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L'Etat est-il l'ami de tous en même temps que l'ennemi de chacun ?

Publié le 28/02/2004

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L' État punit, légifère, réglemente, bref il empêche, parfois violemment, que l'individu se réalise comme il l'entend. L' État n'est pas compréhensif, à la manière dont nous l'attendons d'un ami, mais il punit, emprisonne, juge. Il tend, d'après cette description, davantage du côté de l'ennemi que du côté de l'ami. Dans la plupart de ses postures il se situe au dessus de nous. Ainsi, Nietzsche avait-il raison de voir en lui: « le monstre le plus froid de tous les monstres froids «, car il inspire effroi et crainte, il nous tient tous en respect. De là il peut être légitime de voir dans l'État l'entrave principale à l'accomplissement de l'individu. Celui-ci atome de la société peut même se sentir asservi, dominé par ce que Hobbes se plaisait de qualifier comme le « grand Léviathan, Dieu mortel « (Léviathan) .

Mais, ce qui en l'État nous entrave et nous brime n'est-ce pas plutôt son omniprésence? En effet, lorsque l'État est omniprésent nous perdons, pour ainsi dire, de notre volonté même d'agir. Mais alors, plutôt que de conclure que l'État est l'ennemi de l'individu ne faut-il pas conclure que l'État est notre ami pour autant que nous investissons dans la vie de la cité? Car, l'État a autant à attendre de nous que nous en avons à attendre de l'État.

Nous verrons en premier lieu que l'État est l'ennemi de l'individu en ce qu'il instaure inévitablement un rapport de domination. Ensuite, que c'est asservissement n'est pas tant le fruit de l'oppression inhérente à l'État mais bien plutôt de notre désintéressement de la chose politique.

Enfin, que l'Etat peut être envisagé comme l'ami de l'individu car c'est dans la coopération, réciproque et mutuelle, que réside à la fois la fin de l'État et la fin de l'individu.

 

 

  1. L'État asservi l'individu

  2. La toute puissance de l'État peut réprimer l'individu et sa capacité d'agir librement que si l'individu n'agit pas lui-même
  3. L'État est ce qui permet à l'individu de ce réaliser et donc de se libérer

 

 

 

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« Le paradoxe de la servitude volontaire chez LA BOETIE Si un tyran peut, à l'origine, asservir les hommes par la force et la terreur, il ne peut se maintenir qu'avec leurconsentement.

Les hommes ne sont pas esclaves par contrainte ou par lâcheté, mais parce qu'ils le veulent bien,car il suffirait de ne plus vouloir servir le tyran pour que son pouvoir s'effondre.

En effet, le tyran est infinimentfaible comparé à la force du nombre : sa seule force, c'est celle que lui offrent ses sujets.

On peut aussi remarquerque ceux- ci ne manquent pas de courage, car ils pourraient combattre jusqu'à la mort pour leur tyran.

Ils font doncle choix incompréhensible de lui sacrifier leur liberté, aliénant par là leur être même. Cette « volonté de servir » peut s'expliquer par le fait que « la nature a en nous moins de pouvoir que la coutume »: les hommes élevés sous la tyrannie prennent le pli de la servitude.

Le tyran abrutit et corrompt ses sujets par leprincipe du pain et des jeux, consistant à« sucrer la servitude d'une venimeuse douceur ».

Il utilise la religion pourleur inculquer la dévotion, à travers des fables.

La Boétie évoque ici la croyance aux rois thaumaturges, c'est-à-dire faiseurs de miracles (on leur prête la faculté de guérir les maladies), mais esquisse aussi une critique de lathéorie du droit divin, ramenée à une histoire qu'on raconte.

Quant aux rares individus éclairés ayant gardé le désirde la liberté, le tyran les élimine ou les isole par la censure. Un seul homme ne pourrait jamais asservir tout un peuple sans une chaîne d'intermédiaires grâce à laquelle « letyran asservit les sujets les uns par le moyen des autres ».

Le secret de la domination réside en effet dans lacomplicité des « tyranneaux », ces « mange-peuples » qui soutiennent le tyran pour satisfaire leur ambition et leurcupidité.

Chaque maillon de la chaîne accepte d'être tyrannisé pour pouvoir tyranniser à son tour, démultipliant ainsila relation de domination jusqu'à enserrer toute la population dans le filet du tyran. [2.

