L'éducation doit-elle reposer sur la contrainte ?
Publié le 07/03/2004
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Le châtiment n'a jamais eu de valeur pédagogiqueNietzsche, dans la Généalogie de la morale, écrit: «Le châtiment endurcit et refroidit; il concentre; il aiguise lesentiment d'être étranger.» Plus un élève est contraint, plus il est puni, plus il a l'impression d'être victimed'une injustice, et plus il aura tendance à se révolter contre l'autorité pédagogique.Cette dernière, à son tour, multipliera les brimades, transformant le rapport maître-élève en un rapport deforces.
La nature de l'homme n'est pas mauvaiseRousseau, dans l'Émile, constate que «les hommes deviennent méchants».
«C'est à chercher comment ilfaudrait s'y prendre pour les empêcher de devenir tels», qu'il a écrit ce livre.
Ses principes d'éducationreposent sur le respect des penchants naturels de l'enfant, de l'adolescent.
Ce respect n'est pas un laisser-aller.
L'éducateur doit veiller à conserver la bonté originelle des mouvements de la nature.
On façonne les plantes par la culture, et les hommes par l'éducation.Si l'homme naissait grand et fort, sa taille et sa force lui seraientinutiles jusqu'à ce qu'il eût appris à s'en servir ; elles lui seraientpréjudiciables, en empêchant les autres de songer à l'assister ; et,abandonné à lui-même, il mourrait de misère avant d'avoir connu sesbesoins.
On se plaint de l'état de l'enfance ; on ne voit pas que la racehumaine eût péri, si l'homme n'eût commencé par être enfant.
Nousnaissons faibles, nous avons besoin de force ; nous naissons dépourvusde tout, nous avons besoin d'assistance ; nous naissons stupides, nousavons besoin de jugement.
Tout ce que nous n'avons pas à notrenaissance et dont nous avons besoin étant grands, nous est donné parl'éducation.
ROUSSEAU
Dans la nature, l'homme est l'animal le plus solitaire : seulel'organisation sociale lui permet de survivre en l'éduquant, en luitransmettant un savoir.Dans le premier paragraphe, Rousseau – remarquez-le bien – conjugueles verbes au conditionnel : «Si l'homme naissait [...] ».
Dans l'état denature, l'homme est l'animal le plus solitaire qui soit.Et même si l'homme naissait grand et fort, naturellement grand et fort,il n'en resterait pas moins faible en ce sens que seul, sans l'union des autres hommes, il ne peut survivre : il mourrait misérable, pitoyable, sans comprendre qu'il est homme.
C'est àcause de sa faiblesse naturelle que l'homme s'unit.
L'organisation sociale résulte de la nécessité de s'organisercollectivement pour améliorer ses conditions de vie, matérielles et spirituelles.
À ne pas le comprendre, la racehumaine « eût péri ».
L'homme se construit, de sa naissance à sa mort.
Il progresse, se perfectionne, aidé encela par la famille, la société.Il y a transmission de savoirs, d'expériences.
C'est parce qu'il a été enfant avant que d'être homme qu'il peutconquérir sa liberté, se développer.
Contrairement à Descartes qui regrette ce passage obligé par l'enfance(Discours de la méthode, 1- partie), Rousseau montre que l'homme ne peut se perfectionner qu'au fur et àmesure et que l'étape de l'enfance est nécessaire.
Il en est de même pour l'humanité.Cette constatation émise, Rousseau insiste, dans le deuxième paragraphe, sur la nécessité de l'éducation.
Lesverbes sont conjugués au présent, et non plus au conditionnel.
C'est désormais un état de fait que lafaiblesse naturelle de la race humaine à son origine.
Mais cet handicap se révèle un privilège pour évoluer.L'homme, contrairement à l'animal, est perfectible.
La société – la culture – fournit aux hommes un remèdeaux inconvénients et aux dangers de l'état de nature – l'extinction de la race humaine –, bien que cet état deculture développe l'inégalité.
L'éducateur est avant tout un tuteurEn horticulture, un tuteur est ce qui soutient la croissance d'une plante.
Il en va de même du rôle del'éducateur.
Il n'a pas pour tâche d'aller contre la nature de l'élève.
Il doit simplement lui permettre de sedévelopper harmonieusement et de se perfectionner, car, dit Rousseau, «tout est bien sortant des mains del'auteur des choses» (Émile).
L'homme est bon et spontanément altruiste avec autrui, une bonne éducation devra suivre le naturelde l'homme sans le contraindre La passion surgit dans l'homme avant d'avoir un sens et un but conscient : l'adolescent « devient sensibleavant de savoir ce qu'il sent ».
Inquiétude sans objet, désir sans forme, c'est la passion en général.
Il fautcertes distinguer les passions naturelles (l'amour de soi et ce qui en dérive naturellement), et les passionssociales issues de l'amour-propre.
L'amour de soi est le principe de la sensibilité humaine, l'origine de toutes les passions.
Amorphe, il doit êtreéduqué.
L'amour est la première des passions.
L'amour naturel se satisfait de n'importe quel objet et ne durepas.
Sous l'effet de l'éducation, l'amour de soi doit être étendu du souci de soi seul au souci du couple..
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