Devoir de Philosophie

Le discours de Fulton

Publié le 02/08/2006

Extrait du document

discours

5 mars 1946 -   Dans le discours qu'il a prononcé mardi après-midi 5 mars au Westminster College, à Fulton (Missouri), en présence du président Truman, M. Churchill, après avoir rappelé qu'il parlait en simple particulier, a notamment déclaré: " Quelles sont les tâches que nous nous sommes assignées ? Elles consistent à assurer la sécurité, le bien-être, la liberté et la marche vers le progrès des foyers et des familles, de tous les hommes et de toutes les femmes de tous les pays. Si l'on veut que ces foyers innombrables jouissent de la sécurité, nous devons les mettre à l'abri de deux terribles intruses : la guerre et la tyrannie... " " Un organisme mondial a été constitué, dont la mission première est d'empêcher la guerre ".

   " Je tiens, à ce propos, à formuler une proposition concrète. Les tribunaux et les magistrats seraient impuissants sans la police. Il faut que l'organisation des Nations unies soit dotée sans tarder d'une force armée internationale. Dans ce domaine, nous ne pouvons avancer que pas à pas, mais il nous faut commencer dès à présent. Je propose que chaque puissance et chaque Etat soient invités à mettre un certain nombre de troupes d'aviation au service de l'organisme mondial ".

   " Ces groupes seraient entraînés et équipés dans leurs propres pays, mais ils voyageraient d'un pays à un autre en obéissant à un mouvement de rotation, ils porteraient l'uniforme de leur pays avec des insignes différents, on ne leur demanderait pas de passer à l'action contre leur patrie, mais en toute autre circonstance ils recevraient leurs ordres de l'organisation mondiale. Celle-ci pourrait débuter sur une échelle modeste et grandir en même temps que la confiance ".

   " J'en viens au second danger qui menace le monde: la tyrannie. Nous ne pouvons pas fermer les yeux devant le fait que les libertés dont jouit chaque citoyen sur toute l'étendue de l'empire britannique n'existent pas dans un grand nombre de pays, dont certains sont très puissants. Dans ces Etats, le peuple est assujetti à toutes sortes de contrôles exercés par le gouvernement. Le pouvoir de l'Etat est exercé sans restriction, soit par des dictateurs, soit par des oligarchies fermées agissant par l'entremise d'un parti privilégié et d'une politique de parti "...

   " J'ai beaucoup d'admiration et d'amitié pour le vaillant peuple russe et pour mon camarade de combat, le maréchal Staline. Il existe en Grande-Bretagne-et je n'en doute pas, ici également-beaucoup de sympathie et de bonne volonté à l'égard des peuples de toutes les Russies, et une détermination à persévérer à établir, malgré différences et querelles, une amitié durable... Il est cependant de mon devoir de vous exposer certains faits concernant la situation présente en Europe ".

   " De Stettin, dans la Baltique, à Trieste, dans l'Adriatique, un rideau de fer est descendu à travers le continent. Derrière cette ligne se trouvent les capitales de tous les pays de l'Europe orientale : Varsovie, Berlin, Prague, Vienne, Budapest, Belgrade, Bucarest et Sofia. Toutes ces villes célèbres, toutes ces nations se trouvent dans la sphère soviétique, et toutes sont soumises, sous une forme ou sous une autre, non seulement à l'influence soviétique, mais encore au contrôle très étendu et constamment croissant de Moscou. Athènes seule, avec sa gloire immortelle, est libre de décider de son avenir par des élections auxquelles assisteront des observateurs britanniques, américains et français... Les communistes, qui étaient plus faibles dans tous ces pays de l'Est européen, ont été investis de pouvoirs qui ne correspondent nullement à leur importance numérique, et cherchent partout à s'emparer d'un contrôle totalitaire. Sauf en Tchécoslovaquie, il n'existe pas, dans cette partie de l'Europe, de vraie démocratie... " " Cependant, dans un grand nombre de pays éloignés des frontières russes, et à travers le monde entier, les cinquièmes colonnes communistes s'installent et travaillent dans une unité complète avec une obéissance absolue aux directives du centre communiste. Dans l'Empire britannique et aux Etats-Unis, où le communisme est dans l'enfance, les partis communistes constituent un défi et une menace croissante à la civilisation chrétienne... " " Je ne crois pas que la Russie désire la guerre. Ce qu'elle désire, ce sont les fruits de la guerre et une expansion illimitée de sa puissance et de sa doctrine. Mais ce que nous devons examiner ici aujourd'hui, alors qu'il en est encore temps, c'est le moyen d'empêcher la guerre de façon permanente, et d'établir dans tous les pays, aussi rapidement que possible, les prémices de la liberté et de la démocratie ".

   " Les difficultés, les dangers auxquels nous avons à faire face ne disparaîtront pas si nous nous contentons de fermer les yeux. Ils ne s'évanouiront pas davantage si nous restons à attendre ce qui se passera, ni si nous pratiquons une politique d'apaisement. Il faut trouver une solution ".

   " J'ai appris, pendant la guerre, à connaître nos amis et alliés russes, et je suis convaincu qu'il n'y a rien au monde qu'ils admirent autant que la force, et rien qu'ils respectent moins que la faiblesse militaire. "

Le Monde du 7 mars 1946

 

Liens utiles