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Le droit n'est-il qu'une convention ?

Publié le 16/03/2004

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droit

Or, l'histoire nous montre une « relativité « des conceptions du juste et de l'injuste qui parle d'elle-même. Ce qui est juste ici est considéré comme blâmable là et réciproquement. Ce qui est le bien en France (au-deçà des Pyrénées) est une erreur ou un vice en Espagne (au-delà des Pyrénées). Nous ne pouvons que nous moquer alors d'une justice qui « change de qualité en changeant de climat «, justice qui doit être davantage objet de plaisanterie (« plaisante justice «) que de respect.

■ Pascal ne se contente pas ici de dénoncer l'incapacité de la raison à déterminer les principes de la justice authentique et universelle. Sur cette impuissance, nous dit-il, les hommes tirent des conclusions sur la nature de la justice, contre lesquelles il s'oppose. Les philosophes, en effet, au lieu de remettre en cause la relativité des conceptions du juste et de l'injuste, ne trouvent rien de mieux que d'essayer de la légitimer, ajoutant encore plus à la confusion. L'un, confondant la justice de Dieu et le pouvoir du souverain, affirmera que « l'essence de la justice est l'autorité du législateur « et que c'est lui, qui du haut de l'arbitraire de son bon-vouloir, décide de ce qui doit être considéré comme juste ou injuste. Tel autre affirmera que cette autorité repose sur « la commodité du souverain «, sur ce qui lui agrée et constitue son intérêt propre. D'autres enfin soutiennent que la seule autorité de la justice provient de la force de la coutume, le temps et l'usage ayant ainsi force de loi.

Le droit est conventionnel et non naturel. En ce sens, il est toujours l'expression d'une culture particulière. Ce sont des us et coutumes, des moeurs que vient le droit. C'est un produit de l'histoire. Chaque société est dôtée de ses propres lois.

MAIS...

Le droit naturel est loin d'être une fiction. Son rôle est de corriger sans cesse les imperfections du droit positif. Il représente l'ensemble des règles non écrites qui inspirent l'idéal de justice de la conscience universelle.

droit

« engagement, la règle est avant tout parole donnée.

Passer un contrat est de la puissance même de la parole. L'expérience infirme l'hypothèse d'un droit naturelSi un droit naturel existait, on trouverait des lois constantes et universelles dans les juridictions desdifférents pays.

Or, un simple regard, nous montre le contraire.

Ce qui est autorisé ici et défendu là-bas.

Lerelativisme juridique est une évident.

Pascal dira: "Sur quoi [le souverain] la fondera-t-il, l'économie du monde qu'il veut gouverner ? Sera-ce sur le caprice de chaque particulier ? Quelle confusion ! Sera-ce sur la justice? Il l'ignore.Certainement, s'il la connaissait, il n'aurait pas établi cette maxime, la plus générale de toutes celles qui sontparmi les hommes, que chacun suive les moeurs de son pays ; l'éclat de la véritable équité qui auraitassujetti tous les peuples, et les législateurs n'auraient pas pris pour modèle, au lieu de cette justiceconstante, les fantaisies et les caprices des Perses et Allemands.

On la verrait plantée par tous les États dumonde et dans tous les temps, au lieu qu'on ne voit rien de juste ou d'injuste qui ne change de qualité enchangeant de climat [...].Plaisante justice qu'une rivière borne ! Vérité au-deçà des Pyrénées, erreur au-delà.De cette confusion arrive que l'un dit que l'essence de la justice est l'autorité du législateur, l'autre lacommodité du souverain, l'autre la coutume présente ; et c'est le plus sûr : rien, suivant la seule raison,n'est juste de soi ; tout branle avec le temps.

La coutume fait toute l'équité, par cette seule raison qu'elleest reçue ; c'est le fondement mystique de son autorité.

