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Donner pour recevoir, est-ce le principe de tout échange ?

Publié le 04/02/2004

Extrait du document

La dot en effet se substitue, en B, aux femmes absentes, mais elle ne les remplace pas. C'est pourquoi elle est en fait destinée à ne pas être durablement conservée : elle doit être à nouveau échangée contre des épouses en provenance d'un troisième groupe C qui, à son tour, se trouvant déséquilibré, devra remettre en circulation la dot, etc.Il apparaît ainsi que, si l'échange commence par un don, il implique d'abord que celui à qui on donne fasse bien partie de l'humanité : on peut donner à un animal, mais c'est sans retour. De plus, l'extension de l'échange d'un groupe à l'autre définit une humanité de plus en plus vaste. Mais surtout, le don initial aboutit à un relatif dénuement. Il doit donc être compensé par un contre-don. Ce dernier n'est pas nécessairement de même nature que le don : il en tient lieu symboliquement, mais, dans un second temps, il permet de retrouver ce qui a été donné.On donne ainsi pour recevoir, parce que recevoir en échange est une nécessité : il s'agit de rétablir dans ce cas l'intégrité du donateur. Le « pour « indique moins une intention, un but conscient, qu'un principe de rééquilibration. [II.

« [III.

L'échange s'équilibre dans le contre-don] Dans sa forme initiale, l'échange d'objets se présente sous l'aspect du troc : objet contre objet, sans médiation.

Lesdeux objets ainsi troqués doivent avoir la même « valeur », ce qui n'a d'abord de sens que relativement à leur utilitéou à leur usage : je ne consens à donner un objet correspondant à la satisfaction d'un besoin que si je reçois enretour un objet correspondant à la satisfaction d'un besoin qui peut être différent, mais d'importance ou d'intensitééquivalente.

Le troc, en dépit de son apparente simplicité, suppose donc, outre une sociabilité minimale, le refus durapt immédiat : il suspend la violence et instaure des relations pacifiées.

Il témoigne donc d'un choix, et d'uneréciprocité sur laquelle les deux partenaires doivent être, explicitement ou non, d'accord.Une forme déroutante ou paradoxale (de notre point de vue) de l'échange des objets se présente sous l'aspect dupotlatch : deux groupes se défient en procédant à des dons apparemment sans retour.

Dons qui révèlent lacapacité de chacun à dépenser, à consumer les richesses sans souci de rentabilité : un groupe en défie un autre endéposant sur un territoire neutre des richesses.

Il peut donc les sacrifier, mais si l'autre les récupère, il avoue soninfériorité.

D'où une surenchère : le second groupe doit montrer sa puissance en déposant à son tour des richessesen quantité plus importante.

Et ainsi de suite jusqu'à ce qu'il n'y ait plus rien à offrir, et que l'un des deuxparticipants se trouve obligé de céder, c'est-à-dire de récupérer le don, pour survivre.

Le potlatch a d'abord sembléirrationnel et hors de toute idée d'échange, mais en fait, le vainqueur reçoit bien quelque chose en récompense : ilaccapare le symbole totémique du groupe adverse.

« Rémunération » symbolique, qui constitue malgré toutl'équivalent d'un contre-don final, à ceci près qu'il ne présente aucun intérêt pratique ou matériel.

Bataille y trouveen conséquence la preuve d'une économie de la dépense (ou de l'absence de calcul), mais la dépense en questionse trouve en fin de parcours compensée par ce qui est reçu comme marque symbolique de pouvoir.L'introduction de la monnaie, quelle qu'elle soit (coquillages, plaques de sel, armes, métaux), signale la mise au pointd'une valeur générale de référence, capable de « mesurer » tous les objets de valeur inégale.

En les étalonnanttous, la monnaie établit leur valeur d'échange, qui peut être tout autre que leur valeur d'usage.

Mais sonintervention, qui diffère la réception d'un objet contre le don initial, universalise la possibilité des échanges : pourvuque les différents partenaires soient d'accord sur la valeur théorique de la monnaie, le second temps de l'échange(monnaie contre objet) peut intervenir très longtemps après le premier (objet contre monnaie).

C'est alors lamonnaie qui circule majoritairement (elle y est d'ailleurs destinée, puisqu'elle est d'un transport plus facile que lesobjets), mais ce substitut ne modifie pas le principe fondamental : on donne contre de la monnaie, (on vend) pourensuite recevoir un autre objet contre de la monnaie (on achète).

À ceci près que la monnaie devient en elle-mêmesymbole de circulation possible de tout objet, donc de richesse, et que la valeur, initialement définie par l'utilité desobjets, se concentre en elle, puisqu'elle peut remplacer n'importe quoi.

À moyen terme, il s'agira alors de fairefructifier la monnaie elle-même, plutôt que de produire des objets : c'est la société marchande, ou capitaliste. [Conclusion] Quoi qu'il mette en circulation et quelle qu'en soit la forme apparente, l'échange suppose toujours que l'on donnepour recevoir.

L'évolution des systèmes économiques fait que l'on parle plus volontiers de vente ou d'achat, parceque la monnaie joue le rôle d'intermédiaire universel et que cet intermédiaire finit par passer au premier plan,dissimulant la circulation réciproque des objets.

Ce d'autant plus que la réciprocité implique de moins en moinsl'égalité des valeurs, qui ne sont plus fondées sur le seul usage, mais deviennent plutôt des signes d'appartenance àdes catégories sociales, au point que la valeur d'échange devient disproportionnée relativement à l'usage : del'échange fondé sur l'utilité, on est passé à la consommation fondée sur la quête du prestige social.. »

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