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La difficulté de comprendre les autres fausse t elle nécessairement tout rapports avec eux ?

Publié le 26/09/2005

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Sans la certitude de l'existence d'autrui, aucune relation véritable ne peut avoir lieu. - La difficulté à comprendre les autres peut conduire naturellement au rejet de l'autre. Parce que les opinions divergent, parce ce que l'on ne parvient à s'entendre sur une même idée, on se querelle, on devient intolérant et on met fin à toute relation avec l'autre. - Pour Gaston Berger (Du prochain au semblable, in La présence d'autrui), l'individu cherche à comprendre les autres mais n'y parviendra jamais. « L'homme est condamné par sa condition même à ne jamais satisfaire un désir de communication auquel il ne saurait renoncer ». Ainsi, chacun est enfermé dans sa souffrance, isolé dans le plaisir, solitaire. On peut voir souffrir l'autre, souffrir de le voir souffrir, mais nous ne souffrirons toujours autrement que lui. On n'est donc jamais tout à fait avec l'autre. Il en va de même dans l'amour et l'amitié : ce ne sont que des rapports artificiels, forcément faux car on ne partage pas à l'identique les sentiments de l'autre. Lévinas souligne à ce propos que l'idée d'une fusion avec autrui qui serait une confusion entre deux êtres est « une fausse idée romantique ».

Chaque jour nous rencontrons des proches, des amis, des voisins, des êtres humains. Nous vivons avec les autres, nous sommes plongés dans le milieu de la relation. Et pourtant, les autres restent toujours un mystère pour nous, car même semblables à nous, ils sont radicalement différents de nous. Si les autres nous sont familiers, on ne peut prétendre les connaître vraiment. Si nous communiquons entre nous, nous ne sommes pourtant pas sûrs de nous comprendre réellement. En effet, ceux que nous croyons semblables au premier abord se révèlent toujours différents de ce que nous aurions pu penser d’eux. Face à une telle difficulté à comprendre les autres, pouvons-nous espérer entrer dans une vraie relation avec les autres ? La difficulté de comprendre les autres fausse-t-elle tout rapport avec eux ?

« 3ème partie : Un rapport véritable avec les autres est possible malgré notre difficulté à les comprendre. - L'incompréhension d'autrui n'empêche pas la mise en place de certains rapports entre les êtres, fondés parnécessité dans une perspective pragmatique et pratique.

En effet, la présence d'autrui est indispensable audéveloppement de la vie du sujet.

Pour Descartes, bien que chacun de nous soit une personne distincte des autres,et que par conséquent, chaque sujet a des intérêts singuliers qui diffèrent de ceux d'autrui, on ne sauraitcependant « subsister seul ».

Ainsi, pour Descartes, le rapport à autrui est nécessaire à notre subsistance, donc ànotre vie.

Cet argument est celui développé par Aristote dans le Politique (I, 2), où il explique que l'homme ne peut se suffire à lui-même, et est naturellement fait pour vivre en compagnie de ces semblables, dans le cadre d'unecommunauté instituée appelée la cité.

L'homme est alors défini par Aristote comme un « animal politique », qui ne réalise pleinement son excellence humaine qu'en vivant en société, c'est-à-dire, en accomplissant la tâche qui luiest départie au sein de la cité organisée par un système de division du travail où chacun possède une place biendéfinie.

Ainsi le cordonnier, le laboureur, le maçon et le tisserand (ce sont des exemples de Platon, La République , II), sont nécessaires et indispensables les uns aux autres.

Un véritable rapport commercial est donc instauré, qui nenécessite pas que les hommes se comprennent entre eux intimement, mais seulement qu'ils soient tous conscientsdu bienfait de leur interdépendance.- L'incompréhension d'autrui peut nous exhorter justement à engager une relation avec l'autre.

Ce que l'on necomprend pas intrigue, suscite la curiosité.

Parce qu'autrui ne se dévoile pas à nous dans une totale transparencede lui-même, nous cherchons à instaurer un rapport véritable pour s'approcher de lui, le connaître, le comprendre.Parce que c'est difficile de comprendre les autres, nous pouvons être d'autant plus attentifs aux autres, ouverts etsincères, dans un désir d'explication.- La relation à autrui peut aussi prendre la forme de la « reconnaissance ».

Pour Sartre ( L'être et le néant ), peut importe que je comprenne autrui, sa simple présence me fait prendreconscience de mon existence.

Le regard de l'autre me transforme en sujet, etme permet d'avoir une conscience réflexive sur moi-même.

Le sujet et autruipeuvent alors atteindre ensemble la dignité, s'élever ensemble.

Même s'il leconteste, même s'il s'oppose au sujet, qu'il ne le comprend pas, autruiprovoque chez le sujet un sentiment de gratitude puisque c'est grâce à luique qu'il peut s'élever au-dessus de l'être égocentrique et égoïste.

Ainsi, lareconnaissance du sujet par autrui est un vrai rapport entre les deux, unrapport fructueux, car cette reconnaissance prenant la forme du respect, elleaugmente l'amour-propre du sujet, et contribue à sa bonne vie sociale et àson bonheur.- Quand bien même la difficulté à comprendre les autres peut empêcher lesindividus de s'aimer entre eux, il n'empêche que si l'homme obéit à l'injonctionmorale établie par Kant dans la Fondation de la métaphysique des moeurs , la relation à autrui doit être fondée sur le respect de l'autre.

L'impératifcatégorique kantien stipule : « Agis de telle sorte que tu traites l'humanitéaussi bien dans ta personne que dans la personne d'autrui, toujours en mêmetemps comme fin, jamais simplement comme moyen ».

La relation à autrui nedoit pas être fausse et corrompue si elle est soumise à la loi morale, mais elledoit au contraire être respectueuse de la liberté d'autrui.

Conclusion : Il semble que la difficulté à comprendre les autres, parce qu'ils sont radicalement différents de nous, risqued'empêcher tout rapport possible entre eux.

En effet, l'incompréhension peut mener à la suspicion, à l'intolérance etau rejet de l'autre, voire même conduire jusqu'au conflit.

Pourtant, l'expérience nous montre que nous instauronsdes liens avec les autres.

Néanmoins, ces rapports entres êtres humains sont corrompus de multiples façons, carnous ne pouvons jamais connaître et comprendre véritablement autrui, et que nous projetons alors notre propresubjectivité sur autrui, qui devient alors soumis à notre interprétation.

Nous nous faisons une image des autres, paranalogie avec nous-même, par intuitions, par déductions à partir de leur apparence et de leurs dires.

La difficulté àcomprendre autrui, lorsqu'elle nous pousse à « interpréter » l'autre, et donc forcément fausse.

Toutefois,l'incompréhension peut parfois mener à l'ouverture à l'autre, et en laissant l'autre venir à nous sans préjugés nijugements, nous pouvons espérer entrer dans un véritable rapport avec l'autre.. »

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