : il se rend coupable par la résistance ».

C’est être donc responsable, d’un crime, d’un délit, quiest à l’origine d’une faute.

« On le forcera à être libre » dit Rousseau.

Ce qui présuppose que désobéir à la loi est une erreur passable de condamnations.Dieu est l'auteur de l'ordre naturel: la loi exige que l'on mette de l'ordre dans sa vie.

Ainsi, ne pas suivre la loi, c'est pour Rousseau, mettre du désordre et désobéir àDieu qui a voulu l'ordre.

Socrate, quant à lui, considère le respect de la loi positive comme un absolu : mieux vaut perdre la vie que désobéir.

Goethe affirme mêmequ’il vaut « mieux vaut une injustice qu'un désordre ».Mais, lorsque la loi politique fait abstraction de la morale individuelle, n'y a-t-il pas un droit de la conscience morale à la révolte ? Selon l’article 11 de la Déclaration des Droits de l’Homme de 1793, « Tout acte exercé contre un homme hors des cas et sans les formes que la loi détermine, estarbitraire et tyrannique ; celui contre lequel on voudrait l’exécuter par la violence a le droit de le repousser par la force ».

Il s’agit donc là d’une résistance légitime,que l’on a droit d’exercer par la force c'est-à-dire en utilisant des moyens hors la loi.

La désobéissance est alors permise.

Ainsi, selon Locke, puisqu'il peut y avoir desabus, et puisque la communauté ne peut en aucun cas être privée de ses droits, il faut que la communauté ait aussi un droit de résistance.Ce droit de résistance se transforme même en devoir selon l’article 35 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1793 qui stipule que « Quand legouvernement viole les droits du peuple, l’insurrection est, pour le peuple et pour chaque portion du peuple, le plus sacré des droits et le plus indispensable desdevoirs.» L’insurrection qui est le fait de se soulever contre le pouvoir établi dans le but de le renverser.

Durant le procès de Nuremberg ainsi, les juges ne prêtèrentattention au principe de l'obéissance due aux lois.

Ils ont ainsi transformé le droit de désobéissance en un devoir dont l'inaccomplissement mérite la punitioncorrespondante pour des Hommes qui n’ont pas su faire prescription des lois.

Désobéir est ainsi un devoir envers la liberté.Selon Rawls, la désobéissance civile peut être définie comme un acte public, non violent, décidé en conscience, mais politique, contraire à la loi et accompli le plussouvent pour amener un changement dans la loi ou bien dans la politique du gouvernement.

En agissant ainsi, on s'adresse au sens de la justice de la majorité de lacommunauté et on déclare que, selon une opinion mûrement réfléchie, les principes de coopération sociale entre des êtres libres et égaux ne sont pas respectés.

Ellen'est pas explicitement reconnue juridiquement dans la hiérarchie des normes françaises.

Toutefois l'article 2 de la Déclaration des droits de l'Homme et duCitoyen dispose que : « Le but de toute association est la conservation des droits naturels et imprescriptibles de l’Homme.

Ces droits sont la liberté, (…) et larésistance à l’oppression ».

Il existe de nombreux exemples de désobéissance civile, comme celui du Civil Rights Movement qui a eu lieu aux Etats Unis durant leslois ségrégationnistes avec entre autres comme leader, Martin Luther King ou du mouvement non violent en Inde dirigé par Gandhi contre le système britanniquecolonialiste.De cette façon la loi permet elle-même une désobéissance à ses règles si elles deviennent arbitraires ou tyrannique, une désobéissance qui devient même obligatoirelorsque la liberté de tout un peuple est menacée.

Mais des lois si elles peuvent être injustes, ne perdraient-elles pas tout leur sens ? Et dans ce cas ne vaudrait-il pasmieux obéir à sa propre conscience et non pas aux lois ? Il existe des lois que la population sait inutiles, mais alors qu’elles sont toujours en vigueur, le peuple n’hésite pas à les transgresser.

Une abrogation de l’interdictiondu port de pantalon pour les femmes en France n’a, par exemple, été demandé que récemment, il y a quelques semaines seulement.

En effet, une loi pourtantpostrévolutionnaire, indique que les femmes ont interdiction de se « travestir » avec exception pour état de santé.

Plus tard, la loi sera modifiée en incluant dans lesexceptions le vélo et l’équitation, mais jusqu’à notre époque elle ne sera pas abrogée cependant tombée dans la désuétude.

La loi contre le port du pantalon, ne faitainsi pas le poids avec l’assouplissement des mœurs qui est notamment passé par une désobéissance de féministes, refusant de se soumettre à cette loi injuste.Cependant, la conscience ne suffit pas elle-même à être juste.

L’importance du contrat réside en ce qu’il s’agit là d’un apprentissage au peuple d’un certain ordre quidoit être respecté.

Si le peuple a besoin de telles règles, c’est parce qu’il serait bien incapable par lui-même de maintenir une paix sociale.

En effet, les conflitsd’intérêts entreraient toujours en jeu, et l’instinct primaire de vengeance serait roi.Néanmoins, si être juste consistait simplement à obéir aux lois de son pays, cela signifierait que la justice ne serait pas une valeur universelle, mais qu’elle seraitrelative à un lieu, à une époque.

C’est pour cela que l’Homme dispose de droits naturels, comme par exemple les Droits de l’Homme, qui prennent en considérationla nature de l’Homme et sa finalité dans le monde.

Ces droits sont, par principe, issus de la nature humaine et donc communs à chacun, peu importe l’ethnie, laposition sociale, la nationalité ou toute autre considération.La désobéissance à la loi peut donc être un devoir mais dans certaines situations et dans certaines limites.

Le peuple n’étant pas totalement dépourvu de bon sens,saura revendiquer ses droits qu’il estime naturels lorsqu’une loi lui paraitra injuste et sera même dans l’obligation de se révolter contre le despotisme.

De plus, ledroit naturel étant supposé exister partout même s'il n'est pas effectivement appliqué et sanctionné, n'est donc pas nécessairement un droit opposable; étant fondé surla nature humaine et non sur la réalité sociale dans laquelle vit chaque individu, le droit naturel est réputé universellement valable même dans les lieux et auxépoques où il n'existe aucun moyen concret de le faire respecter, ce qui donne ainsi l’autorisation de le faire par la force lorsque l’on estime cela juste.

Toutefois,peut-on estimer qu’un peuple est libre de vivre sous le totalitarisme, lorsqu’il est né d’un consensus social et donc se soustrait du devoir d’insurrection ?. »

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