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Les dieux ne sont-ils que des hommes divinisés ?

Publié le 22/02/2004

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Et quand l'enfant, en grandissant, voit qu'il est destiné à rester à jamais un enfant, qu'il ne pourra jamais se passer de protection contre des puissances souveraines et inconnues, alors il prête à celles-ci les traits de la figure paternelle, il se crée des dieux, dont il a peur, qu'il cherche à se rendre propices et auxquels il attribue cependant la tâche de le protéger. Ainsi la nostalgie qu'a de son père l'enfant coïncide avec le besoin de protection qu'il éprouve en vertu de la faiblesse humaine ; la réaction défensive de l'enfant contre son sentiment de détresse prête à la réaction au sentiment de détresse que l'adulte éprouve à son tour, et qui engendre la religion, ses traits caractéristiques. » Freud.                      La religion n'est pas l'objet central de l'investigation Freudienne : l'auteur étend à ce champ du réel les conséquences de son interprétation des maladies psychiques et du fonctionnement de l'inconscient. C'est ainsi que la religion se trouve englobée dans sa théorie du déterminisme psychique. Freud lui consacre tout de même trois ouvrages, dont deux, « Totem & Tabou » et « Moise & le monothéisme », développent une hypothèse, aujourd'hui fort  contestée, de la genèse du phénomène religieux : à l'origine de l'humanité, le meurtre du père par ses fils aurait fait naître chez ceux-ci un sentiment de culpabilité, qui n'aurait trouvé d'issue que dans le culte voué au père défunt, et divinisé. Le troisième livre de Freud, « L'avenir d'une illusion », porte, comme son titre l'indique, un double regard, synchronique et diachronique, sur la nature de la religion, et sur son destin historique. Freud conçoit la religion comme une illusion, cad comme une croyance fondée sur la réalisation d'un désir (et non sur la connaissance objective de la réalité). Elle est une réponse à une situation de détresse : lorsque l'enfant constate que ses parents, qu'il croyait parfaits, s'avèrent faillibles, son désarroi l'incite à projeter dans l'au-delà les attributs de toute-puissance et  de toute-tendresse qu'il désirait (et donc croyait) les voir assumer jusqu'alors. La religion a donc pour effet de reproduire à l'échelle sociale les relations de l'enfant à l'autorité parentale, dans leur double fonction de protection et de répression.

« que dans la conscience de l'homme, l'humain est d'autant plus rabaissé que Dieu est glorifié : « Pour enrichir Dieu, l'homme doit s'appauvrir, pour que Dieu soit tout, l'homme doit n'être rien. » Ainsi la religion nie-t-elle consciemment en l'homme la raison et le bien pour réaffirmer en Dieu, mais inconsciemment, ces mêmes qualités. La religion ne peut donc être qu'un anthropomorphisme : « Tu crois en l'amour comme à une qualité divine, parce que toi-même tu aimes, tu crois que Dieu est sage et bon, parce que tu ne connais rien de meilleur en toi que la bontéet l'entendement, et tu crois que Dieu existe, qu'il est donc sujet ou être [...] parce que toi-même tu existes, parceque toi-même tu es un être... » Pourquoi l'homme s'aliène-t-il ? Pourquoi ne prend-il pas conscience de lui-même directement ? C'est parce que toutêtre humain ne se connaît que comme individu, et donc comme un être fini et borné.

Si l'homme prenait consciencede lui-même comme espèce, il reconnaîtrait les virtualités de la toute-puissance et de la perfection du genrehumain.

Mais tout individu, n'ayant conscience que de sa finitude, doit, pour pouvoir se représenter les potentialitésinfinies de l'espèce, les imaginer extérieurement à lui, comme les attributs d'une puissances étrangères :« L'opposition du divin et de l'humain est illusoire », il n'y a opposition qu'entre « l'essence humaine et l'individu humain ». Aussi la tâche de la philosophie est-elle de faire reconnaître à l'homme sa propre essence au lieu qu'il l'adore en unautre être (Dieu).

Il y a du divin, car le savoir ou l'amour sont choses divines, mais il n'y a pas de Dieu.

Feuerbach n'est donc pas un véritable athée, il se propose seulement de substituer à la religion de Dieu celle de l'homme.

C'està la politique de réaliser l'essence humaine.

Il s'agit d'actualiser tout ce qu'il y a de possibilité divine en l'homme :« Il nous faut redevenir religieux, il faut que la politique devienne notre religion. » On peut accorder à notre auteur que toute religion est anthropomorphique.

La religion chrétienne n'a-t-ellepas, d'ailleurs, reconnu le caractère anthropomorphique de toutes les religions qui l'ont précédée ? N'a-t-elle pasaffirmé, en particulier, que la religion grecque n'était qu'un paganisme ? Quant au christianisme, n'a-t-il pas, dans sathéologie, avec la figure du Christ, uni le nom de l'homme et le nom de Dieu dans le seul nom de l'Homme-Dieu ? LeChrist est-il Dieu fait homme ou homme fait Dieu ? La religion chrétienne n'est-elle pas la plus proche de la vérité detoute religion : le mystère de l'homme fait Dieu ? En affirmant que c'est l'être humain qui est divin, Feuerbach élève la politique au rang de religion.

Si le but est d'actualiser les perfections qui sont celles que recèlerait en puissance l'espèce humaine, n'y a-t-il pas là le risqueque la politique se transforme en fanatisme ? La fin ne pourrait-elle pas justifier les moyens ? Quant au but, on peutse demander s'il est vraiment souhaitable que l'homme affirme sa toute-puissance et sa domination sur le monde.Vouloir accéder à une perfection absolue, aspirer à vaincre les limites, à supprimer les infirmités et la mort, vouloiren somme être des dieux, n'est-ce pas vouloir amputer l'homme de sa dimension humaine ? Au nom du respect del'humanité, ne faut-il pas renoncer à certains désirs technocratiques ? Certes Feuerbach considère que l'homme, en son essence, possède aussi les virtualités de la bonté et de la sagesse.

On peut toutefois constater que s'il y a eu,dans l'histoire des hommes, des progrès scientifiques et techniques indéniables, peut-être aussi des progrès du droitet de la liberté, on attend toujours une transformation morale de l'homme.

Ce dernier est capable du pire comme dumeilleur.

On peut enfin ajouter que les prédicats de l'être divin se contredisent.

La sagesse, par exemple, ne peutque limiter la toute-puissance.

Comment concilier les deux ? Quoi qu'il en soit, s'il semble effectivement que nous ayons une capacité d'augmenter nos perfections qui pourrait unjour nous donner la puissance d'être parfaits, ne faut-il pas y voir la marque de notre imperfection ? si cettepossibilité de progresser est infinie, cela ne veut-il pas dire que nous n'atteindront jamais la perfection ? Que leprogrès humain soit infini n'est-il pas le signe de notre finitude ? L'idée de Dieu n'est-elle pas l'idée d'un être quipossède actuellement (et non en puissance) toutes ces perfections auxquelles nous aspirons sans jamais pouvoirvraiment les actualiser ? C'est peut-être parce que nous avons cette idée de Dieu que nous pouvons désirer àl'infini.

Mais d'où nous vient cette idée qui dépasse notre entendement ? n'est-elle pas, comme Descartes le pense, la marque du créateur cad de Dieu, sur son ouvrage ? Dieu est un modèleTout homme imite un homme plus grand que lui (son père ou son maître).

S'il a pour ce modèle un attachementpassionné et lui voue un culte, ce modèle devient un dieu.

Freud montrera que Dieu le Père n'est en définitive que lepère géniteur sublimé.. »

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