Haine de l'État et méconnaissance du politique]Ceci pourrait conduire, à l'inverse, à un sentiment d'hostilité envers l'État.

Source presque inévitable d'oppression àtravers la manipulation du sentiment d'appartenance et de « l'amitié », ne devrait-il pas plutôt être considérécomme « l'ennemi »? D'autant plus que, par ailleurs, il demande des sacrifices à l'individu, à la fois en limitant sesprojets par des cadres juridiques, en lui imposant des impôts, une formation scolaire, etc.

Il s'agirait donc de limiterau maximum le pouvoir et le rôle de l'État, voire de le faire disparaître complètement afin que « chacun » ne l'ait pluscomme « ennemi ».

C'est la thèse de penseurs anarchistes comme Stirner qui dénonce le rôle répressif et restrictifde l'État et prône sa disparition pure et simple.

Dans L'Unique et sa Propriété, son analyse est sans nuances: «L'État ne poursuit jamais qu'un but: limiter, enchaîner, assujettir l'individu, le subordonner à une généralitéquelconque.

Il ne peut subsister qu'à condition que l'individu ne soit pas pour soi-même tout dans tout; il implique detoute nécessité la limitation du moi, ma mutilation et mon esclavage.

» Néanmoins, de par ses excès, cette positiondévoile elle-même un lien affectif envers l'État, sur le modèle de la révolte contre l'autorité du père à l'adolescence.Il y a quelque chose de réactif, presque d'immature ou du moins d'irresponsable dans cette visée.

En effet, l'Étatpeut garantir aussi la formation équitable des citoyens grâce à l'École publique et gratuite, assurer la protectionsociale, la sécurité, etc.

Par ailleurs, aucun individu n'a à être « tout dans tout »: il doit à autrui une bonne part deses connaissances, de son équilibre, de son enrichissement.

Tout individu est lié aux autres par de multiples liens.Ainsi, ce serait méconnaître la dimension politique et la nécessité de garantie d'un espace public et commun pourtous que de vouloir supprimer l'État.

Sans lui, les libertés d'expression, de conscience, de circulation ne pourraientêtre assurées.

Ce qui ne signifie pas pour autant qu'il les respecte toujours. [3.

De troubles origines inconscientes]Cela dit, comment expliquer la persistance de ces sentiments contraires et leur vivacité? La réflexionpsychanalytique de Freud sur l'État permet de trouver une explication pertinente à ce phénomène, qui aurait sesorigines dans notre psychisme inconscient.

Depuis l'enfance, nous avons selon Freud la nostalgie du père protecteursur lequel nous appuyer et qui nous protège.

Ancrée dans notre inconscient, cette « figure » paternelle peut ensuitese fixer sur le représentant de l'État, avec lequel nous entretenons alors des liens affectifs sur le modèle de larelation au père.

Or, ceci correspond bien à l'ambivalence (deux composantes de sens contraire) du rapport del'homme à l'État que nous évoquions précédemment: d'un côté l'attachement, de l'autre la haine et le rejet.

Latendance au lien affectif trouverait donc sa source dans l'inconscient.

« Nous savons qu'il existe dans la massehumaine le fort besoin d'une autorité que l'on puisse admirer, devant laquelle on s'incline, par laquelle on est dominé,et même éventuellement maltraité.

La psychologie de l'individu nous a appris d'où vient ce besoin de la masse.

C'estla nostalgie du père, qui habite en chacun depuis son enfance », écrit Freud dans L'Homme Moïse et la Religionmonothéiste.

Sans nous en rendre compte, puisqu'il s'agit de phénomènes inconscients, nous transposons le type derelation au père à la relation avec l'État et son dirigeant, soit dans le sens de l'amour, soit dans celui de la haine. [II.

Comment fonder ce rapport sur une base rationnelle?] Il importe donc de démonter ce mécanisme, de prendre de la distance par rapport à lui afin de nous affranchir d'unlien affectif obscur avec l'autorité de l'État. [1.

Le lien politique n'est pas de sentiment] Pour cela, il est avant tout nécessaire de souligner que le lien politique n'est pas de sentiment mais de raison.

UnÉtat n'est pas une famille et les liens qui unissent les citoyens ne doivent pas être conçus sur un modèle affectif.C'est pourquoi les termes « ami » et « ennemi » sont trompeurs, de même que de nombreuses métaphores. »

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