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Dire d'autrui qu'il est mon semblable , est-ce dire qu'il me ressemble ?

Publié le 09/01/2004

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Mais par là, ce n'est plus la différence qui est posée d'abord, c'est l'identité.Nous voyons donc la difficulté qu'il y a à fonder un lien moral avec autrui sur la ressemblance, c'est-à-dire, la différence prise comme fondement. Spinoza dit lui-même que le semblable c'est l'individu "tout à fait de même nature". Il y aurait donc une identité qui transcenderait les différences. Est-ce là l'échec définitif du critère de ressemblance?Pour obtenir la suite et la fin de ce devoir CITATIONS: « Personne n'est mon semblable, ma chair n'est pas leur chair, ni ma pensée leur pensée. » Max Stirner, L'Unique et sa propriété, 1845.C'est sur le constat du caractère unique de chaque individu que repose l'individualisme agressif de Stirner. Nul ne peut partager mes pensées, mes joies, mes souffrances ; l'autre est d'abord celui qui n'est pas moi, celui qui demeure irréductiblement étranger à moi-même. « Autrui, [.

« Reprenons le concept.

Nous avons vu que le ressemblant, par définition, n'est pas l'identique.

Le ressemblantrapproche des êtres irréductiblement singuliers.

Or le lien moral peut-il se fonder autrement que sur lareconnaissance de l'identité?La morale n'a de sens qu'universelle.

Jankélévitch nous le rappelle, soulignant que le relativisme moral, qui valorise ladifférence, s'appuie sur une exigence d'universalité, celle de la valeur de la différence: "dans toutes les négations dela morale s'affirme avec la même force le moralisme universel et obligatoire".

Le critère de ressemblance peut-ilconduire à autre chose qu'à une multiplicité de définitions du "semblable"? S'il n'y a que des individus singuliers, laressemblance sera toujours relative à un aspect arbitrairement sélectionné.On peut sortir de cette difficulté en renonçant à l'hypothèse selon laquelle la différence constituerait un fondement.On la remplacera par cette autre hypothèse: l'identité est le fondement de l'humanité.

Les humains ne sont plusalors considérés comme des singularités irréductibles partageant certains traits, mais comme une identitéfondamentale que masquent les particularités qui nous différencient.

Mon semblable ne m'apparaît plus en tant qu'ilme ressemble (il y a moi, il y a lui, et des points communs) mais en tant que toute différence disparaît ) son contact(il n'y a plus ni moi, ni lui, mais un être identique et anonyme: l'humain).

Comme le souligne Spinoza, le contactrationnel avec autrui dévoile cette identité anonyme.

La raison est identique, universelle et anonyme.

Ce n'est pas"moi" qui raisonne, ni "lui", c'est la raison elle-même.

Dans la raison, la singularité s'évanouit, la différence disparaît,le "moi" s'efface, ainsi que "l'autre".L'identité ne peut pas se conclure par comparaison: elle met en évidence les points communs mais sur un fondd'irréductible différence.

Montrer comme le fait le biologiste, que nous avons une structure biologique comparable,ne nous montre pas que l'autre est identique à moi, pas plus qu'un jumeau ne se confondra avec son frère parceque leurs images sont quasiment indiscernables.

L'identité ne peut pas se voir dans la ressemblance, et c'estpourquoi le message du biologiste ne convainc que ceux qui sont déjà convaincus.

Les "non convaincus" auront alorsbeau jeu de dénoncer là un "humanitairement bêlant", c'est-à-dire un conformisme idéologique.Le problème de la reconnaissance du semblable comme l'identique est très ancien.

La tradition biblique apporte sasolution: autrui est reconnu comme notre semblable grâce à la révélation.

Que nous dit-elle? "Dieu créa l'homme àson image" (Genèse 1-27).

Le semblable, c'est celui qui est, identiquement à moi, image de Dieu.

Je reconnais autruicomme mon semblable, non parce qu'il me ressemble, mais parce qu'il m'est fondamentalement identique.

Ainsi,même la créature la plus dissemblable (l'handicapé lourd) nécessitera mon respect en tant qu'image de Dieu.

Biensûr, un tel fondement est fragile, comme l'histoire de la religion biblique l'a montré.

Comment en effet savoir quipossède cette identité qu'aucune apparence ne dévoile? Le visage le plus "ressemblant" peut cacher le démon.

Quiest homme, et qui ne l'est pas? La reconnaissance d'autrui comme semblable à Dieu court le risque de tous lesarbitraires? Spinoza a souligné les dangers du recours à la transcendance, c'est pourquoi il cherchait un critère immanent de reconnaissance de la valeur d'autrui.Un critère dégagé par Spinoza et développé par Kant, est celui de la raison(que Spinoza écrit Raison).

Dans la raison, l'individu laisse s'effacer sesparticularités, son moi, son altérité pour n'être que cette identité anonymequ'est l'esprit rationnel.

Mais pourquoi respecter l'être doué de raison? Kantrejette le critère d'utilité, toujours discutable.

Il veut un critère indiscutable,c'est-à-dire tiré de la raison elle-même, et non de l'expérience.

Il raisonneainsi: seule la valeur vaut, or seule la raison produit des valeurs, par lesimpératifs catégoriques.

Donc la raison est une valeur, parce qu'elle faitexister les valeurs, les lois morales.

Respecter l'autre, c'est respecter laraison, c'est respecter les valeurs que la raison produit.

Ce n'est donc pasl'autrui que l'on respecte, mais la raison comme source de valeurs: les loismorales.

Bien sûr, tout ce raisonnement s'écroule si l'on objecte, comme lefera Hegel, que l'impératif catégorique ne nous livre que du non-contradictoire, et pas des valeurs.

Néanmoins, la raison n'est-elle pas le lienimmanent le plus général qui relie les hommes? On ne peut fonder un lien moral entre les hommes sur la ressemblance.L'identité semble être un fondement plus sûr, par-delà les dissemblances, mais délicat à cerner.

La raison peut-elle être cet identique? Elle exige d'abandonner son moi, sa singularité.

Spinozasouligne qu'une telle exigence est irréalisable.

Néanmoins, elle permet de nous repérer sans en appeler à latranscendance, en valorisant au-delà de l'autre l'esprit rationnel humain qui est en moi et en l'autre.. »

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