Qui la ramène à son principe, l'anéantit." Ce texte de Pascal s'ouvre sur une question qui s'adresse à tout gouvernant d'un État : sur quel principecelui-ci doit-il fonder l'organisation (« l'économie ») de la société qu'il veut gouverner ?S'agit-il de fonder le droit sur « le caprice de chaque particulier» ? Pascal rejette cette solution qui ne peutaboutir qu'à une confusion, celle qui résulte des désirs changeants et contradictoires de chacun, où nulgouvernement ne peut trouver sa cohérence.S'agit-il de le fonder sur l'idée de la justice et de régler les lois sur ses exigences ? Or, pour Pascal, les princesignorent ce qu'est la justice universelle, et c'est cette thèse qu'il va tenter de démontrer dans ce texte.S'ils connaissaient une telle justice, en effet, ils n'auraient pas établi cette règle, « la plus générale de toutescelles qui sont parmi les hommes », qui consiste à affirmer que « chacun suive les moeurs de son pays » et laconception de la justice que les traditions développent chacune en particulier.

Descartes lui-même, dans leDiscours de la méthode, reprendra à son compte une telle règle, lorsqu'il adoptera une « morale provisoire »pour accompagner l'épreuve du doute : suivre les moeurs de son pays et les valeurs qu'elles établissent.Une telle règle, si communément admise, prouve que nul n'a pu déterminer la justice universelle, celle qui seserait imposée à tous les peuples avec l'évidence de la vérité.

Si une telle vérité existait, elle aurait soumistous les peuples, non par la contrainte qu'imposent les guerres, mais par la seule force de la reconnaissance «de la véritable équité ».

Celle-ci se serait imposée d'elle-même, enracinée (« plantée ») dans le coeur deshommes et dans leurs États, en tout lieu et en tout temps.Or, l'histoire nous montre une « relativité » des conceptions du juste et de l'injuste qui parle d'elle-même.

Cequi est juste ici est considéré comme blâmable là et réciproquement.

Ce qui est le bien en France (au-deçàdes Pyrénées) est une erreur ou un vice en Espagne (au-delà des Pyrénées).

Nous ne pouvons que nousmoquer alors d'une justice qui « change de qualité en changeant de climat », justice qui doit être davantageobjet de plaisanterie (« plaisante justice ») que de respect.

Pascal ne se contente pas ici de dénoncer l'incapacité de la raison àdéterminer les principes de la justice authentique et universelle.

Surcette impuissance, nous dit-il, les hommes tirent des conclusions sur lanature de la justice, contre lesquelles il s'oppose.

Les philosophes, eneffet, au lieu de remettre en cause la relativité des conceptions dujuste et de l'injuste, ne trouvent rien de mieux que d'essayer de lalégitimer, ajoutant encore plus à la confusion.L'un, confondant la justice de Dieu et le pouvoir du souverain, affirmeraque « l'essence de la justice est l'autorité du législateur » et que c'estlui, qui du haut de l'arbitraire de son bon-vouloir, décide de ce qui doitêtre considéré comme juste ou injuste.

Tel autre affirmera que cetteautorité repose sur « la commodité du souverain », sur ce qui lui agréeet constitue son intérêt propre.

D'autres enfin soutiennent que la seuleautorité de la justice provient de la force de la coutume, le temps etl'usage ayant ainsi force de loi.

Cette forme de scepticisme moral reposesur l'idée que la raison ne nous découvre aucune justice absolue.Or, ici, les philosophes établissent, selon Pascal, un faux lien causal etconcluent abusivement, de l'impuissance de la raison à déterminer lescritères de la justice universelle à sa relativité fondamentale.

C'estsurtout la coutume qui pousse les hommes à croire de telles choses : «la coutume fait toute l'équité », croit-on, et pour cette seule raisonqu'elle a été reçue par les Anciens.

Justification de fait et non de droit, et c'est là tout le fondement de sonautorité, à savoir l'usage, que Pascal appelle ironiquement « mystique » car il ne se laisse pas argumenter pardes discours.De même que le mystique religieux ne peut discourir sur les expériences du divin qu'il éprouve, ceux qui font. »

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